Décryptage

Et si Internet était autorisé aux épreuves du bac ?

Internet, bientôt dans les bacs
Passer le bac en ayant accès au Web, une fiction en France… pour l'instant. © Rachel Frank / PlainPicture / Fancy Images
Par Christophe Garnier, mis à jour le 17 juin 2015
1 min

Permettre l'accès à Internet en salle d’examen ? L’idée paraît insensée. Pourtant, le Danemark a franchi le pas et l’Angleterre en débat. En France, la question n’est pas encore d’actualité… Ce qui n’empêche pas professeurs et élèves d’avoir leur avis.

Imaginez. Épreuve de philo au bac : vous attendez nerveusement que l'examinateur vous apporte le sujet. Au moment de retourner la feuille, catastrophe ! "Faut-il se libérer du désir ?" Impossible de vous souvenir des pensées d'Épicure, Descartes ou Nietzsche. Le stress monte. Pas de panique ! Vous vous connectez à Google, histoire de vous rafraîchir la mémoire, avant de passer le reste de l'épreuve à réfléchir à la meilleure façon de formuler votre réflexion.

Tout cela ne relève encore que de la fiction. Pourtant, lorsque Mark Dawe, le directeur du bureau des examens des universités d'Oxford et Cambridge, a formulé dans une interview au “Telegraph” l'idée que le baccalauréat (anglais) ne devait pas se contenter d'être un simple "test de mémoire", le débat sur l'accès à Internet pendant les examens s'est amplifié outre-Manche. "Nous avons des outils, comme Google, pourquoi vouloir l'exclure de l'apprentissage des élèves ?" s'est-il interrogé.

"Il faut évaluer les élèves sur leur capacité à traiter l'information"

Rendre possible l'usage du Web pendant les examens implique cependant de changer la nature des épreuves. Les questions de restitution des connaissances devront laisser la place à des questions de réflexion. Ce qui, pour Claude Lelièvre, historien de l'éducation, serait une bonne chose : "À notre époque,il est important d'évaluer les élèves sur leurs capacités à traiter rapidement les informations à leur disposition." Avec Internet, les examens, se rapprocheraient des conditions réelles. "Je n'ai jamais compris pourquoi un certain nombre d'outils que l'on utilise dans la vie sont supprimés au moment des examens. Nous ne sommes pas des machines ! Ni des dictionnaires bipèdes."

Un avis que partage Éléonore, lycéenne en terminale S (scientifique) dans un établissement de Toulon. "Je pense que, pour les matières scientifiques, Internet nous aiderait beaucoup. Il y a des milliards de formules à retenir ! Ce n'est pas forcément très utile de les connaître toutes, indique la jeune fille, qui souhaite effectuer une prépa maths-physique. On pourrait ainsi davantage se concentrer sur la résolution des exercices et le raisonnement." Et de citer l'exemple des travaux pratiques en SVT (sciences de la vie et de la Terre). "Là, même avec le cours ou Internet, si on ne connaît pas la méthode ou la pratique, il n'y a rien qui puisse nous aider."

Au tour de Lisa, en terminale S dans un lycée du Var d'insister sur la nécessité de savoir se servir d'Internet aujourd'hui : "Nous vivons avec et l'utilisons en permanence."

"Le bac a vocation à rester très généraliste"

Tous les lycéens ne sont toutefois pas du même avis. Comme Thibault, également en filière scientifique. "Avoir accès à Internet pendant les épreuves nous permettrait d'apporter plus de contenu à nos dissertations mais, pour peu que le sujet proposé manque d'originalité, on pourrait en retrouver un corrigé sur le Web et ainsi décrocher une bonne note sans rapport avec nos réelles compétences."

Même réserve côté enseignants. À écouter ces derniers, de nombreux élèves ont un gros problème de lecture. "Ils ne comprennent pas ce qu'ils lisent et il faut que ça aille vite", indique l'un d'entre eux. Et pour ces élèves, Internet ne peut rien.

L'usage du Web pendant le bac revient à s'interroger sur la finalité de celui-ci. "Le bac vise à contrôler ce qu'a appris l'élève", rappelle Jean-François Riou, professeur de SES (sciences économiques et sociales) dans un lycée vendéen. Pour David Marec, professeur de mathématiques dans un lycée de Seine-Saint-Denis, "il doit rester très généraliste et davantage axé sur les connaissances que sur les compétences”.

Si, au Danemark, Internet est autorisé aux examens dans certains établissements depuis 2010, ce n'est pas près d'être le cas en France. "Il s'agirait d'un véritable changement et pas seulement d'une mesure technique, loin s'en faut", analyse Claude Lelièvre. Déjà, en 1986, l'adoption de la calculatrice au bac avait suscité la controverse. En sera-t-il de même pour Internet ?

Les étudiants du master de journalisme de l'université de Cergy-PontoiseLes étudiants (re)passent le bac avec la rédac' de l'Etudiant !
À l'occasion du bac 2015, l'Etudiant a ouvert grand ses portes à 10 étudiants du master de journalisme de l'université de Cergy-Pontoise. Enquêtes, vidéos, reportages photos, revues de tweets... aux côtés de la rédaction, ils couvrent l'événement et vous conseillent pour réussir l'étape avec brio.
Qui sont-ils ? Inès, Mathilde, Laura, Maxime, Christophe, Anton, Romain, Louise, Elise, Pauline.

Si vous voulez tout savoir sur le bac cuvée 2015, lisez-les !

Articles les plus lus

Contenus supplémentaires

Partagez sur les réseaux sociaux !