France Business School : dans les coulisses du recrutement

Cécile Peltier Publié le
France Business School : dans les coulisses du recrutement
Talent Day, session de recrutement à FBS. // ©  FBS
Pas de hangars bourrés de candidats penchés sur leur sujet de dissertation, pas d'écrit du tout d'ailleurs, et encore moins de classement. Les "Talent Days", de France Business School, qui font la part belle aux oraux et aux DRH, ressemblent davantage à des entretiens de recrutement qu'à des concours classiques. Plongée au cœur d'une procédure critiquée.

Locaux agréables à quelques pas du métro, étudiants-ambassadeurs, personnel avenant, croissants et café à volonté... FBS a mis les moyens, ce samedi 25 mai 2013, pour mettre à l’aise les 24 candidats du Talent Day parisien.  En ce début d’après-midi, une dizaine d’étudiants – franciliens pour la plupart –, installés sur les chaises disposées dans le hall, devisent en attendant la prochaine épreuve. Titulaires au moins d’un bac + 2 – le minimum requis pour passer la sélection – et souvent d’un bac + 3, ils viennent de BTS, d'IUT, d'école d’ingénieurs, de l' université, et pour certains de classe préparatoire.

Face à eux, une douzaine d’examinateurs : pour moitié des professeurs de FBS, et pour moitié des recruteurs. Yannis Mercier et Caroline Tampigny, conseils en recrutement respectivement chez Exec avenue et SalesPartner, contactés par FBS via le Club des chasseurs de tête, se prêtent à l’exercice pour la première fois avec curiosité.

évaluer les compétences humaines des candidats

Ici, pas de plan en deux parties, ni de faute d’orthographe rédhibitoire, mais une sélection new-look qui tente de détecter des "talents". Les cinq exercices de la journée se composent de deux mises en situation de 45 minutes, l’une centrée sur la créativité et l’imagination, l’autre sur l’entrepreneuriat et l’initiative, d'un test de logique en ligne, d'un oral d’anglais en binôme avec un autre candidat et d'un bilan individuel.
L'objectif : permettre, avant tout, d’évaluer les compétences humaines des candidats : "agilité intellectuelle, prise de risque,  sens de la responsabilité, fibre entrepreneuriale…", détaille Benoît Anger, directeur de la communication et du développement de FBS.  Exemple : lors de l’entretien d’anglais, une aisance et des qualités de communicants pèseront plus lourd qu’une parfaite maîtrise de la syntaxe.

Tout au long de la journée, les candidats sont évalués sur leur capacité à s’exprimer, à interagir au sein d’un groupe, à réagir à un évènement imprévu ou à gérer leur stress sur la base d’une situation donnée. En fin de sélection, un entretien-bilan permettra de faire le point sur les résultats des tests, le comportement et compétences observées et de revenir sur le parcours d’études, la motivation et les projets du candidat (engagements associatif, sportif, projet de création d’entreprise, etc.) sur la base du dossier rempli de l’inscription en ligne.

La procédure de recrutement de FBS, une sélection new-look qui tente de détecter des "talents"

Rapprocher étudiants et entreprises

Inspirée de techniques d’évaluation utilisées par les cabinets de recrutements et les entreprises, la méthode élaborée par le cabinet Cubiks, est aussi adaptée au profil des jeunes : quand un recrutement classique s’appuie sur des expériences passées, ici, le jury va d’abord rechercher "une énergie, un potentiel de progression", explique Yannis Mercier. "Contrairement à un salarié classique ou même à un jeune diplômé, on va davantage tester la culture générale. On va aussi insister sur la créativité, on a envie de voir si le candidat a des idées, s’il est capable de sortir du cadre", ajoute Caroline Tampigny.

Pour préparer cette journée, tous les membres du jury ont été formés à cette nouvelle méthode. Un gage de sérieux selon Yannis Mercier : "les personnels de FBS remettent en cause l’ordre établi, mais de manière sérieuse". Caroline Tampigny, conseil en recrutement chez Sales Partner juge avec intérêt cette manière de procéder : "la démarche de FBS est vraiment novatrice dans la mesure où elle permet à l’étudiant de s’exprimer trois fois, c’est plus proche de ce qui se fait en entreprise que dans la plupart des grandes écoles." Un moyen, espère-t-elle de rapprocher étudiants et entreprises : "on a longtemps oublié qu’on allait à l’école pour travailler ensuite… "

Le jury va d’abord rechercher une énergie, un potentiel de progression (Y.Mercier)

un exercice empirique

Moins normé qu’un concours classique, la procédure permet vraiment de "détecter des qualités des étudiants et de rattraper des jeunes qui seraient passés à travers les mailles du filet ", salue Yannis Mercier. Pour autant, l’exercice très empirique, n’est pas forcément évident. Plusieurs mises en commun, accompagnées de discussions, sont parfois nécessaires pour se mettre d'accord sur un candidat. "C’est un vrai travail d’équipe", s’amuse-t-il.

Reste à savoir si les candidatures seront à la hauteur des espérances de l’école... Globalement, les deux recruteurs sont agréablement surpris par la qualité des étudiants. Renseignés, ils donnent l’impression de savoir pourquoi ils sont là et où ils veulent aller, même s'ils l'expriment parfois de manière très maladroite : "malgré des disparités, on était globalement sur des profils plutôt structurés avec beaucoup d’ambition et une forte ouverture à l’international, relève Caroline Tampigny. Certains ont des défauts, mais ils vont grandir et on le prend en compte." De son côté, Yannis Mercier a été frappé par leur pragmatisme : "ce ne sont pas des grands théoriciens, mais ils ont un esprit pratique et sont très dynamiques. Ils ont déjà fait beaucoup de choses pour leur jeune âge".

Des étudiants séduits mais prudents

Contre toute attente, les candidats semblent moins déstabilisés qu’on aurait pu l’imaginer, et beaucoup, comme Quentin, 20 ans, en deuxième année d’école d’ingénieurs, ressortent avec le sentiment d’avoir vécu une expérience intéressante. "Le jury était à l’écoute", confie le jeune homme qui envisage une reconversion en école de commerce pour concrétiser ses projets entrepreneuriaux. "Les épreuves sortent des sentiers battus, c’est intéressant", estime Vincent, 20 ans, étudiant en CPGE (Classe préparatoire aux grandes écoles) à Cergy.

Séduits par la formation tournée vers la pratique et l’international, mise en avant dans la plaquette de présentation, et la journée de sélection, les candidats restent néanmoins prudents. D'autant que beaucoup avouent s’être inscrits contre l’avis de leur entourage : "FBS se démarque vraiment des autres écoles en termes de sélection, mais va-t-elle réussir à faire de même en terme de formation ?", s’interroge Quentin.

S’il envisage FBS comme une vraie possibilité, d’autres comme Vincent ou Juliette, voient ces entretiens davantage comme un tour de chauffe avant les oraux des autres banques d’épreuves. Quitte à tenter l’aventure s’ils n’étaient pas pris dans une ESC bien classée. "Le concept FBS est différent, c’est un risque à prendre, mais ça me tente !", conclut Juliette, en deuxième année d’IUT de technique de communication à Angers.

FBS fera-t-elle le plein ?
L'école parviendra-t-elle à attirer les 1.300 étudiants attendus sur les rentrées de septembre et janvier ? Il est encore un peu tôt pour le dire à ce stade. FBS, qui attend 7.700 candidats, "n’a pas assez de recul pour chiffrer les retombées" des 50 premiers Talents Days, qu’il s’agisse du nombre de candidats, d’étudiants sélectionnés, et d’intégrations effectives. "On devrait y voir plus d’ici un mois et demi, une fois les résultats des autres banques d’épreuves tombés", explique FBS. Une cinquantaine de journées de tests sont encore programmées d’ici la fin 2013.

De mars à fin mai, les sessions ont accueilli en moyenne entre trente et quarante participants. L’école table en juin et juillet sur de plus gros contingents, et davantage d’élèves de prépa qui représentent jusqu'à présent 20% des inscrits.

Mais FBS veut voir au-delà : "nous sommes sur une démarche à trois ans, différente des banques d’épreuves classiques, où les étudiants s’inscrivent à un grand nombre d’écoles sans forcément être motivés, argumente Benoît Anger. Nous cherchons avant tout à recruter des candidats qui correspondent à notre projet. Pour l’instant, nous avons des retours très positifs."

FBS contrainte de quitter la CGE
La CGE (Conférence des grandes écoles) a annoncé le 3 juin 2013, via Twitter, la "démission" des quatre ESC à l’origine de FBS.  Un départ motivé par le changement de statut juridique de ces écoles, qui entraîne la perte immédiate de toutes leurs accréditations CGE : Mastères spécialisés (MS), Mastères en Science (MSc) ou Badge.

Afin de "ne pas pénaliser les étudiants, en cours de formation", la Conférence les autorise néanmoins à "délivrer leur diplôme aux étudiants inscrits cette année universitaire dans les formations accréditées". L’école est en train de déposer un nouveau dossier auprès de la CGE, pour l’entité dans son ensemble, cette fois.

En attendant, FBS préfère communiquer sur le maintien pour une durée d'un an de son accréditation AACSB, à deux de ses écoles fondatrices  : l’Escem (Tours-Poitiers) et l'ESC Clermont-Ferrand.
"Un premier pas" vers une accréditation globale, espère l’établissement qui table sur une obtention du label à l'horizon 2016-2017. L’école devrait également recevoir dans les jours qui viennent l’avis de la CEFDG sur le grade Master.
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