APB 2017 : les filières de droit et de Staps aux prises avec le tirage au sort

Natacha Lefauconnier, Aurore Abdoul-Maninroudine Publié le
APB 2017 : les filières de droit et de Staps aux prises avec le tirage au sort
L'université Panthéon-Assas pourrait instaurer un tirage au sort à l'entrée de sa licence de droit. // ©  Camille Stromboni
Avec l’afflux d’étudiants supplémentaires sur APB et l’instauration de l'égalité de traitement entre étudiants en réorientation et néobacheliers, les tirages au sort en licence ne risquent pas de disparaître en 2017. Si les licences de Staps sont les principales formations concernées, cette pratique pourrait également toucher le droit, notamment à Paris 2-Panthéon-Assas.

J'ai la volonté de faire disparaître le tirage au sort à l'université", avait martelé Thierry Mandon, secrétaire d'État à l'Enseignement supérieur et à la Recherche, dans une interview à EducPros, en février 2017.

L'instauration d'une procédure de vœux groupés sur APB (Admission postbac) avait effectivement contribué à la diminution du nombre de tirages au sort de 70 % l'an dernier et à sa disparition en droit. Mais les récents chiffres d'APB et l'égalité de traitement entre étudiants en réorientation et néobacheliers risquent pourtant de donner tort au secrétaire d'État. Du moins pour la session 2017. 

La plate-forme d'inscription dans l'enseignement supérieur a en effet enregistré 40.000 inscrits supplémentaires cette année, dont 14.000 étudiants en réorientation, les licences représentant toujours 38 % des vœux 1. À la rentrée 2016 déjà, il y avait 32.000 étudiants de plus sur les bancs de l'université.

vers un tirage au sort en droit à Paris 2

À Panthéon-Assas, "il est plus que vraisemblable qu'il y ait un tirage au sort à l'entrée de la licence de droit cette année", annonce à EducPros Guillaume Leyte, président de l'établissement. "Avec 1.242 vœux 1 de candidats prioritaires (bacheliers parisiens, réorientés domiciliés à Paris et bacheliers des établissements français à l'étranger), contre 690 l'an dernier, le nombre de vœux 1 pour la licence de droit a été multiplié par deux et est très supérieur à notre capacité d’accueil (1.000 places)", détaille Pierre Crocq, responsable du plan Licence de l'université.

Ce différentiel peut néanmoins encore bouger, puisque les étudiants pourront modifier l'ordre de leurs vœux jusqu'au 31 mai 2017. C'est d'ailleurs pour cette raison qu'"il faut regarder avec beaucoup de distance les premiers chiffres et ne pas s'affoler tout de suite", nuance de son côté François Germinet, président de l'université de Cergy-Pontoise, également à la tête de la commission formation de la CPU (Conférence des présidents d'université).

S'il est encore trop tôt pour savoir si le cas d'Assas est isolé et lié à son attractivité, la situation dans l'académie voisine est rassurante. "Le nombre de vœux 1 pour la licence de droit est stable et nous pourrons tous les satisfaire comme nous l'avons toujours fait", fait savoir Sandrine Clavel, doyen de droit et de sciences politiques à l'université de Versailles-Saint-Quentin.

staps : 980 places en moins

Au niveau national, les Staps demeurent les formations les plus concernées par le tirage au sort. Sur l'ensemble du territoire, seuls cinq UFR n’indiquent pas de capacité limitée sur APB, et les universités proposent cette année 14.500 places, soit un chiffre inférieur de 980 places par rapport à la rentrée précédente. Une diminution, qui témoigne peut-être de la volonté des doyens de se laisser une marge de manœuvre avant la pression des rectorats pour augmenter les capacités d'accueil, une fois les vœux stabilisés.  

Parallèlement, cette filière recueille pour l'instant 25.000 vœux 1, avec "une estimation finale, après hiérarchisation, à 32.000 vœux 1, contre 28.000 l'an dernier", avance Didier Delignières, directeur de l’UFR à l'université de Montpellier et président de la Conférence des directeurs et doyens d’UFR Staps. Dans son académie, les composantes Staps vont faire face à une hausse d’environ 22 % : "On devrait atteindre 1.000 à 1.100 vœux 1 pour 670 places", détaille-t-il.

À Poitiers également, un tirage au sort sera "inévitable", regrette Aurélien Pichon, doyen de l'UFR. Au regard des places disponibles (400 places pour 780 vœux 1 de l'académie), seule une candidature sur deux sera retenue !

Nous nous demandons si en communiquant autant sur notre licence, nous n'attirons pas malgré nous des candidats supplémentaires.
(A. Pichon)

Des campagnes d'information inefficaces ?

Face à cet afflux d'étudiants, les doyens se disent "démunis", d'autant plus qu'ils s'exposent à des recours administratifs puisque le projet de décret visant à légaliser le tirage au sort avait été retiré de l'ordre du jour du Cneser en début d'année. "On n'a plus de marge de manœuvre, se désole Didier Delignières. Il n'y a qu'à voir le mouvement social de l'UFR Staps de Caen depuis février 2017, ou celui de Toulouse, à l'automne 2016, qui dénoncent des conditions de travail lamentables."

Quant aux campagnes d'information et d'orientation active, ils en viennent à douter de leur efficacité : "Nous nous demandons si en communiquant autant sur notre licence, nous n'attirons pas malgré nous des candidats supplémentaires, qui ne prennent pas au sérieux nos mises en garde sur les exigences requises", témoigne Aurélien Pichon.

"On s'épuise avec l'information des lycéens !" renchérit Didier Delignières avant de confier qu'avec ses collègues, ils discutent "beaucoup" de l’instauration de prérequis à l’entrée de la licence. Même son de cloche du côté de Jean-Luc Dubois-Randé, président de la Conférence des doyens de médecine, qui dit réfléchir à "une sélection a minima, liée à la filière du bac". La situation est en effet particulièrement tendue en Île-de-France, même si, selon le ministère, les candidats à la Paces devraient échapper au tirage au sort cette année.

Des discussions d'autant plus intenses que la mise en œuvre de ces prérequis figure dans les programmes de plusieurs candidats à l'élection présidentielle.

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