Capes 2014 : le grand flou

Isabelle Dautresme Publié le
Capes 2014 : le grand flou
Les concours d'entrée devront-ils subir un lifting pour s'adapter à la réforme du baccalauréat ? // ©  Jessica Gourdon
L’inquiétude est grande parmi les candidats au Capes d'histoire-géographie. Sujets zéro sans corrigés, lettres de cadrage imprécises voire contradictoires… À quelques jours des premières épreuves, qui se déroulent les 1er et 2 avril 2014, enseignants et candidats s’alarment, tandis que le jury se veut rassurant. En toile de fond : la question de la professionnalisation de la formation des enseignants.

L'angoisse. C'est le sentiment qui domine parmi les candidats au nouveau Capes d'histoire-géographie dont les épreuves d'admissibilité auront lieu les 1er et 2 avril 2014. En cause : la très grande confusion qui règne autour des attentes du jury sur la deuxième épreuve écrite qui introduit, pour la première fois, une dimension professionnelle.

Des consignes peu précises

Les attentes du jury sont tellement peu claires, qu'il a fallu pas moins de trois lettres de cadrage pour tenter d'éclairer les formateurs. En vain."Aujourd'hui, à quelques jours des concours, je ne sais toujours pas ce que veut précisément le jury", lâche Emmanuelle Sibeud, maîtresse de conférence et responsable du parcours histoire-géographie du master MEEF (Métiers de l'enseignement, de l'éducation et de la formation) à Paris 8.

"La marge d'interprétation des textes est telle qu'il est très difficile de préparer correctement les candidats", renchérit un autre responsable du parcours histoire géographie du master MEEF, qui souhaite rester anonyme. Et Julie, étudiante en M1, de rapporter : "mardi dernier (le 25 mars), un professeur exaspéré, à force de ne toujours rien comprendre, a téléphoné, devant nous, au président du jury du Capes, Vincent Duclert, pour lui demander des précisions sur l'épreuve". L'absence de corrigés aux sujets zéro ajoute à la colère : "Le jury aurait quand même pu prendre la peine d'en fournir", s'insurge l'enseignante de Paris 8.

une préparation variable d'un formateur à l'autre

Les inquiétudes sont également nombreuses du côté de l'homogénéité de la préparation."Tous les candidats n'ont pas été formés dans les mêmes conditions", reconnaît Pascal Brioist, vice-président du jury du Capes d'histoire-géographie. Les maquettes de formation variant d'une Espé à l'autre.

Au sein même des universités, on peine aussi à s'entendre ."Parmi nos profs, certains ne sont jamais au courant de rien, tandis que d'autres font l'effort d'aller chercher l'information", témoigne Salomé, en M1 à Lyon 2. Pour preuve, "lors du dernier concours blanc, il y avait six sujets conçus par des enseignants différents. Sur certains figuraient des consignes correspondant à la première lettre de cadrage datant de novembre, sur d'autres celles de la deuxième voire de la troisième ! Pourtant tous les concepteurs de sujets enseignent au même endroit", s'étonne la jeune candidate.

Introduire des épreuves à caractère pédagogique dans le concours n'a rien d'évident

Une professionnalisation qui a du mal à passer

Si la deuxième épreuve d'admissibilité au Capes suscite tant d'inquiétudes, c'est parce qu'elle a été profondément modifiée dans le sens de la professionnalisation. Or, l'histoire-géographie est particulièrement attachée à la maîtrise scientifique des savoirs enseignés : contrairement aux autres matières, ce Capes est le seul à porter sur des questions de recherche et non sur les programmes du secondaire. Dès lors, introduire des épreuves à caractère pédagogique dans le concours n'a rien d'évident.

"Ce n'est pas dans nos habitudes" reconnaît Patrick Garcia, en charge de parcours d'histoire géographie du master MEEF de l'université de Cergy Pontoise. D'où des consignes confuses, reflet des tensions qui traversent la communauté des historiens.

Le jury, quant à lui, se veut rassurant. "La consigne va être donnée d'être le plus compréhensif possible et de faire preuve de bienveillance", assure Pascal Brioist. "Les étudiants seront avant tout jugés sur leurs capacités à élaborer un argumentaire, pour le reste, le jury n'a pas d'attentes particulières", croit savoir, de son côté, Patrick Garcia.

Les autres Capes également dans le brouillard

En cette veille de concours, les candidats au Capes d'histoire-géographie ne sont pas les seuls à se sentir un peu perdus. En lettres, les attentes des jurys ne vont pas non plus de soi. "On navigue à vue", témoigne Sylvie Fernando, chargée de formation pour ce concours au CNED. Quant aux mathématiques, en l'absence de corrigés aux sujets zéro et de consignes claires sur les attentes des examinateurs concernant la deuxième épreuve d'admissibilité, les doutes restent grands.

Cette première édition du Capes nouvelle formule sera examinée d'autant plus attentivement que les enjeux autour de la professionnalisation de la formation des enseignants sont sensibles.

Isabelle Dautresme | Publié le