L'année 2015 dans les écoles de commerce : un nouveau statut en construction

Cécile Peltier Publié le
L'année 2015 dans les écoles de commerce : un nouveau statut en construction
Alors que plusieurs écoles, HEC en tête, ont manifesté leur intérêt pour le nouveau statut, c'est l'ESC Dijon qui envisage d'y passer dès l'été 2015, avant de repousser ce changement à janvier 2016. // © 
RÉTROSPECTIVE 2015. Réforme de la formation professionnelle, baisse des dotations des CCI, diminution de la taxe d'apprentissage... Confrontées à une équation complexe, les écoles de commerce se lancent en 2015 dans la mise en place d'un nouveau statut, dont elles attendent de nouvelles marges de manœuvre.

Chez les écoles de commerce, 2015 s'ouvre par la création du statut d'EESC (Établissement d'enseignement supérieur consulaire). Attendu depuis des années, celui qui a été longtemps surnommé "le statut HEC" a été acté par la "loi Mandon", adoptée à la fin de l'année 2014.

Ce statut dote les écoles consulaires d'une personnalité morale et d'un cadre juridique proche de celui de la société anonyme, qui leur garantit une plus grande autonomie de gestion par rapport à leur tutelle. À la clé : "plus de flexibilité et de réactivité" et donc plus d'efficacité dans la prise de décision, juge Xavier Cornu, ex-directeur général adjoint enseignement, recherche et formation, à la CCI de Paris-Île-de-France, militante de longue date du projet.

Par exemple, en matière de gestion des personnels : "Nous pourrons recruter, fidéliser les meilleurs chercheurs internationaux mais aussi cadres dirigeants, sans référer aux règles consulaires de rémunération, en décalage complet avec l'environnement concurrentiel de nos métiers", décrit Loïck Roche, directeur de Grenoble École de management.

L'ESC Dijon se lance, puis se ravise

Alors que plusieurs écoles, HEC en tête, avaient manifesté leur intérêt pour ce nouveau statut, c'est l'ESC Dijon qui annonce, mi-mars, qu'elle serait la première à l'endosser, dès l'été. "Nous avons étudié tous les scénarios et c'est le modèle qui va nous permettre le mieux de développer l'école. Le statut associatif est assez souple mais il ne nous autorise pas, contrairement à ce nouveau statut, à constituer des fonds propres", explique alors le directeur général du groupe ESC Dijon, Stephan Bourcieu.  Pour l'école, c'est aussi le moyen de devenir propriétaire de ses locaux.

Les décrets d'application de la loi, publiés au mois de juin, ne permettent cependant pas de lever tous les doutes sur la mise en œuvre du nouveau statut, notamment en matière fiscale. Résultat : l'établissement bourguignon préfère finalement repousser son passage à l'EESC à janvier 2016.

HEC – dont le directeur, Bernard Ramanantsoa, a passé la main au Canadien Peter Todd en septembre –, TBS (Toulouse business school) ou GEM (Grenoble École de management) ont également annoncé leur décision de se lancer en 2016.

Attirer DE NOUVEAUX ACTIONNAIRES PRIVÉS AU CAPITAL

Dans un contexte de baisse des ressources et de saturation du marché national, le nouveau statut constitue un outil pour diversifier les sources de financements. "Nous pourrons racheter des cabinets de conseils, développer des filiales à l'étranger, etc.", décrit Loïck Roche. Il signifie aussi de nouvelles possibilités en matière de gouvernance et d'investissement, avec l'entrée d'actionnaires privés au capital.

"Celui d'HEC est ainsi en cours de valorisation – la marque, les terrains, les immeubles, l'expertise, les formations... Je ne me fais pas de souci : les fonds privés ont bien compris l'intérêt d'investir dans l'éducation !" assure Xavier Cornu. L'ESC Dijon, TBS ou GEM, qui se sont lancées avec énergie dans une opération séduction des entreprises de leur région, partagent cet optimisme.

Même si la loi Mandon interdit le versement de dividendes aux actionnaires – dominés par les CCI qui seront majoritaires – les entreprises privées ont d'autres bonnes raisons "d'investir dans les écoles", croit savoir François Bonvalet, directeur de Toulouse business school.

"Celle de s'afficher au côté d'un acteur important du territoire, mais aussi d'un potentiel pourvoyeur de formations", ainsi que le moyen de contribuer directement au développement territorial, et donc à leur propre activité, renchérit Stephan Bourcieu. Sachant que, si l'actionnaire décide de sortir du capital au bout de quelques années, et qu'entre temps, celui-ci s'est valorisé, il peut, en revendant ses parts, gagner de l'argent.

Après des mois de travail acharné, les écoles vont pouvoir souffler. Le PLFR 2015 (projet de loi de finances rectificative), adopté le 17 décembre, vient apaiser les dernières inquiétudes d'ordre fiscal pesant sur la mise en œuvre de l'EESC.

Cette dernière interviendra juridiquement au 1er janvier 2016 à HEC et TBS, suivie par Dijon courant janvier, puis GEM, vraisemblablement en juin. L'ESCP, elle, attendra le 1er janvier 2017.

Cécile Peltier | Publié le