Écoles de mode : le regroupement est tendance

Laura Taillandier Publié le
Écoles de mode : le regroupement est tendance
L'Ensad, Mines ParisTech et Dauphine ouvriront une nouvelle école de mode en 2017. // © 
Un mariage officialisé entre l’Institut français de la mode et l'École de la chambre syndicale de la couture parisienne, une union entre l'École des arts décoratifs, Mines ParisTech et Dauphine... Plusieurs rapprochements stratégiques sont à l’œuvre dans le secteur des écoles de mode. Avec un objectif partagé : gagner en visibilité sur la scène internationale.

"Ensemble unique", "masse critique", "au premier rang des institutions internationales" : c’est par ces mots que les deux écoles de mode, l'IFM (Institut français de la mode) et l'ECSCP (École de la chambre syndicale de la couture parisienne) ont officialisé leur rapprochement stratégique, mercredi 29 juin 2016. Objectif affiché : "doter la France d’une école de référence mondiale".

"Le paysage des formations de la mode se transforme dans le monde, avec des entités de plus en plus ambitieuses", relève Pascal Morand, président exécutif de la Fédération française de la couture, du prêt-à-porter, des couturiers et des créateurs de mode. Il codirige avec Dominique Jacomet, directeur de l’IFM, le comité de pilotage en charge de ce rapprochement. "Aujourd'hui, il faut atteindre une certaine masse critique et disposer d'un portefeuille de formations plus large", expose-t-il. 

Le nouvel ensemble constitué par les deux écoles rassemblera ainsi 700 étudiants et proposera une gamme de formations allant du CAP au bac + 5, dans les domaines du management et de la création de mode.

IFM ET ECSCP : vers une école "de référence mondiale"

Cette nouvelle école, dont le nom n'est pas encore défini, sera placée sous la responsabilité de l'IFM. Pour l'instant, chaque établissement conserve ses formations (du CAP au bac + 4 pour l'ECSCP et de niveau bac + 5 pour l'IFM). "Nos formations sont complémentaires. L'IFM a un fort axe en management, tandis que l'École de la chambre syndicale propose des formations centrées sur la création et le savoir-faire technique", précise Pascal Morand.

Un "cursus commun" ou "continuum" sera progressivement mis en place, promettent les porteurs de projet. "Nous devons faire du cycle trois ans un véritable Bachelor et combiner les quatrième et cinquième années pour avoir un cycle master", détaille Dominique Jacomet. Ce master "sera le fruit de notre nouvel ensemble, mais nous devons encore définir s'il sera ou non sous une marque commune à nos deux écoles".

Cette question devra être tranchée par le comité de pilotage, chargé de définir les modalités concrètes de cette alliance pour 2018. Parmi les points encore en discussion : le statut juridique, l'organisation, les contenus pédagogiques et l'immobilier. Les deux écoles ayant chacune un bail qui ne court encore que quelques années, le comité devra trancher : regrouper les formations sur un seul site ou conserver deux lieux distincts.

au sein de PSL, l'école geem paris dès la rentrée 2016

Un autre rapprochement stratégique est en cours, du côté de la Comue PSL (Paris Sciences et Lettres). L'école GEMM Paris (Grande École de mode et matière), fruit d'un partenariat entre l'Ensad (École nationale supérieure des arts décoratifs), l'école d'ingénieurs Mines ParisTech et l'université Paris-Dauphine ouvrira ses portes dès septembre 2016 pour une année de préfiguration.

Lors de cette phase de mise en route, la formation sera proposée à des étudiants déjà en cursus dans les trois entités. Puis, l'école recrutera au printemps 2017 sur concours des étudiants au niveau IV et V, pour une rentrée en septembre 2017. Pour l'instant, seule la marque "GEMM Paris" est déposée ; les statuts seront prochainement définis. 

D'une durée de deux ans au minimum, cette formation reposera "sur une logique de projets", sur lesquels devront travailler ensemble les élèves des trois écoles. "Elle alliera un trio regroupant un manager, un ingénieur, un créateur", résume Marc Partouche, le directeur de l'Ensad, à l'origine du projet.

"Il est important que nos étudiants rencontrent un certain nombre de personnes autour d'un projet pour les préparer à leur vie professionnelle future", souligne, du côté de Mines ParisTech, Julien Bohdanowicz, directeur d'études chargé du cycle Ingénieurs civils. Cette ouverture est jugée d'autant plus nécessaire que "dans le secteur de la création, il est très difficile d'imaginer en début de formation quel sera le métier exact exercé".

UN MOUVEMENT D'union "LATENT EN FRANCE"

En revanche, la dimension de cette nouvelle école n'est pas la même que pour l'IFM. Si l'Institut français de la mode met en avant la taille du futur ensemble, PSL,
quant à elle, mise sur de petits effectifs, notamment pour démarrer. "Nous commencerons avec des promotions de 20 étudiants pour des questions de débouchés. On ne va pas ajouter des centaines d'étudiants sur le marché du travail si nous ne sommes pas sûrs du prolongement professionnel", argumente Marc Partouche.

"L'idée n'est pas de créer une école de plus, mais un grand ensemble public sur le modèle de ce qui existe déjà à Londres, Anvers ou Bruxelles", poursuit le directeur de l'Ensad, qui vise pour GEMM Paris le recrutement de 40 % au minimum d'étudiants non-européens.

"Dans un premier temps, j'avais espéré créer une plate-forme encore plus large et contacté tous les acteurs du secteur, comme l'École Duperré, la Chambre syndicale, etc. Le projet suscitait un intérêt, mais cela semblait compliqué à réaliser rapidement", rappelle-t-il.

Pour Marc Partouche, ces rapprochements dans le secteur de la mode "sont une bonne chose" : "C'est un mouvement latent en France." Un point de vue partagé par Pascal Morand, qui y voit également "un enjeu économique" pour la filière française.

Laura Taillandier | Publié le