Élections régionales : que disent les candidats sur l’apprentissage ?

Catherine de Coppet Publié le
Élections régionales : que disent les candidats sur l’apprentissage ?
Les apprentis dans l'enseignement supérieur sont 110.000 sur 430.000 apprentis en France au total. // ©  Fotolia
Une grande majorité des candidats aux élections régionales n'ont pas de propositions suffisamment concrètes sur l'apprentissage, selon une enquête de l’Anaf (Association nationale des apprentis de France). Une question pourtant essentielle au vu des nouvelles compétences régionales.

"L'apprentissage est un sujet 'tarte à la crème', tous les candidats en parlent et souhaitent le renforcer, mais les aspects concrets sont souvent laissés aux techniciens !" C'est à partir de ce constat, dressé par Morgan Marietti, délégué général de l'Anaf (Association nationale des apprentis de France), que l'association a souhaité solliciter les candidats aux élections régionales sur des sujets précis pour permettre d'ouvrir le débat sur l'apprentissage dans la campagne.

Parmi les 30 candidats qui ont répondu aux questions de l'Anaf, huit candidats se détachent du lot par le sérieux de leurs réponses, selon le classement de l'association. On retrouve aux premières places Claude Bartolone (19), candidat PS en Île-de-France, suivi de Valérie Pécresse (18), candidate LR/UDI dans la même région, et Hervé Morin (18), candidat LR/UDI en Normandie.

La pédagogie négligée

Parmi les éléments mis en exergue par l'Anaf, la prise en compte par les candidats de la nécessité d'une "anticipation des besoins immédiats des entreprises et des apprentis". "Nous promouvons depuis longtemps la démarche proactive, qui consiste à aider le jeune et l'entreprise à identifier leurs exigences à court terme, afin que le formateur puisse réagir rapidement et éviter ainsi les ruptures de contrat. On se situe entre le tout économique et le tout pédagogique", précise Morgan Marietti.

Au sein des répondants à l'enquête, ils sont une poignée à proposer ainsi des contrats de progrès liés à cette proactivité (pour Claude Bartolone, Valérie Pécresse, Hervé Morin et Emmanuelle Cosse pour Les Écologistes en Île-de-France) ou encore la formation des formateurs à la proactivité (Claude Bartolone, Valérie Pécresse, Hervé Morin, et Xavier Bertrand, candidat LR/UDI en Nord-Pas-de-Calais-Picardie).

Les candidats ont tendance à ne définir l'apprentissage que comme une politique d'insertion et non comme un mode de pédagogie.
(Y. Cimbaro)

Pour l'Anaf, la majorité des candidats ne maîtrisent donc pas ces aspects pédagogiques liés à l'apprentissage, qui seraient au cœur pourtant du dispositif.

C'est également le constat porté par l'Anasup, réseau des CFA du supérieur : "Les candidats et les hommes politiques en général ont tendance à ne définir l'apprentissage que comme une politique d'insertion en faveur des publics défavorisés, et non comme un mode de pédagogie qui développe des compétences spécifiques, utiles à l'insertion", pointe Yves Cimbaro, le président de l'Anasup.

Des propositions parcellaires

Rejoignant le point de vue selon lequel l'apprentissage n'est pas abordé sur le fond dans la campagne, l'Anasup dénonce le manque de vision des candidats concernant l'apprentissage dans l'enseignement supérieur.

Représentant 110.000 apprentis sur 430.000 en France, l'enseignement supérieur est le parent pauvre des déclarations de campagne. "Dès qu'il faut promouvoir l'apprentissage dans le supérieur, les politiques sont inhibés", rappelle Yves Cimbaro.

De fait, les propositions des candidats sont très parcellaires, à l'instar de cette aide de 5.000 euros supplémentaires à toute entreprise de moins de 20 salariés qui embaucherait un apprenti de plus de 18 ans, proposée par Hervé Morin. "Comme toutes les mesures compensatoires sur le plan financier, il s'agit d'emplâtres sur une jambe de bois", déplore Yves Cimbaro.

Dès qu'il faut promouvoir l'apprentissage dans le supérieur, les politiques sont inhibés.
(Y. Cimbaro)

Autres mesures ciblées figurant dans les programmes, la lutte contre la discrimination des apprentis (Emmanuelle Cosse), ou encore la création d'une clause apprentissage dans les appels d'offres des marchés publics, proposée par Laurent Wauquiez (LR/UDI) pour la région Rhône-Alpes-Auvergne.

"C'est une piste intéressante, de même que ce qui est proposé pour alléger le système sur le plan administratif, par des partenariats entre les entreprises et les chambres consulaires pour la constitution des dossiers", détaille le président de l'Anasup.

Des questions en suspens

En attendant, beaucoup de questions restent en suspens, alors que les enjeux sont de taille pour les établissements. À commencer par la possibilité d'ouvrir de nouvelles formations en apprentissage grâce au soutien des Régions. "Nous ne sommes pas favorables à une répartition égale des financements entre pré-bac et supérieur, mais nous souhaitons qu'elle réponde aux besoins économiques de chaque bassin d'emploi", indique Yves Cimbaro.

Autre enjeu, celui de l'accès des formations en apprentissage : développement dans les filières SHS, accès à tous les niveaux, et pour tous.

Enfin, l'attente est forte sur l'utilisation de la fraction régionale dédiée à l'alternance dans la taxe d'apprentissage. "Il faut que ces 51% soit réellement dédié à l'apprentissage, et à rien d'autre", souligne Yves Cimbaro, l'Anasup plaidant pour une "sanctuarisation" vers l'apprentissage de cette enveloppe. Pas sûr qu'universités et écoles soient sur la même ligne.

Catherine de Coppet | Publié le