Entrée à l'université : des rangs clairsemés dans la rue, des établissements sous tension

Laura Taillandier Publié le
Entrée à l'université : des rangs clairsemés dans la rue, des établissements sous tension
À Paris, plusieurs universités étaient représentées dans le cortège comme Paris 1, Paris 7 ou Paris-Nanterre. // ©  Laura Taillandier
Quelque centaines d'étudiants sont venus grossir les rangs parisiens de la mobilisation des fonctionnaires et des cheminots, jeudi 22 mars 2018. Déterminés, ils s'inquiètent de la "fin de la compensation des notes" et dénoncent la "mise sous tutelle" de Toulouse 2. Malgré une faible mobilisation, la situation se tend dans les universités.

Des rangs clairsemés et éparpillés. Jeudi 22 mars 2018, quelques centaines d'étudiants et de lycéens sont venus faire entendre leur voix contre la réforme de l'entrée à l'université. Déterminés, les groupes d'élèves scandent leur opposition à la loi ORE (Orientation et réussite des étudiants), noyés dans ce cortège qui compte davantage de fonctionnaires.

"On a du mal à motiver les troupes"

Dans les rangs parisiens de la manifestation, malgré leurs convictions, les étudiants le reconnaissent : la mobilisation ne prend pas dans les établissements. "On a du mal à motiver les troupes… Les étudiants sont découragés. Ils ont l'impression que peu importe s'ils se bougent, l'État fera ce qu'il voudra", regrette Tiphanie, inscrite en licence de sciences sociales à l'université Paris-Descartes.

Une situation que peine à comprendre Elsa, en deuxième année de licence humanités à l'université de Paris-Nanterre, qui marche d'un pas décidé dans le cortège. "Cette semaine, j'en ai eu les larmes aux yeux. J'ai l'impression de ne pas être prise au sérieux. Si je viens dans la rue, ce n'est pas pour m'amuser, je préférerais travailler mes partiels, au chaud, chez moi." Avec conviction et énergie, l'étudiante dénonce la réforme qu'elle voit comme la mise en place d'une sélection. "C'est grave. Les attendus en licence, ce sont des critères sélectifs, fondés sur le patrimoine social des étudiants."

Des inquiétudes sur la compensation

Selon l'Unef, dans toute la France, ils étaient 25.000 étudiants comme Elsa à battre le pavé contre la réforme. Si la mise en place d'une sélection à l'entrée de l'université est dénoncée dans la majorité des slogans, d'autres revendications émergent, selon la présidente de l'organisation, Lilâ Le Bas, qui pointe notamment les discussions sur l'arrêté licence ouvertes par le ministère de l'Enseignement supérieur.

Dans le cortège, de nombreux étudiants s'inquiètent en effet d'une "disparition" des rattrapages et du système de compensation des notes comme Agatha, également inscrite à l'université Paris-Nanterre.

Toulouse 2 dans tous les esprits

Dans les rangs de la manifestation, les arguments contre la réforme s'affinent. Tandit que le ton se durcit. Chez les étudiants, la "mise sous tutelle" de Toulouse 2-Jean-Jaurès ne passe pas. Tous évoquent la décision du ministère de l'Enseignement supérieur de dissoudre les conseils centraux de l'établissement, qualifiée "d’extrêmement dure" et d'"anti-démocratique". "Il s'agit de répression. Nous soutenons les étudiants de l'université et on ne va pas lâcher", affirme, catégorique, Emma, en deuxième année de licence de mathématiques, à Paris-Diderot.

Les étudiants de l'université de Nanterre qui défilent font vite le parallèle avec le mouvement de Mai 68, en cette journée symbolique du 22 mars. "C'est une décision très dure. Et cela se passe à Toulouse, là où la mobilisation contre la réforme est la plus forte chez les étudiants", observe Elsa. "Tout le monde parle de Mai 68 et de Nanterre, mais c'est en ce moment que ça se passe, sous nos yeux. La mobilisation contre Parcoursup part aujourd'hui de Toulouse ou bien de Montpellier", poursuit l'étudiante, approuvée par ses camarades.

Le mouvement se tend dans les universités

Des propos qui résonnent particulièrement au lendemain de la manifestation, alors que la situation s'est tendue dans plusieurs universités du pays. À Toulouse 2 - Jean-Jaurès, une partie des étudiants et du personnel ont voté la reconduction du blocage du campus jusqu’à lundi 26 mars. À Strasbourg, le palais universitaire a été évacué en raison de l’occupation annoncée par des étudiants.

Du côté de l'université de Montpellier, la faculté de droit a été le théâtre d'une violente agression dans la nuit du jeudi 22 au vendredi 23 mars, alors que les locaux étaient occupés par des étudiants grévistes. La faculté reste fermée jusqu'au 26 mars, a annoncé l'établissement.

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