Un jeune sur cinq est officiellement au chômage. Comment est calculé ce chiffre ?
Le chômage des 15-25 ans est calculé à l’identique du chômage des autres catégories. Un calcul homogène dans tous les pays et certifié par le BIT (2). Ce taux est le résultat du ratio du nombre de chômeurs d’une classe d’âge sur la population active de cette même classe d’âge (addition de ceux et qui chôment et qui travaillent). Et sont chômeurs ceux qui répondent aux trois critères suivants : avoir travaillé moins d’une heure par semaine (quatre par mois), être à la recherche active d’un emploi à temps plein, être disponible immédiatement.
Cette méthode fonctionne bien pour les adultes, mais très mal pour les jeunes. Car les 15-25 ans sont pour les deux tiers sur les bancs du lycée ou de la fac. Ils étudient plus longtemps, mais ne recherchent pas un job à temps plein, qu’ils ne pourraient assumer. Du coup, ils ne sont pas comptés dans le dénominateur « population active ». Ce qui fausse le résultat final, donnant une idée alarmiste du chômage juvénile. Pour être correct, il faut lire : 21,6 % des jeunes qui ont quitté leur scolarité sont sans emploi.
Si le thermomètre n’est pas bon, pourquoi l’utiliser?
C’est comme si la société avait besoin de se faire peur. Un meilleur indicateur consiste à mettre en avant la part du chômage des jeunes. Soit le nombre des 15-25 sans emploi, rapporté aux effectifs globaux de leur classe d’âge, étudiants compris. Ce qui donne un taux à 8,2 %, meilleur que le chômage national (8,6 %). La France n’est dès lors plus la lanterne rouge de l’Europe (3).
En revanche, il y a deux spécificités bien françaises qui inquiètent. D’abord, les jeunes qui quittent leur scolarité mettent de trois à six mois pour trouver un poste. Une transition difficile qui rend quasi obligatoire la case chômage, ce qui n’est pas vrai des pays nordiques. En gros, sur 800 000 jeunes qui sortent tous les ans de notre système éducatif, cela fait 400 000 sans travail chaque année. Ce sont cinq points de chômage supplémentaires. Ensuite, ceux qui travaillent tôt sont souvent sortis prématurément de l’école, avec peu ou pas de qualification. Ce sont les premiers à subir les vagues de licenciements et à connaître des difficultés de reclassement.
Un même taux de chômage peut donc couvrir des réalités très différentes ?
Exactement. Il recouvre le chômage des débutants, sans véritable expérience, le chômage des précaires, ces jeunes qui alternent petits boulots et inactivité, et les jeunes actifs, tombés dans le chômage et qui peinent à en sortir. Ce qui rend difficile la mise en place de dispositifs efficaces d’aide à leur insertion, qui restent très sensibles à la conjoncture.
À l’OFCE, nous avons scruté les effets du contrat jeune en entreprise (CJE) lancé par François Fillon mi-2002 (4). Il a fait un flop. À cause de deux maladresses. Ciblé sur les moins de 23 ans sans le bac, ce CDI a créé un effet d’aubaine pour les employeurs, reportant le chômage sur les 23-25 ans. Ne diminuant pas la file d’attente, mais la court-circuitant. En outre, la croissance était inférieure à 1 %. Aujourd’hui, avec un taux supérieur à 2 %, ce type de mesure fonctionnerait sans doute mieux.
(1) Observatoire français des conjonctures économiques.
(2) Bureau international du travail.
(3) Selon Eurostat, la part de chômage des jeunes en 2005 en Europe était de 8,2 % pour la France, contre 8,1 % pour l’Italie, 7,9 % pour le Royaume-Uni, 7,7 % pour l’Allemagne et 9,21 % pour les 25 pays de l’UE. Voir aussi « Taux de chômage des jeunes, mode d’emploi », par Olivier Marchand, Revue de droit social n° 6, juin 2006, Dalloz.
(4) « Les petits moyens d’une grande priorité : l’emploi », Lettre de l’OFCE n° 250, 4 juin 2004.