Espagne : vers des frais d'inscription plus élevés et des cursus moins nombreux

De notre correspondant en Espagne, Armand Chauvel Publié le
José Ignacio Wert, le ministre espagnol de l’Éducation, engage  une réforme universitaire. Avec deux axes prioritaires : augmenter les droits d'inscription et réduire le nombre de cursus. En ligne de mire : l'austérité un plan global d'éconmie de 3 milliards d'euros. Des mesures qui dépendent beaucoup de leur application par les Régions.

L'augmentation des frais d'inscription à l'université est mis sur le devant de la scène par le gouvernement espagnol. Les étudiants paient actuellement entre 700 et 1.400 euros par an (autour de 1.000 euros en moyenne), soit entre 15 et 17% du coût de leurs études, « l’un des chiffres les plus bas de l’OCDE », selon le ministère de l'Education. Ces droits sont actualisés chaque année en fonction de la hausse des prix.  S'y ajoute une faible marge accordée aux 17 communautés Autonomes, les régions, compétentes en la matière.

Jusqu’à 540 euros de plus dès la rentrée 2012 pour s’inscrire à l’université

Un nouveau décret prévoit de flexibiliser ce système en permettant aux communautés de porter ces droits jusqu’à 25% du coût de l’année universitaire, voire 40% dans le cas des étudiants redoublant une année. Concrètement, les étudiants espagnols pourraient donc payer jusqu’à 540 euros de plus dès l’an prochain pour s’inscrire à l’université. Mais l’efficacité de cette mesure, qui s’inscrit dans un plan global d’économie de 3 milliards d’euros en éducation décidé par le gouvernement de Mariano Rajoy au pouvoir depuis fin 2011, dépendra de son application par les Communautés Autonomes (les 17 régions) qui détiennent les compétences en la matière.

Gouvernées par l’opposition socialiste, le Pays Basque et l’Andalousie ont déjà fait savoir leur refus ou conditionnent leur acceptation à un accroissement du budget consacré aux bourses. Ailleurs, la mesure est plutôt bien accueillie par les autorités régionales. « Cela permettra de pallier une situation de déficit tout en laissant une marge de manœuvre importante aux autonomies », estime, par exemple, Gonzalo Capellan, le titulaire du portefeuille de l’éducation de La Rioja.

Réduire le nombre de cursus

Deuxième axe du plan d'économies en cours : réduire significativement le nombre de cursus, qui s’élevait à 2.413 licences et 2.578 masters en 2011.

La dernière étude sur la question, menée en 2008-2009 par la CRUE, la Conférence des recteurs, fait état d’une offre excédentaire de licences de 13%, chiffre qui atteindrait 30% dans les sciences humaines et 20% dans les études techniques.

Selon le ministère de l’Éducation, 370 cursus réunissaient moins de 20 étudiants en 2011. C’est pourquoi José Ignacio Wert veut établir un «standard minimal d’efficacité» avec des cursus de 55 étudiants au moins. Selon le responsable des universités au sein du ministère, Amparo Camarero, l’offre excédentaire de diplômes, combinée au fort taux d’abandon en cours d’études, engendre une perte annuelle de 2,9 milliards d’euros. Pour Juan Hernandez Armenteros, professeur d’économie à l’université de Jaén, en Andalousie, rationaliser l’offre de diplômes permettrait d’économiser 500 millions d’euros par an, mais la mesure devrait être imposée par la loi, puisque là encore ce sont les communautés autonomes qui sont compétentes.

Une inflation des cursus due à la concurrence entre campus

Amorcée dans les années 1990, la concurrence entre les campus n’est pas étrangère à l’inflation de diplômes. Néanmoins, certaines communautés autonomes ont précédé les desiderata du ministre. Difficultés financières obligent. La Catalogne a ainsi supprimé 50 masters de moins de 10 élèves (sur 500). En Galice, les autorités exigent depuis peu un minimum de 45 à 50 étudiants par cursus ; si ce chiffre n’est pas atteint à la rentrée 2013, les universités auront trois ans pour capter plus d’élèves ou devront présenter un plan de restructuration.

Mais tous ne partagent pas cet avis. Arguant qu’il existe une demande pour ces formations, l’université d’Oviedo, dans les Asturies, a déjà fait savoir qu’elle ne supprimerait aucune de ses licences, dont 24 comptent moins de 55 élèves. La tâche sera donc complexe pour le comité d’experts que réunit en ce moment José Ignacio Wert afin d’élaborer sa réforme.

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