Frédérique Vidal entame le dialogue avec les grandes écoles

Cécile Peltier Publié le
Frédérique Vidal entame le dialogue avec les grandes écoles
Face aux directeurs et directrices de grandes écoles, Frédérique Vidal a affirmé être pour un dialogue "ouvert" et constructif. // ©  Nicolas Tavernier / R.E.A
Dans sa première intervention devant la CGE (Conférence des grandes écoles), la nouvelle ministre de l'Enseignement supérieur a délivré, mardi 20 juin 2017, un message d'ouverture et de "dialogue constructif" aux grandes écoles. Et a plaidé en faveur d'expérimentations locales en matière de politique de sites.

J'ai conscience que vous êtes une chance pour notre pays." À l'occasion de sa venue devant la CGE (Conférence des grandes écoles), ce mardi 20 juin 2017, à Paris, Frédérique Vidal a tenu à délivrer un message d'ouverture. Ayant rencontré quelques jours plus tôt les présidents d'université, la nouvelle ministre de l'Enseignement supérieur, de la Recherche et de l'Innovation continue sa tournée des institutions de l'enseignement supérieur.

"Je ne fais pas partie des personnes qui doutent du fait que vos écoles abritent de la belle recherche, d'autant qu'elle est souvent articulée avec celle des organismes de recherche et des laboratoires des universités qui vous entourent. Je ne doute pas non plus que vos écoles mettent en place une politique d'ouverture sociale", a-t-elle ajouté.

Une présence qui envoie un "signal extrêmement positif à la communauté des grandes écoles", a salué la présidente de la CGE, Anne-Lucie Wack. Cette dernière, réélue ce 20 juin à la tête de la CGE, avait rencontré la ministre il y a quelques jours, pour faire le point sur les dossiers qui préoccupent les grandes écoles. Une "discussion très amicale", "également empreinte d'une grande et très saine franchise", s'est réjouie la ministre.

Les étudiants au cœur des priorités

Il faut dire que les sujets de discussion ne manquent pas. Premier d'entre eux, "la réussite des étudiants". Un "enjeu essentiel", à une période "où la tentation du repli sur soi n'a jamais été aussi grande", a rappelé Frédérique Vidal. "Ce chantier va nécessiter d'être imaginatif, de faire bouger les lignes et d'inventer de nouvelles manières de construire des parcours, notamment en premier cycle, de manière à ce qu'ils irriguent ensuite le mieux possible vos écoles et les établissements qui ont en charge les deuxième et troisième cycles."

Autre dossier abordé lors de cette rencontre, l'ouverture au "monde socio-économique", dans une perspective d'insertion professionnelle. "Nous allons devoir nous mettre en ordre de marche pour former les gens tout au long de la vie [...] et être en mesure d'imaginer comment on peut en permanence entrer dans le supérieur et en sortir", a précisé la ministre. Et les grandes écoles, déjà actives en matière de relations entreprises ou de formation continue, peuvent, selon elle, constituer une source d'inspiration pour l'ensemble de l'enseignement supérieur.

En ce sens, Frédérique Vidal s'est dit notamment prête à soutenir les projets partenariaux : "Les financements ne proviennent pas uniquement du secteur public. Un grand nombre d'entreprises sont prêtes à s'impliquer, en matière de recherche, mais aussi de formation."

Politique de sites : des expérimentations locales

Ce pragmatisme vaut également pour des dossiers qui concernent la gouvernance des établissements, à l'image de la politique de sites. Sur le sujet, la ministre a affiché la volonté de revenir au travail de terrain : "Ces dernières années, nous avons fonctionné un peu à l'envers, en commençant par imaginer des coquilles législatives et en demandant aux acteurs de s'insérer dans ces coquilles. Je crois qu'il faut commencer par travailler sur des projets."

Et Frédérique Vidal de défendre la rencontre des acteurs au sein des écosystèmes. "Un projet se construit sur la base d'un diagnostic et d'ambitions partagés. Quand les deux éléments sont réunis, il est facile de concevoir les passerelles et les synergies entre les différents établissements, sans rien enlever aux marques portées par ces établissements", ajoute la ministre, qui s'est engagée à accompagner les sites dans la redéfinition de leurs projets.

Ces dernières années, nous avons fonctionné un peu à l'envers, en commençant par imaginer des coquilles législatives et en demandant aux acteurs de s'insérer dans ces coquilles.
(F. Vidal)

En parallèle, la Rue Descartes veut favoriser les expérimentations locales afin d'aboutir à des outils de gouvernance mieux adaptés à la diversité des projets. "Ils pourront être testés, puis pérennisés s'ils ont fait leurs preuves." Une annonce qui devrait être écoutée avec attention par certains regroupements, à l'image de Paris-Saclay. 

Interpellée sur les dysfonctionnements de la Comue, la ministre a défendu des "programmes de recherche [qui] marchent très bien" et "l'intérêt que des entreprises trouvent à ce projet". Le dossier, géré au plan interministériel, devrait toutefois être traité en priorité. "L'État a énormément investi dans ce projet et il est important de mettre l'ensemble des acteurs très prochainement autour de la table et de regarder a minima quelle est la part de diagnostic et d'ambition partagés", a reconnu la ministre. Un accord d'autant plus urgent à trouver que le dossier doit être réévalué cet automne par le jury international Idex.

"Le beurre, l'argent du beurre et le sourire de la crémière"

Partisane d'un dialogue "ouvert" et constructif, interrogée par un directeur d'école sur la possibilité pour les grandes écoles de délivrer des doctorats, la ministre a été claire : "Un diplôme d'État doit être délivré par un établissement dont les tarifs sont fixés par l'État, donc un établissement où on ne sélectionne pas. Si les écoles, après avoir sélectionné leurs étudiants et fixé leur prix de scolarité délivrent des diplômes d'État, il faut me dire quelle est la place des autres établissements de l'enseignement supérieur [...]. Je ne dis pas que rien ne va bouger, il va falloir trouver comment réarticuler tout cela, mais, comme on dit chez moi, on ne peut pas avoir le beurre, l'argent du beurre et le sourire de la crémière !"

Admission postbac : "On ne peut pas continuer comme ça"
Interrogée au sujet d'APB, Frédérique Vidal a indiqué chercher des solutions site par site pour gérer l'afflux de candidats. Elle a estimé avoir de "très bonnes probabilités de réussir" à éviter le tirage au sort dans trois des quatre filières en tension, à l'image de ce qui a été décidé pour les Paces d'Île-de-France. Le 9 juin 2017, le ministère a en effet annoncé que les 857 candidats n'ayant pas été tirés au sort à l'entrée de la Paces seraient bel et bien pris dans cette filière.

En revanche la filière Staps, avec deux fois plus de vœux que de places, reste à ce jour un vrai casse-tête. "Trouver des solutions pour assurer la prochaine rentrée ne suffira pas", a prévenu Frédérique Vidal, s'avouant préoccupée par le sort réservé à cette filière. "Cette situation permet encore une fois de montrer qu'on ne peut pas continuer comme cela, à tirer les étudiants au sort pour qu'ils rentrent dans le supérieur et à avoir seulement 40 % des étudiants qui réussissent leur licence en quatre ans !"

Nos blogueurs en parlent : APB : Mieux vaut être candidat à la PACES à Paris que candidat en STAPS en province..., par Didier Delignières
10.000 services civiques par an dans les grandes écoles
Développer le service civique parmi les élèves des grandes écoles : c’est l’objectif de la convention signée mardi 20 juin 2017 entre la CGE et l’Agence nationale du service civique. L’objectif est d’atteindre les 10.000 jeunes concernés par an. "Le service civique n’est pas un dispositif réservé aux jeunes en difficulté", a insisté Yannick Blanc, le nouveau haut commissaire à l’Engagement civique.

Les élèves des grandes écoles, futurs cadres du privé et du public, formés à la gestion de projet, constituent au contraire selon lui des candidats idéaux au dispositif. Et en particulier au service civique d’initiative, qui permet à de jeunes volontaires de proposer leurs propres projets à des organismes d’accueil.

Cécile Peltier | Publié le