Grand emprunt : les universités de sciences humaines se sentent défavorisées

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A l'heure de la compétition pour décrocher les fonds du Grand emprunt, les universités de sciences humaines et sociales font part, de plus en plus, de leur inquiétude. Certains appels d'offres favoriseraient de facto les sciences dures et les processus de fusion entre établissements seraient eux dictés par ces investissements d'avenirs. Tour d'horizon avec les réactions des présidents de Rennes 2, Bordeaux 3 et Montpellier 3.

Le manque de visibilité des SHS dans les investissements d'avenir, selon Marc Gontard, ancien président de l'université Rennes 2

L'ancien président de Rennes 2 estime qu'il y a un problème de taille concernant les investissements d'avenir : le manque de visibilité pour les SHS dans les appels d’offres.

"Nous ne sommes pas absents, mais disséminés dans les différents projets, comme complément aux sciences dures. Hormis un Equipex sur l’édition numérique et un Labex [Institut des Amériques]. La masse critique nécessaire et le dimensionnement des projets dépassent en effet largement les capacités des SHS. Par exemple, nos laboratoires sont beaucoup plus petits et n’ont pas besoin des infrastructures lourdes des labos de sciences dures, pour lesquels ont été créés les Equipex."

Lire son interview sur EducPros : Marc Gontard, ancien président : "L'université Rennes 2 est gouvernable avec beaucoup de patience et de concertation"

Les universités de "SHS" ne peuvent servir que de pompes à postes aux filières de sciences dures, selon Patrice Brun, président de l'université Bordeaux 3

Le président de Bordeaux 3 explique les raisons du refus de son établissement de participer à la fusion des universités bordealaises en un grand établissement unique.

"La mise place de ce grand établissement va se faire en fonction des investissements d’avenirs. Des projets d’excellence où les universités s’engagent évidemment à mettre des moyens, notamment humains. Or, comme 90% des projets déposés dans l’IDEX concernent les laboratoires de Bordeaux 1 et Bordeaux 2 [en sciences dures donc répondant davantage aux critères des appels à projets du grand emprunt], les universités de "SHS" ne peuvent servir que de pompes à postes aux filières de sciences dures. En effet, lorsqu’il s’agira de calibrer les futurs postes d’enseignants-chercheurs par exemple, ce sera en fonction des projets d’excellence. Avec à terme bien sûr, un impact sur la carte des formations.

Lire son interview sur EducPros.fr : Patrice Brun (président de l'université Bordeaux 3) : "En cas de fusion, le risque pour notre université de SHS est plus que grand, il est mécanique"

Le Grand emprunt rejette par construction les lettres, les langues, les arts et les sciences humaines et sociales, selon Anne Fraïsse, présidente de l'université Montpellier 3

La présidente de Montpellier 3 annonçait sa volonté de se retirer du projet d'Initiative d'excellence porté par le PRES montpelliérain en novembre 2010 ( un accord a finalement été trouvé). Ses raisons :

"Dans ses contours scientifiques, le grand emprunt prétend sélectionner l’excellence scientifique mais rejette par construction les lettres, les langues, les arts et les sciences humaines et sociales", écrit-elle.

"Le gouvernement décide aujourd’hui à travers l’Idex (Initiative d’excellence) de favoriser certaines disciplines jugées plus rentables à court terme au détriment des autres, ajoute-t-elle. L’Idex va à l’encontre de cette fusion équilibrée pour laquelle je me suis engagée. »

Lire notre article : L'université de Montpellier 3 n'ira - peut-être - pas au Grand emprunt
Lire aussi : Universités de Montpellier : la fusion attendra, pas le grand emprunt
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