HEC et l'école 42, l'alliance des contraires au profit de l’entrepreneuriat digital

Cécile Peltier Publié le
HEC et l'école 42, l'alliance des contraires au profit de l’entrepreneuriat digital
HEC et l'École 42 proposent une formation à la création de start-up à 120 étudiants. // ©  Denis Allard / R.E.A
L’annonce d’un partenariat autour de l'entrepreneuriat digital entre la rebelle École 42 et la prestigieuse HEC, récemment, a provoqué la surprise. Le mariage de la carpe et du lapin ? Non, la rencontre des "deux meilleurs de leur catégorie" au service de la création de start-up, rétorquent les intéressés. 

Pourquoi sa majesté HEC va-t-elle s’encanailler au côté de la rebelle École 42 ? Et quel intérêt, l’école de Xavier Niel, sans sélection classique sur titre à l'entrée, ni diplôme à la sortie, peut-elle bien trouver à s’afficher au côté du symbole de la grande école à la française ? Ils sont nombreux à s'être posés ces questions, lorsque, récemment, les deux établissements ont officialisé leur collaboration autour de l'entrepreneuriat digital.

La majeure "digitale, option entrepreneur" ouverte à la rentrée 2015, accueille des étudiants et jeunes diplômés issus non seulement de l'École 42 et d'HEC, mais aussi de l'université Paris-Saclay et d'établissements extérieurs. L’objectif ? Faciliter la création de start-up digitales en misant sur la complémentarité des profils : développeurs, managers, ingénieurs, designers...

Former les bonnes équipes

"La difficulté, aujourd'hui, en matière d’entrepreneuriat, n’est pas de trouver de l’argent, ni des structures d’accompagnement, mais de réussir à former les bonnes équipes, d’où le sens de notre projet", explique Julien Lévy, le directeur du centre digital d’HEC.

Il a poussé à une collaboration avec la toute jeune école : "C’était l’occasion rêvée pour les étudiants d’HEC qui voulaient monter leur entreprise de trouver des partenaires avec des compétences techniques. Et pour l'école, de montrer qu’elle n’était pas une vieille dame confite dans ses habitudes, mais une structure innovante, capable de prendre des risques."

Singulière, l'extraterrestre 42 n'en est pas moins ouverte au partage d'expériences : "L’innovation et l’envie d’entreprendre naissent de la rencontre de personnes venues d’horizons divers. Notre collaboration avec HEC est un peu la rencontre entre ce qui se fait de mieux, chacun dans sa catégorie", remarque Nicolas Sadirac, le directeur général de l'École 42, qui compte des partenariats avec des établissements aussi variés que l’Institut français de la mode, l’université de Paris-Ouest-Nanterre-la-Défense ou encore les Beaux-arts de Cergy. 

"Susciter des questions afin de générer une émulation globale”

L'année dernière, les deux partenaires ont expérimenté une formation à l'entrepreneuriat. Avant tout conçue pour répondre à des difficultés opérationnelles — celle des managers à intégrer la composante technique et celle des développeurs à penser business –, cette expérimentation s'est révélée fructueuse.

Les deux écoles ont choisi de transformer l'essai en se concentrant sur le lancement de start-up. Au menu de la spécialisation : une pincée de cours (design thinking, marketing, stratégie...) façon HEC, de la résolution de problèmes manière 42, le tout infusé de "learning by doing". "Le but de la formation est de créer des bases communes de dialogue et surtout de susciter des questions afin de générer une émulation globale", résume Nicolas Sadirac.

une série de challenges et de brainstorming

Si la spécialisation "digital entrepreneur" commence à proprement parler en janvier 2016, de septembre à décembre, les partenaires ont organisé une première phase de networking, qui a réuni un peu plus de 120 étudiants :  une cinquantaine d'élèves de la majeure digitale d'HEC, une quinzaine d'élèves de Télécom Paris et une soixantaine de développeurs de 42.  L'idée ? Faciliter le mélange des talents et la circulation d'idées à travers une série de challenges et de brainstorming devant permettre aux étudiants de se constituer en équipes multidisciplinaires. 

Une dimension qui pèsera fin décembre dans la sélection des projets susceptibles de passer à la seconde phase "d'accélération" par un jury composé d'enseignants et de professionnels. Parmi les candidats : les 120 qui ont participé à la première phase du programme, mais aussi une quinzaine d'étudiants de la majeure Entrepreneur d'HEC, une vingtaine d'étudiants de Paris-Saclay, plus tous les membres des équipes issus d'autres établissements. "Selon la qualité des projets, nous devrions retenir entre 20 et 30 équipes, soit 70 à 100 étudiants, mais nous serons exigeants", insiste Julien Lévy

De janvier à mars, épaulés par des coachs et une palette d'experts, les entrepreneurs en herbe apprendront à développer et à pitcher leur projet. En ligne de mire : la présentation des start-up en mars 2016 devant un parterre de business angels, responsables de fonds d'amorçage et d'accélérateurs à Paris et Londres. À la fin de ces neuf semaines, toutes les équipes devront être capables de se lancer, soit en démarrant leur activité, soit en levant des fonds, soit en intégrant un programme d'incubation. 
 
une mixité détonante

Pas toujours évidents de prime abord, les contacts entre les bébés nageurs de 42 et les HEC rompus à la conceptualisation, se sont révélés "détonants". Adrien Salamon (HEC 2015) et cofondateur de la start-up Balibart qui a participé à la phase test du programme, confirme : "On a des façons de penser et d'aborder l'entrepreneuriat très différentes. Au début, c'est déstabilisant, mais au final, extrêmement enrichissant."

À une condition, insiste Nicolas Sadirac : que tous les membres de l'équipe acceptent de s'impliquer dans la totalité du processus créatif, et pas seulement sur leur spécialité. "Le développeur doit participer au business plan, le manager au design. Il se pose en perturbateur, c'est ce qui permet de remettre en cause les automatismes, d'être plus créatif et plus disruptif." 

Bienvenue aux ingénieurs
La majeure "digitale, option entrepreneur" proposée par HEC et 42 vient d’être élargie aux étudiants et aux jeunes diplômés de l’Université Paris-Saclay (Polytechnique, CentraleSupélec, AgroParisTech….). Un moyen de répondre au manque de compétences en management des ingénieurs voulant se lancer dans la création d’entreprises.

Les participants bénéficieront d’une mise à niveau (stratégie, marketing et finance) sur le campus d’HEC, avant de rejoindre leurs camarades au sein du programme d’accélération à l'École 42. Paris-Saclay, qui finance la formation, sanctionnée par le certificat d'Entrepreneuriat Digital, vise pour commencer une vingtaine d’étudiants.

Cécile Peltier | Publié le