Indiscret. Saclay : ambiance électrique entre le CNRS et Polytechnique

Céline Authemayou Publié le
Indiscret. Saclay : ambiance électrique entre le CNRS et Polytechnique
Le CNRS n'aurait pas été concerté sur la définition de la politique de recherche de Polytechnique, alors que la moitié des personnels travaillant au centre de recherche de l'École dépendent de l'organisme de recherche. // ©  Polytechnique
Dans un mail envoyé le 30 décembre 2015 aux directeurs des UMR hébergées par l’École polytechnique, le président du CNRS remet en question la poursuite du partenariat CNRS-X. Une situation tendue, symptomatique de l’ambiance qui règne sur le plateau de Saclay.

Une crise chasse l'autre. Après la séquence de tensions extrêmes à l'automne 2015, l'Université Paris-Saclay est loin d'avoir épuisé les sources de discorde entre ses membres, comme le montre le mail envoyé par du président du CNRS aux directeurs d'UMR (unité mixte de recherche) hébergées par l'École polytechnique le 30 décembre 2015 et que s'est procuré EducPros.

Alain Fuchs brandit la menace de la remise en cause de l'implication de l'organisme de recherche dans ces laboratoires communs avec l'X. La "poursuite du partenariat sous la forme des unités mixtes de recherche" est "clairement en question", prévient-il. 

La cause de ce courroux : l'absence de concertation avec le CNRS dans la définition de la politique de recherche de Polytechnique, alors que les chercheurs de l'organisme représentent la moitié des effectifs. Les grandes lignes de la nouvelle réforme de Polytechnique ont été présentées le 15 décembre 2015 par Jean-Yves Le Drian.

"Aucune des affirmations, propositions ou commandes concernant la stratégie de recherche de l'X n'ont été discutées en amont avec le CNRS", dénonce-t-il.

Plusieurs mois de désaccords

Cet épisode fait suite à plusieurs mois de désaccords entre les deux institutions. En juin 2015, le rapport Attali évoque déjà "l'une des faiblesses majeures de l'X", à savoir la répartition des personnels de recherche.

Sur les 900 personnes travaillant au centre de recherche de l'école, une moitié dépend du seul CNRS, note le texte. Et les auteurs de plaider en faveur d'un basculement de personnels du CNRS vers un statut de personnels de l'X, sur la base du volontariat.

"Cette proposition a été sagement remisée au placard, rappelle Alain Fuchs dans son mail, mais le simple fait de l'avoir envisagée en dit long sur l'état d'esprit qui a régné ces derniers mois autour du projet de l'École polytechnique."

Le président du CNRS, qui n'a pas souhaité commenter ce mail auprès d'EducPros, doit rencontrer le 7 janvier 2016 le président de l'X, Jacques Biot. "J’espère que cette rencontre permettra de commencer à clarifier nos relations. Je viendrai ensuite vous rencontrer pour faire le point avec vous sur l’avenir de ce partenariat", écrit-il aux directeurs de labos.

Du côté de l'École polytechnique, on assure être serein et confiant sur la durabilité des relations avec l'organisme de recherche.

Le "pôle d'excellence" toujours à l'ordre du jour

Le 7 janvier se tiendra un autre rendez-vous important pour l'avenir de Saclay : la première réunion de travail dédiée au futur "pôle d'excellence". D'autres sont prévues régulièrement au cours des prochaines semaines, pour aboutir à la feuille de route demandée par les ministères de tutelle pour la mi-mars 2016.

Ce projet de regroupement d'écoles d'ingénieurs, en parallèle de Saclay, évoqué et souhaité par Emmanuel Macron le 15 décembre 2015, est donc toujours à l'ordre du jour, malgré son absence remarquée au sein du dossier d'Idex, remis au jury le 22 décembre 2015.

Un motif de discorde qui demeure, particulièrement entre les universités et l'X. "Ce pôle d'excellence ne fait pas consensus auprès de nos 18 membres", reconnaissait sobrement Gilles Bloch, président de l'Université Paris-Saclay, le 22 décembre 2015. "Si des écoles veulent former un pôle d’excellence à part, elles sortent de l’Idex", prévenait même Jacques Bittoun, président de l'université Paris-Sud.

Le climat général sur le plateau est donc loin d'être au beau fixe. "Le combat mené pour arriver à un consensus le 22 décembre a été gagné, reconnaît un proche du dossier. Mais à quel prix ? Personne ne veut plus se parler. Dans un tel contexte, on ne voit pas trop comment les gens vont pouvoir collaborer sereinement..." Et convaincre le jury international de l'Idex, attendu sur le site de Saclay au printemps.

Céline Authemayou | Publié le