Adecco ouvre de nouvelles voies de l'alternance

Étienne Gless Publié le
Adecco ouvre de nouvelles voies de l'alternance
Christophe Catoir, président d'Adecco France, veut former 10.000 personnes en trois ans dans son "école de l'alternance". // ©  Adecco
Ouverture d'une "école de l'alternance" en février 2016 pour former 10.000 jeunes en trois ans, lancement de "l'école dans l'entreprise" avec l'EM Lyon, partenariat avec Microsoft pour les métiers du numérique... Adecco expérimente de nouvelles formes d'alternance. Christophe Catoir, son président, explique pourquoi.

En février 2016, les premières promotions de votre école de l'alternance vont être recrutées. Vous affichez l'ambition de former 10.000 alternants en trois ans. Quel but poursuivez-vous avec la création de cette "école" ?

Nous voulons répondre à la demande de compétences dans des métiers en pénurie de candidats, soit parce que ces métiers ne sont pas assez attractifs, soit qu'on ne forme assez de personnes en formation initiale sur ces métiers. Nous en avons ciblé une vingtaine, comme ceux du digital, où la formation initiale ne permet pas de trouver le nombre de personnes attendues par le marché. Dans l'enseignement supérieur, notre but est de faciliter l'accès à des écoles pour des étudiants brillants dont les parents ne sont pas CSP+.

C'est aussi le sens du dispositif que vous mettez en place avec l'EM Lyon pour des élèves de 2e et 3e année du programme grande école ?

Oui, l'ambition est faire sauter le verrou social. Dans les grandes écoles de commerce, la diversité est trop peu présente. Les frais de scolarité ont fortement augmenté ces dernières années, et, du côté des établissements, la récente réforme de la taxe d'apprentissage rend plus difficile le développement de l'alternance dans le supérieur.

Avec "l'école dans l'entreprise", les étudiants de l'EM Lyon vont signer un CDI intérimaire avec le groupe Adecco, qui se charge de les placer dans des entreprises partenaires. Les étudiants alternent, pendant deux ans, quatre semaines en entreprises et une semaine à l'EM Lyon.

Ils sont payés à 100% du SMIC lorsqu’ils sont en entreprise, 80% pendant leurs périodes sur le campus et ne financent que la moitié de leurs frais de scolarité
. Ce CDI couvrira à la fois leurs deux années pour l'obtention de leur diplôme ainsi que deux années après leurs études.

Pour les entreprises qui hésitent à investir 25.000 euros en formation [soit le montant des frais de scolarité de deux années du programme grande école], c'est l'assurance que les jeunes diplômés commenceront leur carrière chez eux. En effet, le contrat contient une clause de dédit-formation : s'ils quittent l'entreprise, ils devront assumer eux-mêmes le financement de leurs études. Et pour l'EM Lyon, c'est un moyen de développer son ouverture sociale : le coût des études n'est plus un frein pour intégrer une grande école. 

Une vingtaine d'étudiants vont bénéficier du dispositif début 2016. À partir de la rentrée 2016-2017, il concernera 200 étudiants.

Dans l'enseignement supérieur, notre but est de faciliter l'accès à des écoles pour des étudiants brillants dont les parents ne sont pas CSP+

Autre initiative : les métiers en pénurie de compétences. En quoi consiste votre initiative avec Microsoft, annoncée en décembre 2015 ?

Dans le numérique, deux métiers sont en forte tension : celui d'administrateur réseaux et systèmes et de développeur d'applications mobiles. Nous voulons former 800 alternants en trois ans. Adecco se chargera du recrutement des candidats, Microsoft de la certification des alternants : des jeunes en recherche d'emploi, mais aussi des salariés dont les compétences sont devenues obsolètes. Ils suivront un cycle qualifiant court, de 6 à 12 mois, opérationnel et adapté aux besoins des entreprises de services numériques. Il est prévu aussi un cycle long diplômant, de 12 à 24 mois, offrant une expertise poussée et un diplôme délivré par des écoles d’ingénieurs de référence.

Le grand pari, c'est que ceux qui vont décrocher une qualification professionnelle dans ces métiers deviendront les futurs cadres des entreprises. C'est le début d'une filière du numérique, permettant de répondre à une pénurie que les entreprises ont créé toutes seules en cherchant uniquement des bacs + 5.

Pour expérimenter ces nouvelles voies, qu'êtes-vous allé chercher dans le modèle suisse, dont Adecco est pour partie originaire ?

En Suisse, comme en Allemagne, il existe des filières métiers complètes dont le mode d'enseignement prioritaire et principal repose sur l'alternance. En Suisse, 80% des personnes passent par l'alternance pour se former. En Allemagne, une alternance dure en moyenne trois ans contre 14 à 16 mois en moyenne en France. Nous n’avons pas, en France, de cadre légal pour qu’une alternance dure trois ans, du coup nous sommes sur des morceaux de formation ou de qualification. C'est moins complet !

De nouvelles mesures en faveur de l'alternance
Le président de la République, François Hollande, se rendra au CESE (Conseil économique, social et environnemental), le 18 janvier 2016, pour prononcer ses vœux aux forces économiques et sociales. Il devrait y annoncer des mesures pour relancer l'apprentissage.

 

Étienne Gless | Publié le