Geneviève Fioraso : un non-remplacement qui inquiète

Camille Stromboni Publié le
Geneviève Fioraso : un non-remplacement qui inquiète
Ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche - 21, rue Descartes // ©  Camille Stromboni
Cela fait plus d’un mois que Geneviève Fioraso n’a pas été remplacée à l’Enseignement supérieur et à la Recherche. Une vacance ministérielle qui inquiète la communauté universitaire.

À la mi-avril 2015, soit plus d’un mois après le départ de Geneviève Fioraso pour raisons de santé, le secrétariat d'État à l’Enseignement supérieur et à la Recherche reste vacant. Le portefeuille reste entre les mains de la ministre de l'Éducation nationale, Najat Vallaud-Belkacem.

"Passer d’une ministre à une secrétaire d’État, puis plus rien… C’est d’abord symbolique : cela n’augure pas d’un grand intérêt pour l’enseignement supérieur et la recherche de la part du gouvernement. La jeunesse était pourtant promise comme sa priorité, et l’ESR devait être sanctuarisé, ce qui est fortement battu en brèche", résume Hervé Christofol, nouveau secrétaire général du Snesup.

"Si l’expérience internationale montre que l’excellence d’un système d’enseignement supérieur et de recherche n’est pas forcément liée à l’existence d’un ministère sur ce secteur, dans notre pays à forte tradition publique et jacobine, le fait qu’il ne soit pas incarné n’est pas neutre, confirme Philippe Jamet, à la tête de la CGE (Conférence des grandes écoles). Le laisser en suspens n’est pas bien perçu et laisse penser que les pouvoirs publics y accordent une moindre priorité. On ne peut pas comprendre qu’il y ait un secrétariat au Tourisme et pas pour l’ESR !"

Les dossiers en stand-by

Un impact symbolique auquel s’ajoute un sentiment d’immobilisme. "Tout n’est pas imputable à cette absence mais nous constatons que de nombreux dossiers sont en stand-by, estime le secrétaire général du Snesup. L’affectation des dotations des universités que nous attendons depuis quatre mois, c’est du jamais-vu ! Même les réunions sur l'agenda social n’ont toujours pas démarré entre syndicats et ministères."

En attente également plusieurs mesures d’application de la loi ESR : le dévoilement de la Stranes (Stratégie nationale de l’enseignement supérieur) ou encore la mise en route du HCERES (Haut Conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur) et de ses structures dirigeantes.

Il n'y a plus de pilote dans l'avion.
(L. Carraro)

Un handicap pour défendre le budget

Mais c’est la question du budget qui inquiète le plus, avec le prélèvement de 100 millions d’euros qui plane sur les universités et les écoles d’ingénieurs. "Compte tenu des enjeux actuels, il est essentiel d’avoir un ministre qui défende l’enseignement supérieur et la recherche", souligne François Cansell, président de la Cdefi (Conférence des directeurs des écoles françaises d’ingénieurs). "Aujourd'hui, nous n'avons plus d'interlocuteur, nous naviguons complètement à vue ! Lorsqu'il y a de vrais arbitrages à effectuer, ce n'est pas le cabinet qui peut s'en charger. Il n'y a plus de pilote dans l'avion", alerte Laurent Carraro, à la tête d'Arts et métiers ParisTech, établissement qui était visé, initialement, par la ponction.

Au risque de voir Bercy "prendre la main sur la politique de l’enseignement supérieur, selon des critères purement comptables", pointe Pierre Mathiot, directeur de Sciences po Lille.

Une question d'autant plus cruciale que les négociations entre ministères sur le budget 2016 vont débuter courant mai.

Camille Stromboni | Publié le