Les écoles de commerce face à l'explosion des budgets et des coûts

Jean-Claude Lewandowski Publié le
Le cabinet Xerfi-Précepta publie une étude approfondie sur les business schools françaises et leur stratégie. Un travail qui souligne les risques de la course à la croissance et à l'excellence pratiquée par les établissements.

Quelle stratégie pour les écoles françaises de commerce ? Quel modèle de développement ? Xerfi-Précepta, spécialiste des études économiques sectorielles, vient de publier un rapport très complet (190 pages) sur ce sujet. Un document assez critique, accompagné d'"études de cas" portant sur une quinzaine d'établissements. Le titre annonce d'ailleurs clairement la couleur : "De la bulle économique à la réinvention du business model".

Ce travail se présente comme la réactualisation d'une précédente étude, réalisée en 2009 sur le même thème. Il intervient à un moment charnière, où les signaux d'alerte se multiplient pour les écoles : inflation des coûts, remise en cause des ressources traditionnelles, apparition de nouveaux concurrents…

Pour Xerfi, la plupart des écoles de l'Hexagone sont engagées dans des stratégies de croissance à la fois coûteuses et risquées, liées notamment à l'internationalisation, aux accréditations et aux classements – même si cette démarche a aussi constitué pour elles un facteur important de progrès. Celle-ci les pousse en effet à augmenter fortement leurs frais de scolarité et leurs effectifs d'étudiants, en particulier en élargissant sans cesse leur offre de formation (MBA, bachelors, MS et MSc, formation continue...). L'étude évoque même une "spirale infernale", liée à l'explosion des budgets et à l'envolée des coûts salariaux.

C'est dans ce contexte que Xerfi situe la vague actuelle de fusions entre écoles. Les auteurs s'interrogent sur la pertinence de ces opérations, dans la mesure où elles contribuent à alimenter encore la croissance, sans vraie redéfinition du modèle.

L'étude se montre également très réservée sur la "course à l'excellence" pratiquée "à l'unisson" par les écoles. "Une hérésie", tranche Xerfi, alors que "seule une infime minorité" peut légitimement se prévaloir de cette excellence. Et de plaider, a contrario, pour une stratégie de spécialisation et de niches, qui permettrait en particulier aux "petites" écoles de s'appuyer en priorité sur "leurs spécificités géographiques, sectorielles ou pédagogiques".

La course à l'excellence, une hérésie selon les consultants de Xerfi

Les nombreux facteurs de l'envolée des coûts

De façon générale, l'étude touche juste sur bien des points. Par exemple, lorsqu'elle souligne le manque de singularité et de différenciation des écoles, pour la plupart appliquées à reproduire le même modèle. De même, l'étude énumère à juste titre les multiples facteurs de la hausse spectaculaire des coûts : recrutement d'enseignants-chercheurs de renom (impliquant salaires élevés, primes et horaires allégés), ouverture de campus à l'international, offre de nouveaux services…

Enfin, une place importante est accordée au phénomène des MOOC, susceptible de "remettre en cause l'enseignement traditionnel". "Les écoles vont devoir investir massivement pour réduire leurs coûts", estiment les auteurs.

Bref, "le modèle de développement des écoles est à redéfinir", conclut Xerfi, notamment parce qu'il apparaît "déconnecté des fondamentaux économiques".

Reste que le principal intérêt de cette étude est ailleurs : elle apporte à la fois une synthèse claire des enjeux et un regard extérieur, celui du consultant, sur les différentes options stratégiques qui s'offrent aux écoles. Une mise en perspective salutaire, dans cette période où les écoles réfléchissent à leur avenir.

Jean-Claude Lewandowski | Publié le