L’université de Strasbourg veut améliorer les conditions de travail de ses personnels

De notre correspondant dans l’Est, Philippe Bohlinger Publié le
Valérie Pécresse doit se rendre ce jeudi 16 septembre à Strasbourg pour participer notamment à une table ronde sur la fusion et l'autonomie de l'université. Premier établissement de France à fusionner, l’université de Strasbourg est également la première à connaître les maux inhérents à une superstructure rassemblant 42.300 étudiants et 4.700 personnels permanents . Consciente de ces difficultés, la direction de l’université a lancé en décembre 2009 une étude sur la prévention du risque psychosocial à l’UdS . Ses résultats ont été présentés cet été lors d'un CHS (comité d’hygiène et de sécurité).

Quels sont les bienfaits et les risques d’une fusion pour les personnels ? L’union des trois universités strasbourgeoises en janvier 2009 a entraîné des regroupements de services et des modifications des conditions de travail. Les syndicats ont été les premiers à se mobiliser sur cette question, notamment au travers de questionnaires diffusés à la rentrée 2009 par le SES-CGT et le SGEN-CFDT. Ce dernier avait alors identifié une “surcharge de travail pour les BIATOS [bibliothécaires, ingénieurs, administratifs, techniciens, ouvriers, de service]”. Véronique Auzet du SneSUP déplore également “un éloignement de la direction administrative des enseignants-chercheurs” consécutif à la fusion. Éric Fries, du SGEN-CFDT, souligne quant à lui des difficultés liées à l’arrivée de nouveaux logiciels de gestion “qui n’ont pas été accompagnés de formations”.

Seul médecin du travail à l’UdS, le deuxième poste restant non pourvu faute de candidats, Catherine Vives énumère les difficultés rencontrées par certains agents – augmentation de la charge de travail, sentiment de désorganisation, changement de lieu de travail, de collègues, etc. – tout en évoquant la notion de résistance au changement. De son côté, Jean Déroche, directeur général des services de l’UdS, reconnaît que “la LRU a alourdi la charge de travail des personnels”, mais estime que “le processus de fusion n’a pas massivement créé de situations de difficulté”. L’étude sur les risques psychosociaux à l’UdS, lancée début 2010, s’inscrit dans le cadre de l’accord “Santé et sécurité au travail dans la fonction publique” ratifié en novembre 2009 par le gouvernement et sept organisations syndicales.

Réorganisation et résistance au changement

Confiée au LCP (laboratoire de psychologie des cognitions) , une composante de l’UdS, sur le modèle des études menées chez France Télécom et Renault, cette initiative a été saluée par les syndicats. Les investigations ont été conduites entre mai et juin en deux temps : Tout d’abord, 500 à 600 personnels ont participé à des entretiens collectifs destinés à “favoriser une expression totalement libre et ouverte”, détaille Didier Raffin, professeur de psychologie du travail et coordonnateur de l’étude. Ils ont également contribué à élaborer le questionnaire envoyé à 4.700 agents. Enfin, le LPC a mis en place une adresse mail destinée à recueillir des témoignages et répondre aux situations d’urgence. Ainsi, 22 entretiens ont été réalisés par une cellule d’écoute entre janvier et avril.

Globalement les BIATOS se sont davantage impliqués dans la démarche (64 % des 1.084 questionnaires ont été jugés exploitables). Les résultats montrent qu’un agent sur cinq se dit beaucoup, voire énormément stressé. Étonnamment, si les BIATOS déclarent avoir subi davantage de changements, notamment dans les services centraux, ce sont les enseignants-chercheurs qui ressentiraient davantage de stress. Un résultat qui pourrait s’expliquer, selon l’enquête, par une latitude décisionnelle trop importante provocant un manque de repères.

Les BIATOS en première ligne

Selon les composantes, le stress lié aux changements et aux difficultés organisationnelles demeurerait moins important chez les agents de l’ex-ULP (sciences, technologies et santé) que chez les agents des ex-UMB (lettres, langues, sciences humaines) et ex-URS (droit et gestion), ainsi que de l’IUFM. Une différence qui repose principalement sur les déclarations des enseignants-chercheurs plus nombreux dans les composantes “sciences/technologie” (un pour 10 étudiants) que dans les composantes “sciences humaines/langues” (un pour 20) et “droit/gestion” (un pour 33). À noter : les BIATOS des différentes composantes ont bénéficié de la signature, en juin, d’un protocole d’accord entre l’intersyndicale et la direction permettant une harmonisation de leurs primes au niveau le plus favorable.

Des pistes pour améliorer les conditions de travail à l'université

Les auteurs de l’étude “Prévention des risques psychosociaux à l’UdS” proposent plusieurs pistes d’actions, parmi lesquelles la création d’un comité de pilotage “santé au travail” indépendant et paritaire émanant du CHS. Ils préconisent également la définition d’indicateurs de santé au travail et de seuils d’alerte. Surtout, les chercheurs proposent la création d’une charte UdS visant une meilleure définition des tâches reposant sur une analyse ergonomique de chaque poste. Les auteurs invitent également à maintenir  l'adresse mail mise en place par le LPC et la cellule d’écoute, ainsi qu’à la création d’un poste de psychologue du travail.

De notre correspondant dans l’Est, Philippe Bohlinger | Publié le