Ma thèse en BD : 11 doctorants de l’université de Lorraine planchent à l’écrit

Natacha Lefauconnier Publié le
Ma thèse en BD : 11 doctorants de l’université de Lorraine planchent à l’écrit
Marie-Claudine Haumont-Sautereau, finaliste de l'université de Lorraine au concours MT180, a étudié la souffrance au travail des dirigeants de PME. // ©  Peb&Fox/Université de Lorraine
En parallèle du concours Ma thèse en 180 secondes, les 11 finalistes de l'université de Lorraine ont conçu une bande dessinée, avec l'aide d'un dessinateur et d'un scénariste. Une façon, pour l'établissement, de faire connaître les travaux de ses jeunes chercheurs auprès de nouveaux publics.

Des planches de la scène à celles de la bande dessinée, il n'y a qu'un pas... que les 11 finalistes lorrains du concours Ma thèse en 180 secondes ont franchi sans hésiter. Lancé en 2016 par l’université de Lorraine, le projet Ma thèse en BD a enthousiasmé les participants. Accompagnés d'un scénariste et d'un dessinateur professionnels, ils ont relevé le défi d’expliquer leur sujet de thèse en trois planches, sur un mode humoristique. Résultat : une bande dessinée de 54 pages, accessible gratuitement à un large public.

Valoriser les doctorants sur le long terme

“C’est une façon de valoriser les doctorants sur le long terme”, argue Nicolas Beck, responsable du service culture scientifique de l’université de Lorraine, à l’initiative du projet. "On trouve des centaines de vidéos MT180 en ligne depuis le début du concours en France, en 2014. Il y a là un côté éphémère, souligne-t-il. A contrario, la bande dessinée permet de pérenniser le travail des jeunes chercheurs, tout en élargissant le public, aux lycéens, notamment. L’album pourra ainsi être consulté en bibliothèque."

Pour Marie-Claudine Haumont-Sautereau, qui a remporté la finale régionale de Lorraine le 23 mars 2017 devant les dix autres candidats, ce fut une expérience "très intéressante". Son sujet de thèse ? "Plaisir et souffrance au travail et risques de burn-out. Étude clinique et analyse différentielle entre hommes et femmes menées auprès de dirigeants de petites et moyennes entreprises."

"Nous avons eu au préalable une longue conversation avec Peb, le scénariste de la BD, témoigne la lauréate lorraine. Il a une grande curiosité intellectuelle, c’était un plaisir de lui parler de mon travail et de répondre à ses questions. Il était primordial qu’il comprenne bien ma démarche scientifique et mes objectifs."

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Vulgariser la recherche scientifique avec humour

Si le scénariste avait récupéré en amont le texte de la prestation orale de MT180, impossible de le transposer directement en bande dessinée. "Le texte est adapté pour la scène, explique Peb. J’ai repris le fil conducteur, mais il faut que je creuse et que je vérifie que je fais les bonnes analogies. La bande dessinée fige la prestation des doctorants dans le temps : si on ne comprend pas d'emblée, on peut s'arrêter sur une case, relire la page. La BD est complémentaire de l'exposé oral."

Après ce premier échange, plusieurs allers-retours ont été nécessaires afin d'améliorer la formulation ou d’ajuster certains éléments. Au dessin : Fox, avec qui Peb forme un duo sur d’autres projets depuis plusieurs années. Les auteurs ont été choisis après un appel à candidatures lancé par l’université.

"Le talent de Peb est d’avoir su capter les points vraiment importants, apprécie Marie-Claudine Haumont-Sautereau. Et il avait la partie la plus difficile : ajouter une dose d’humour !" L’un des objectifs est, en effet, d’attirer les jeunes publics vers la recherche de façon ludique. "En trois planches, on a déjà un aperçu du contenu d’un travail de recherche, estime la finaliste lorraine. Même si, en tant que chercheur, on a exactement la même frustration qu’en présentant notre thèse en trois minutes !"

La difficulté varie d'une discipline à l'autre. "En chimie, on visualise les atomes comme des billes, c'est assez facile à manipuler en narration comme en images, explique Peb. Dans d'autres disciplines, il faut proposer une vulgarisation complètement différente de celle choisie pour l'oral."

Diffuser le projet au-delà du public universitaire

Le scénariste a pris grand plaisir à travailler avec les onze finalistes régionaux : "Ces chercheurs sont 'tout frais', ils ne sont pas blasés par le monde de la recherche. Ils étaient enthousiastes à l'idée d'être dans une BD et se sont montrés très disponibles." Le dessinateur Fox et lui-même ont voté pour l'un des candidats, "mais notre vote est secret !", précise Peb.

Les doctorants ne sont pas les seuls à être satisfaits de l'opération. L’université de Lorraine aussi a apprécié ce moyen de mettre en avant ses étudiants, ses chercheurs et ses formations. "On retrouve ces doctorants dans d'autres projets, reconnaît Nicolas Beck. Ils sont volontaires pour aller au contact du public, par exemple pour la Fête de la science. Avec Ma thèse en BD, ils ont un outil déjà prêt pour présenter leurs recherches." 

Le coût du projet ? "C'est un budget de 12.000 euros, pour 1.500 exemplaires imprimés, et l'université a bénéficié de subventions de partenaires privés, détaille le responsable du service culture scientifique de l'université. Cela comprend la conception, les droits d'auteur et l'impression papier. Mais nous avons aussi une version numérique qui nous permet de diffuser plus largement le projet au-delà du public universitaire." Plusieurs expositions des planches sont programmées, des locaux universitaires jusqu'à un salon littéraire à Épinal. 

L'initiative fera peut-être boule de neige dans d'autres établissements. En attendant, Marie-Claudine Haumont-Sautereau montera sur les planches, les vraies, mercredi 14 juin 2017 à la Maison de la radio, pour la finale de MT180.

Natacha Lefauconnier | Publié le