Primaire à droite : l'autonomie des universités déclinée sous toutes les coutures

Aurore Abdoul-Maninroudine Publié le
Primaire à droite : l'autonomie des universités déclinée sous toutes les coutures
Pendant le premier débat de la primaire de la droite et du centre, le 14 octobre 2016, les sept participants n'ont pas débattu de l'éducation ou de l'enseignement supérieur. // ©  TF1/Capture d'écran
Alors que les électeurs de droite s'apprêtent à aller voter à la primaire, dimanche 20 novembre, le mot d'ordre des sept candidats est à la mise en place de l'acte II de l'autonomie des universités. À quelques différences près.

Si les candidats à la primaire de droite ne placent pas tout à fait le curseur au même endroit en matière d'autonomie des universités, tous sont d'accord sur au moins un point : il faut passer à la vitesse supérieure, et, après la loi relative aux libertés et responsabilités des universités, votée pendant le quinquennat de Nicolas Sarkozy, mettre en place l'acte II de l'autonomie.

Sélection, montant des droits d'inscription, recrutement des enseignants-chercheurs... En cas de victoire du candidat des Républicains à l'élection présidentielle, l'emprise de l'État sur les universités se réduirait à peau de chagrin. Enfin, si l'on en croit les programmes, car malgré deux débats télévisés de trois heures chacun entre les sept candidats à la primaire, rien n'a été dit sur le sujet. Si quinze minutes ont été consacrées à l'éducation, l'enseignement supérieur n'a même pas été évoqué.

ENTRE sélection ET orientation directive dès la licence 

Première évidence pour les candidats à la primaire : autonomie rime avec sélection. "Le mot doit être prononcé sans provoquer les réactions éruptives habituelles", écrit Nicolas Sarkozy dans son livre-programme "Tout pour ma France". Il entend laisser les universités libres de fixer leurs critères de sélection à l'entrée de leurs cursus. À elles de choisir l'année de sélection et le processus. Les autres candidats à la primaire y sont également favorables, dès l'entrée à l'université. Seuls Alain Juppé et Bruno Le Maire se montrent plus nuancés.

L'ancien Premier ministre, favori de la primaire, estime que "ce n'est pas tant l'absence de sélection qui est source d'échec que l'absence d'orientation." Il prône ainsi une "orientation plus directive". Le lycéen n'aurait pas accès "à n'importe quelle filière à l'université mais se verrait proposer une formation adaptée à ses compétences et à ses goûts."

Même son de cloche du côté de Bruno Le Maire : dans son pavé programmatique de 1.000 pages, l'ancien ministre de l'Agriculture veut "mieux informer les étudiants des conditions attendues pour l'entrée en licence" : "La question de l'entrée à l'université ne se résoudra pas par des solutions de sélection drastiques."

François Fillon, qui connaît une progression importante dans les intentions de vote, selon de récents sondages, propose quant à lui de "repenser l'organisation du bac" : "Avec des épreuves au choix, les universités feront connaître pour leurs différents parcours de licence, les épreuves qu'elles recommandent de choisir."

Droits d'inscription : Juppé plus régulateur que Sarkozy

Autre déclinaison d'une autonomie accrue, la liberté pour les établissements de fixer les frais d'inscription. "L'acte II de l'autonomie suppose de diversifier les sources de financements", écrit Bruno Le Maire, quand Nathalie Kosciusko-Morizet souligne qu'augmenter les droits de scolarité à 1.000 euros par an rapporterait 800 millions d'euros. En contrepartie, la candidate souhaiterait néanmoins instaurer un quota de 30 % de boursiers dans les universités.

Sans surprise, sur ce sujet également, Alain Juppé se montre plus nuancé que Nicolas Sarkozy. Quand le second plaide en faveur d'une totale liberté des universités, le premier souhaite préserver la licence de toute hausse des frais d'inscription et fixer un plafond en master et en doctorat. François Fillon est également sur cette ligne régulatrice – en licence, les droits de scolarité pourraient cependant atteindre 500 euros – tandis que Bruno Le Maire propose que ces frais respectent "un plafond annuel fixé au niveau national" et qu'ils soient "modulés" en fonction des revenus des parents.

De manière plus générale, tant Alain Juppé que François Fillon ou Bruno Le Maire regrettent le manque de financements privés au sein des universités françaises. "Alors que la France consacre 1,5 % de son PIB à l'enseignement supérieur, dont 1,4 % de dépenses publiques", rappelle le premier. En comparaison, les États-Unis consacrent 2,7 % de leur PIB à l'enseignement supérieur mais 1,4 % provient de fonds publics. Bruno Le Maire estime qu'une solution serait de laisser aux Comue et autres regroupements "la liberté de créer leurs propres fondations."

Des universités libres de leur recrutement ?

En matière de recrutement, Jean-François Copé et François Fillon veulent aller au bout de la logique d'autonomie, en permettant aux universités de recruter leurs enseignants, fonctionnaires et contractuels selon leurs propres critères. François Fillon prévoit néanmoins un contrôle d’une autorité indépendante, "pourquoi pas le Haut conseil de l’évaluation". Pour Bruno Le Maire, à terme, l'allocation des emplois et des moyens devra se faire au niveau des regroupements.

Sur les outils de la réforme enfin, alors qu'Alain Juppé privilégie "l'approfondissement de l'autonomie sur la base de l'expérimentation", l'ancien président de la République envisage, lui, de légiférer.

Quid du voile à l'université ?
 
Malgré les diverses polémiques suscitées l'an dernier, Nicolas Sarkozy est le seul à aborder la question du voile dans son livre, lui qui prône l'interdiction du port de signes religieux à l'université. Les six autres candidats n'en disent pas un mot dans leurs programmes respectifs, même si Alain Juppé a affirmé à plusieurs reprises dans les médias qu'il s'opposait à une telle interdiction.

Aurore Abdoul-Maninroudine | Publié le