Sam Network, la start-up de l'après-Mooc

Sophie Blitman Publié le
Sam Network, la start-up de l'après-Mooc
Lancée fin 2014, la plateforme Sam Network retravaille des vidéos diffusées sur le web pour les rendre plus accessibles et pédagogiques. // ©  DR
Plutôt que produire des contenus pédagogiques en ligne, pourquoi ne pas exploiter les vidéos existantes en les retravaillant pour les rendre plus accessibles ? C'est le pari de la start-up Sam Network, qui a développé une plateforme web et noué un premier partenariat avec Sciences po. Une nouvelle venue dans le monde des EdTech françaises.

Le discours de Patrick Modiano lors de la remise de son prix Nobel, une conférence de Lacan en 1972 sur les fondamentaux de la psychanalyse ou une autre, plus récente, d'Emmanuel Todd sur la crise de la démocratie contemporaine… Autant de vidéos qui, pour être intéressantes, ne sont souvent pas adaptées à un visionnage web : trop longues, trop compliquées, en un mot trop indigestes. D'où l'idée de présenter ces contenus sous forme de séquences, avec des annotations ou des liens vers des documents annexes. C'est ce que propose depuis fin 2014 Sam Network, une plateforme développée par Karim Amellal, maître de conférences à Sciences po, et Maxime Marzin, directeur de l'incubateur de l'institut. "Notre objectif est de redonner de la visibilité et de la valeur à tous ces trésors non exploités en les rendant plus accessibles", explique le premier.

Concrètement, des vidéos d'une à trois heures sont découpées en une quinzaine de chapitres de quelques minutes, chacun d'entre eux étant indexé de manière à être aisément retrouvé par le biais du moteur de recherche. "L'idée est que l'utilisateur ne perde pas trois heures à trouver le passage spécifique qui l'intéresse, et n'ouvre pas dix fenêtres à la fois pour avoir des précisions ou des compléments", insiste Karim Amellal.

"archives vivantes"

Pour faciliter la compréhension, une fiche synthétique résume le contenu de l'intervention, tandis que des ressources complémentaires s'affichent sur le côté pendant le visionnage, pour faire ressortir une citation, donner une explication ou une référence bibliographique, apporter un autre éclairage sur le sujet… Une fonctionnalité qui intègre une dimension collaborative puisque tous les utilisateurs peuvent proposer leurs contributions, celles-ci étant examinées et validées par les "curateurs" qui ont travaillé sur la vidéo.

Étudiants de Sciences po, doctorants ou enseignants, ils sont une quinzaine à collaborer au projet, en plus des cinq développeurs informatiques, tous sous le statut d'auto-entrepreneur. Seul le directeur technique a été recruté par la start-up. Lancée en 2010, celle-ci s'est concentrée au départ sur la production de vidéos. Une tentative peu concluante à l'issue de laquelle émerge le concept actuel, autour des "living archives". Prenant ses distances avec la Moocmania, Sam Network entend valoriser les contenus existants plutôt qu'en concevoir de nouveaux.

En 2012, le prototype de la plateforme actuelle voit le jour. Opérationnelle depuis novembre 2014, Sam Network rassemble aujourd'hui "30.000 à 40.000 chapitres", d'après les fondateurs, soit quelque 2.000 vidéos, essentiellement en sciences sociales et en majorité hébergées sur YouTube, la plateforme se chargeant simplement d'en rediffuser le contenu.

Notre objectif est de redonner de la visibilité et de la valeur à tous ces trésors non exploités en les rendant plus accessibles.
(K. Amellal)

Un premier partenariat avec Sciences po

Une convention avec Sciences po a été signée, fin mars 2015, afin de "décider conjointement quelles archives mettre en ligne et publier plus systématiquement, sur une chaîne dédiée, les colloques et événements" organisés par la rue Saint-Guillaume, détaille Karim Amellal. Et d'évoquer des discussions en cours pour nouer des partenariats avec d'autres établissements, notamment en sciences dures, sans que cela implique de participation financière de ces derniers.

Outre des levées de fonds, Sam Network tire ses ressources des prestations techniques pour les entreprises : la création de plateformes similaires, mais de moindre envergure et en marque blanche, sur lesquelles les sociétés peuvent déposer leurs vidéos. Une activité que Karim Amellal souhaite néanmoins abandonner progressivement, comptant sur une levée de fonds beaucoup plus conséquente dans les mois à venir. Objectif affiché : 3 à 5 millions d'euros.

À terme, poursuit-il, "on imagine un système freemium, dans lequel l'accès aux contenus [vidéos et enrichissements, chapitrage, moteur de recherche] resterait gratuit, tandis que seraient développées des fonctionnalités payantes spécifiques, comme le stockage ou la prise de notes automatique". Un modèle économique pas si éloigné, quant à lui, de celui des Mooc.

Sophie Blitman | Publié le