Serge Paugam : "Michel Prigent était un éditeur avec un grand sens de la pédagogie"

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Michel Prigent, président du directoire des Presses Universitaires de France (PUF), est décédé le 19 mai 2011 à Paris, à l'âge de 60 ans. Serge Paugam, sociologue à l’EHESS et directeur de la collection «Le lien social » aux PUF lui rend hommage.

« Michel Prigent était un homme brillant et nous sommes nombreux à lui devoir beaucoup. C’est aux PUF que j’ai publié mon premier ouvrage en 1991, il s’agissait de ma thèse de doctorat. Depuis 20 ans, c’est mon principal éditeur. Michel Prigent a toujours soutenu mes projets. En 1996, il m’a proposé de créer une nouvelle collection, le lien social,  en me laissant une grande liberté d’initiatives. C’était une personne qui faisait confiance à qui avait envie de se lancer, et cela, alors même que nous n’avions pas les mêmes références idéologiques. Il voyait l’intérêt des grands débats de société. Il a d’ailleurs publié aux PUF les ouvrages qui couvrent tout le champ disciplinaire des sciences humaines et a joué un grand rôle dans une recherche de cohésion au sein de la communauté scientifique.

On lui doit la publication des oeuvres complètes de Freud ou la réédition des écrits de Bergson, qui sont des textes parfois très difficiles. Il avait un fort souci de pédagogie. Par exemple, il m’a demandé de rédiger de façon pédagogique les préfaces de deux ouvrages consacrés à Durkheim, pour aider le lecteur à s’y retrouver. Et dernièrement, il a appuyé le lancement d’une nouvelle revue « Sociologie », que j’ai lancée en 2010.  Dans le climat actuel, créer une nouvelle revue académique était un pari osé et pas gagné d’avance.

Comme éditeur, il voulait partir des travaux universitaires et les présenter de façon à être lu par un public plus large que celui des pairs. Cela signifie un travail d’accompagnement des auteurs dans un travail de réécriture partielle de leurs travaux pour être plus compréhensibles.

C’est enfin sous son impulsion, qu’en 1999 les PUF sont passées du statut de  coopérative à celui de société anonyme. C’était un coup de génie de dire que, pour résister au risque d’absorption par un grand groupe, les auteurs et directeurs de collections soient réunis comme actionnaires au sein d’une société anonyme. L’appel de fonds lancé à la fin des années 90 a été suivi très largement par les auteurs et directeurs de collection. Depuis la situation financière des PUF s’est rétablie et la société dégage même des bénéfices ce qui est assez exceptionnel dans le monde de l’édition aujourd’hui. »

Michel Prigent, agrégé de lettres classiques et spécialiste de Corneille

Normalien, agrégé de lettres classiques, docteur ès Lettres, Michel Prigent était entré aux Puf en 1974 où il effectua toute sa carrière professionnelle, d’abord comme attaché de direction, puis comme directeur éditorial, enfin, depuis 1994, comme président du directoire.

Michel Prigent fut également président du groupe des Éditeurs de Sciences humaines et sociales au Syndicat national de l’Édition de 1984 à 1990 et administrateur du Cercle de la Librairie. Il a publié Le héros et l’État dans les tragédies de Pierre Corneille (Puf,  4ème éd. 2009) et a dirigé l’Histoire de la France littéraire (Puf, 2006).

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