Thierry Paul : "Nous redoutons l'étape du tri des dossiers"

Laura Taillandier Publié le
Thierry Paul : "Nous redoutons l'étape du tri des dossiers"
L'université d'Aix-Marseille proposera des parcours adaptés différents selon ses facultés. // ©  Camille Stromboni
Après les réflexions menées sur les attendus et les parcours adaptés, l'université d'Aix-Marseille ouvre "l'étape redoutée" des modalités de tri des candidatures. Le point sur la mise en œuvre du Plan étudiants avec Thierry Paul, le vice-président formation de l'AMU.

Où en est la mise en place de la réforme dans votre université ?

Nous avons voté les capacités d'accueil à la mi-janvier et nous nous apprêtons à faire de même avec les attendus. Nous devons composer avec un calendrier très inhabituel. Les votes ont lieu a posteriori : les attendus ont déjà été rentrés dans Parcoursup et nous n'avons plus la possibilité de les modifier. Cela demande donc un travail constant d'échanges avec les élus étudiants et nous impose d'être assez ouverts dans nos choix.

Thierry Paul, vice-président formation de l'université d'Aix-Marseille
Thierry Paul, vice-président formation de l'université d'Aix-Marseille © amu

Nous sommes restés sur les attendus nationaux, qui sont bien faits. En ce qui concerne les critères d'analyse, nous avons également choisi de conserver des éléments assez généraux. C'était la démarche qui nous semblait la plus adaptée. Nous n'avons pas eu le temps matériel de réfléchir finement pour chaque filière. Peut-être que l'année prochaine, le cas échéant, nous les peaufinerons...

Quels critères d'analyse des candidatures avez-vous retenus ?

Nous sommes restés ouverts sur tous les types de bac même si en sciences, nous précisons que, sans surprise, le bac le plus adapté est le bac S. Les données prises en compte sont assez classiques, comme les notes aux épreuves anticipées. Notre prochain chantier est de nous organiser pour définir les modalités de tri des dossiers. C'est une étape que nous redoutons... Nous allons recevoir des milliers de dossiers que nous devrons classer, contrairement aux années précédentes. Ce n'est pas un algorithme qui s'en chargera...

On parle justement du développement d'algorithmes locaux dans les universités. De quoi s'agit-il ?

Dans certains cas, un traitement automatique nous permettra d'effectuer un pré-classement. Mais il faudra bien lire l'ensemble des appréciations des dossiers pour les trier. Au final, le classement sera fait par les enseignants. Nous sommes novices en la matière. Nous n'avons jamais eu à nous en charger. Nous sommes donc bien loin de réfléchir à d'éventuels algorithmes...

L'importance du classement des dossiers dépendra des places disponibles. Comment vos capacités d’accueil évolueront-elles à la rentrée ?

Elles augmentent de manière globale. Nous nous sommes calés a minima sur les inscriptions administratives des années précédentes. Nous avons ainsi augmenté le nombre de places en arts, lettres, langues et sciences sociales, là où les travaux dirigés ne faisaient pas encore le plein. Pour 28 élèves ou 35, il y a toujours un chargé de cours, ce qui ne demande pas de moyens supplémentaires quand la salle est assez grande.

En revanche, nous avons demandé des moyens supplémentaires pour cinq filières (Staps, psychologie, droit, éco-gestion et japonais), tant en postes enseignants qu'en heures supplémentaires. Mais nous n'avons pas encore eu de retours officiels.

Que proposerez-vous aux étudiants dans le cadre des parcours adaptés ?

Avant même la réforme, nous avions réfléchi en faculté des sciences à deux dispositifs de remédiation. Le premier, PES (Préparation aux études scientifiques) est une licence en quatre ans pour les bacheliers S en difficulté potentielle. Le second, AMNS, est une année de mise à niveau scientifique, ouverte aux bacheliers littéraires, technologiques ou ES. Il s'agit d'une formation propédeutique, en amont de la licence, qui permet aux étudiants de rattraper leur retard.

Pour les autres facultés, nous nous baserons sur ces dispositifs pour présenter un pack en trois volets complémentaires. Nous proposerons aux étudiants d'effectuer une première année en deux ans. Ils suivront également des modules transversaux, afin de combler leurs lacunes dans les disciplines essentielles de la filière, ainsi que sur le plan de la méthodologie universitaire. Enfin, ils seront épaulés par des tuteurs, en master ou en doctorat.

Nous observerons comment les étudiants s'en sortent avant de leur proposer des parcours de remédiation deux ou trois mois après la rentrée.

Ces dispositifs seront-ils identiques dans toutes les formations ?

Certaines facultés ne se sentaient pas en mesure de bien distinguer les "oui" des "oui, si". Cette difficulté a été soulignée en lettres et sciences humaines : les enseignants considèrent qu'ils ne disposent pas d'indicateurs prédictifs fiables. Nous accueillerons tous les étudiants en fonction de nos capacités d'accueil, puis nous observerons comment ils s'en sortent avant de proposer à certains des parcours de remédiation deux ou trois mois après la rentrée.

Cet accompagnement fait partie du rôle du directeur d'études. Comment avez-vous pensé cette fonction au sein de votre établissement ?

La nomination des directeurs d'étude est proposée par le ministère de l'Enseignement supérieur par grand domaine, mais une liberté d'appréciation est laissée aux établissements. Au sein d'Aix-Marseille université, cette organisation ne nous semblait pas adaptée, au vu du nombre considérable des étudiants à suivre. Nous répartirons cet accompagnement par composante. Le nombre de directeurs d'études dépendra des moyens dont nous disposerons. Nous n'avons pas encore concrètement réfléchi à l'organisation. Nous avançons progressivement.

Un élément d'incertitude pèse par ailleurs sur le contenu du futur arrêté licence, qui devrait modifier les modalités de gestion des mentions. C'est important pour que nous puissions, au niveau local, définir les modalités de contrôle des connaissances. Nous recevons les informations sur la réforme au fil de l'eau et nous nous adaptons. Il fallait avancer très vite sur les attendus, il nous reste encore beaucoup de chantiers. Nous trouverons les solutions à nos difficultés d'ici au mois de juin.

Laura Taillandier | Publié le