Transformation numérique : écoles et universités en mode agile

Céline Authemayou - Mis à jour le
Transformation numérique : écoles et universités en mode agile
Durant trois mois, les acteurs de l'enseignement supérieur se sont succédé dans les ateliers co-organisés par le CNNum et la Dgesip. // ©  CNNum
De septembre à décembre 2016, le CNNum et la Dgesip ont organisé des ateliers de codesign dédiés à la transformation numérique de l’enseignement supérieur. Les réflexions issues de ces travaux vont être intégrées au référentiel conçu par le CNNum et remis à Thierry Mandon ce 14 décembre 2016.

Les tas de Post-it sont disposés sur les tables, les feutres, prêts à noircir les grandes feuilles blanches. Par groupes d'une dizaine de personnes, présidents d'université, vice-présidents et personnels administratifs s'apprêtent à dresser le portrait rêvé de leur établissement à l'horizon 2050. "Projetez-vous, libérez-vous de toute contrainte pour imaginer le futur", incite François Germinet, président de l'université de Cergy-Pontoise et président du comité numérique de la CPU (Conférence des présidents d'université).

Ce matin du 8 décembre 2016, une trentaine de représentants des universités françaises sont invités par le CNNum (Conseil national du numérique) et la Dgesip à réfléchir à la transformation numérique de leurs établissements. Cet atelier de codesign est le huitième du genre, et le dernier de la série.

En novembre 2015, Thierry Mandon avait saisi l'institution publique pour réfléchir à l'évolution numérique du système universitaire français. Après plusieurs mois de travaux, pilotés par Sophie Pène, vice-présidente du CNNum et directrice du master EdTech au CRI (Centre de recherches interdisciplinaires), le Conseil a rendu son avis en mai 2016, qu'il a accompagné d'une première version d'un référentiel d'actions, pensé comme une "aide de départ" à la transformation au cœur des établissements. Une version 0 "imparfaite", qui a le mérite de poser les cadres du dialogue. "Au sein du CNNum, nous sommes souvent tombés sur les questions d'éducation, au cours de nos divers travaux, explique Sophie Pène. Si la société veut un numérique choisi, une prise en charge des défis du XXIe siècle, c'est au cœur des universités qu'il faut travailler."

"Il faut pérenniser les budgets"

Après la Dgesip début octobre, la Cdefi ou encore la CGE (Conférence des grandes écoles) en novembre, c'est donc au tour de la CPU de se pencher sur ce référentiel, qui doit être présenté au secrétaire d'État le 14 décembre 2016, à l'occasion de l'annonce des lauréats de l'appel à projets Dune. Le document, qui prend la forme d'un simple tableau, répertorie les actions à mener en plusieurs thématiques : gouvernance numérique, transformation pédagogique, lieux d'apprentissage, transformation par la recherche, système d'information et tiers secteurs. Les propositions oscillent entre idées très générales ("développer une stratégie de visibilité et de réputation à travers les réseaux sociaux", par exemple) et suggestions plus précises ("production de contenus pédagogiques sous licences Creative Commons et standards ouverts").

Le référentiel peut aider nos gouvernances à éclairer le sujet et à montrer toute sa transversalité.
(Y. Condemine) 

Durant la matinée d'ateliers, les représentants des établissements sont appelés à se prononcer sur les actions retenues, leur cohérence, leur intérêt. Grâce à ce retour de terrain très concret, le CNNum va pouvoir faire évoluer la version 0 du référentiel, pour la rendre plus en prise avec la réalité. Et les idées, comme les remarques, ne manquent pas. "Fonder la transformation numérique de nos établissements sur les seuls appels à projets ne peut pas suffire, lancent plusieurs participants. Il faut une impulsion forte au niveau national, sous peine de créer des clivages entre universités."

"Y'en a marre ! poursuit un autre. Il faut pérenniser les budgets et ne pas mettre en concurrence les établissements." Dans la salle, pourtant, plusieurs ont répondu à l'appel à projets Dune, lancé en septembre 2016, qui vise à financer quatre à cinq projets "ambitieux et innovants de transformation numérique".

"Le numérique doit être transversal"

Le référentiel, qui sera accessible à tous sur Internet avec la possibilité pour tous les internautes de l'enrichir, devrait permettre aux responsables numériques de mieux se faire entendre au sein de leurs établissements. C'est en tout cas l'un des objectifs visés. "Le document peut aider nos gouvernances à éclairer le sujet et à montrer toute sa transversalité, argumente Yves Condemine, vice-président en charge du numérique de l'université Lyon 3 et adhérent à l'association VP-num. Très impliqué dans l'évolution de son établissement, ce dernier plaide pour que le terme "numérique" ne soit pas utilisé seul. "On doit parler de pédagogie numérique, d'infrastructure numérique, etc. Et on voit alors très vite que ce sujet concerne tous les acteurs de l'enseignement supérieur."

Autour des tables, tous les participants partagent l'avis du vice-président lyonnais : s'il y a bien un terme qui est prononcé dans tous les échanges de la matinée, c'est celui de "transversalité". Pédagogie, accueil des étudiants, nouveaux lieux... Le numérique infuse tous les pans de l'université. "À l'image du développement durable, le numérique est une manière d'aborder la question de la transition sociétale, analyse François Germinet. On peut espérer que ce référentiel posera un cadre d'actions pour intégrer le sujet dans la stratégie des établissements." Et le président de l'université de Cergy-Pontoise d'appeler de ses vœux une intégration du numérique au sein même du schéma directeur des établissements. "Le sujet sera d'autant plus important qu'on ne le verra plus, qu'il deviendra transparent."

Dune : 5 projets soutenus durant 2 à 3 ans
Le 14 décembre 2016, Thierry Mandon et Louis Schweitzer, commissaire général à l'investissement, ont annoncé les lauréats retenus dans le cadre de l'appel à projets DUNE (développement d’universités numériques expérimentales).

EOLE (Université de Strasbourg), SIDES 3.0 (Université Francophone des Sciences de la Santé et du Sport), New Teach (université de Tours), EPHEMER (Institut Catholique de Lille) et DESIR (université Rennes 2) sont les cinq dossiers retenus sur les 24 déposés depuis le lancement de l'appel à projets en octobre 2016.

Ils se partagent une enveloppe globale de 8 millions d'euros, alloués sur deux à trois ans.

Céline Authemayou | - Mis à jour le