Budget 2008 : déception de la communauté universitaire, malgré la hausse des crédits

Grégory Danel Publié le
En l’absence d’une loi de programmation pour accompagner la loi votée cet été sur les libertés et responsabilités des universités, le budget 2008 de l’Enseignement supérieur et de la Recherche était particulièrement attendu. Annoncé comme un budget sans création de poste, il faisait craindre aux présidents d’université une mise en oeuvre « délicate » de la loi. Rendu public le 26 septembre, le projet de budget de la Mires (1) prévoit une augmentation de 7,8 % par rapport à 2007, soit 1,8 milliard d’euros supplémentaires (sur un total de 24,909 milliards d’euros). « Un effort historique » pour Valérie Pécresse, insuffisant pour les étudiants, enseignants-chercheurs et présidents d’université.

De Sauvons la recherche à l’Unef, tous le dénoncent : une part non négligeable des hausses de crédits est liée à l’élargissement du crédit impôt recherche (CIR). Bien que son efficacité réelle sur le développement de la R&D soit régulièrement mise en doute, 1,289 milliard d’euros (+ 390 millions) lui sera destiné en 2008. En tout, sur le 1,8 milliard supplémentaire affecté à la Mires , 455 millions concernent des dépenses fiscales (environ 25 % du total). Il faut y ajouter 85 millions d’euros qui reviendront aux établissements d’enseignement supérieur grâce à l’exonération de la taxe sur les salaires.

Si la dépense fiscale est, pour la ministre, un « outil parmi d’autres » pour augmenter son budget en 2008, il faudra en trouver d’autres dans les prochains budgets si le gouvernement veut poursuivre jusqu’en 2012 « l’effort historique » pour le supérieur et la recherche.

Pas de nouveaux emplois, mais des mesures catégorielles. Pour le Snesup-FSU, la traduction budgétaire des mesures de loi sur les universités est « très en deçà des besoins ». Le syndicat d’enseignants-chercheurs critique plus particulièrement le refus de création de tout emploi public statutaire. Du côté du ministère, on entend privilégier le « qualitatif » pour expliquer ce choix. Traduction : 6,2 millions seront consacrés au renforcement de l’encadrement pour faire face aux nouveaux défis de l’autonomie. 700 emplois de catégories C et B seront transformés en catégorie A.

Selon les calculs de la ministre, chaque université pourra disposer de sept à dix emplois de catégorie A ou faire le choix « d’externaliser » ces postes. 12,9 autres millions seront imputés à des améliorations de carrière au bénéfice des personnels.

La recherche privée, grande gagnante

Avec l’estampille « budget prioritaire pour 2008 », la Mires accorde 381 millions d’euros pour accompagner l’autonomie des universités. Un effort financier « significatif »pour la Conférence des présidents d’université (CPU), mais qui « n’est pas à la hauteur des enjeux ». Elle rappelle l’exigence de voir des moyens supplémentaires dégagés pour la maintenance, l’entretien courant et la gestion des bâtiments. De toute évidence, les présidents d’université estiment alors que les 45 nouveaux millions promis sont insuffisants. Ceux-ci seront cependant rassurés par les annonces de François Fillon, qui au coeur du mouvement anti-LRU, promettra 15 milliards d'euros d'augmentations cumulées pour le budget de l'enseignement supérieur d'ici la fin du quinquennat.

Au total, pour l'année 2008 et pour aider à la transmission du patrimoine immobilier, 329 millions sont abondés au budget. Sur cette somme, 77 millions seront dédiés à la construction et au premier équipement immobilier des universités. 207 millions devront être attribués aux grands travaux. À elle seule, la poursuite de la rénovation du campus de Jussieu devrait engloutir environ 100 millions d’euros. 

La recherche privée, grande gagnante. Le Snesup et Sauvons la Recherche estiment que le PLF 2008 ne propose qu’une « très modeste évolution des moyens de recherche publique ». En effet, si le volet « recherche » du budget est en hausse de 880 millions d’euros, c’est avant tout la recherche privée qui devrait en bénéficier. Grâce au CIR, mais aussi aux 60 millions supplémentaires dédiés au financement d’Oséo (ex-BDPME et Anvar), et à une enveloppe d’environ 50 millions d’euros pour la recherche industrielle.

Du côté de la recherche publique, 5 millions d’euros supplémentaires seront destinés à transformer 90 % des 12 000 allocataires de recherche en moniteurs à l’université ou en entreprise. L’ANR (2), qui au passage est intégrée à la Mires, bénéficiera de 130 millions supplémentaires.

Réunie en Cneser, le 17 décembre dernier, la communauté universitaire votera contre ce budget par 37 voix "contre", 10 "pour" et 3 "abstentions".

 
(1) Mission enseignement supérieur et recherche.
(2) Agence nationale de la recherche.

Grégory Danel | Publié le