Produits dérivés : les écoles d'ingénieurs prennent leurs marques

Laura Makary Publié le
Produits dérivés : les écoles d'ingénieurs prennent leurs marques
Avec plus de 130.000 étudiants répartis dans plus de 200 établissements en France, les écoles d'ingénieurs représentent un véritable marché pour les produits dérivés. // ©  Meanings / Insa / ESIEA
Bonnet, pull, tasse à l'effigie de l'établissement... Après les écoles de commerce, les écoles d'ingénieurs françaises font leur entrée sur le marché des goodies. À l'occasion de la rentrée, zoom sur quatre initiatives, qui poursuivent toutes le même objectif : développer un sentiment d'appartenance et faire vivre une "marque" d'établissement.

Dans le business des objets dérivés et autres produits de merchandising, les écoles d'ingénieurs françaises constituent un marché prometteur. Personnels, alumni et étudiants sont de plus en plus demandeurs de produits à l'effigie de leur établissement. Certes, les grandes écoles de commerce ont pris un peu d'avance sur le sujet. La plupart d'entre elles disposent en effet de véritables boutiques en ligne, vendant au grand public toutes sortes d'objets, des cartes de tarot HEC à la serviette de plage Essec, en passant par le cendrier Kedge ou la gourde multicolore GEM

Sans parler des établissements anglo-saxons, précurseurs en la matière, qui n'hésitent pas, à l'image de Stanfordà tisser des partenariats avec des marques prestigieuses, pour proposer des stylos Montblanc ou des montres Movado et Tag Heuer gravées au nom de l'université.

Il n'empêche. La tendance se dessine dans les écoles d'ingénieurs. De quoi pousser les services communication à s'interroger sur la meilleure stratégie à adopter pour développer ce nouvel axe de promotion. 

Un marché de 130.000 étudiants

Il faut dire qu'avec plus de 130.000 étudiants répartis dans plus de 200 établissements en France, les écoles d'ingénieurs représentent, en soi, un véritable marché. Et certains acteurs du secteur ne s'y sont pas trompés. "Les écoles d'ingénieurs représentent aujourd'hui 85 % de notre chiffre d'affaires. Nous y observons un esprit d’appartenance fort, même dans les écoles plus petites, ou moins prestigieuses, et encore plus que dans les écoles de commerce", estime David Karmona-Gezeroglu, cogérant de la marque Casual C, marque de "prêt-à-porter universitaire". Ses clients : en grande majorité des associations d'élèves, BDE (bureaux des élèves) en tête.

Marc Metzinger, gérant de la marque SIP19, également en contact avec cette clientèle, voit un vrai attachement des futurs ingénieurs à leur école. "Ce ne sont pas des écoles de commerce, avec des partenariats et des budgets puissants. On est souvent face à des établissements publics, avec de plus petites enveloppes. Cependant, ces étudiants sont très attachés à leur école, avec un côté très identitaire. Ils veulent, comme aux États-Unis, des goodies, et surtout leur pull à l'effigie de l'école", explique-t-il. Sa société a justement noué un partenariat avec le BNEI (Bureau national des élèves ingénieurs) depuis plusieurs années, pour assurer des prix de gros, en échange de commandes conséquentes.

À l'ESPCI Paris, une distribution gratuite

Avec une somme annuelle d'environ 15.000 euros consacrée à l'achat de produits dérivés, l'ESPCI Paris a fait le choix de la gratuité : l'école donne pull, tee-shirt et autres objets à ses élèves et à ses personnels. Un investissement qui fait partie intégrante du budget du service communication. "Nous avons par exemple fait fabriquer des mugs pour les salariés de l'école juste après notre changement de logo, afin qu'ils puissent plus facilement se l'approprier", détaille Céline Ramondou, directrice de la communication de l'école parisienne. J'aimerais, dans l'absolu, créer une boutique en ligne, mais nous avons d'autres priorités."

Nous avons fait fabriquer des mugs pour les salariés de l'école après notre changement de logo, afin qu'ils puissent plus facilement se l'approprier.
(C. Ramondou)

Pas de gain en pièces sonnantes et trébuchantes pour l'école, donc, mais un vrai positionnement de la marque. "L'idée est bien de déployer notre marque via ces objets. Nous avons cette année des clés USB, des surligneurs, des stylos, des sacs, des tee-shirts et des pulls. Nous les distribuons notamment pendant le concours, qui est commun avec celui de l'X, afin d'être présents sur ce créneau", explique la directrice de la communication. Le merchandising détient en tout cas une place importante à l'ESPCI. La preuve : l'école a décidé de créer son blason en voyant son BDE créer des blasons sur ses objets dérivés. "Nous avons alors discuté avec une agence de communication, pour imaginer celui de l'école. Quelque chose de simple, avec du laurier, notre date de création, et le nom de Paris, notre tutelle", précise Céline Ramondou.

À l'ESIEA, les élèves à la manœuvre

Au sein de l'école privée située à Ivry-sur-Seine et à Laval, ce sont les étudiants qui font leurs propositions à l'établissement, via l'association Unic, dédiée au sujet, comme l'explique Franck Pissochet, le directeur de la communication. "Les élèves nous font des propositions, puis nous les coachons pour rationaliser la demande et solliciter correctement les prestataires. Nous les aidons, les encadrons et les encourageons, mais in fine, ce sont les membres de l'association qui tranchent", indique-t-il. L'Esiea prévoit un budget similaire à celui de l'ESPCI, autour de 15.000 euros annuels. "C'est une dépense qui a un sens, car cela fait partie intégrante de l'identité de l'école", souligne le directeur de la communication.

Parallèlement à l'association étudiante, l'établissement effectue quelques commandes, dont un polo à l'effigie de l'école, offert à chaque étudiant, mais aussi des verres Ecocup et des stylos. "Il y a aussi quelques commandes communes pour le concours Alpha, financées par les écoles membres du concours. Cette année, nous avons offert aux 2.500 candidats une balle antistress", ajoute Franck Pissochet.

À Centrale Lyon, une boutique (pour l'instant) éphémère

La question du merchandising se pose au sein du service communication de Centrale Lyon. Pour le moment, la solution choisie est de couvrir uniquement des événements ponctuels. "Nous avons tenu une boutique éphémère en novembre 2016, lors de la remise des diplômes. Nous avons monté un petit stand pour présenter quelques produits, déclare Béatrice Traverse, directrice de la communication de Centrale Lyon. Nous proposons des vestes, des polos, des parapluies, des mugs ou encore des casquettes. Tout est fait en interne et à prix coûtant. Les étudiants sont très demandeurs, tout comme les parents."

Prochaine étape pour l'école lyonnaise : la création d'une boutique en ligne. "Il y a une vraie demande, à laquelle nous voulons répondre, pour que nos objets soient accessibles aux élèves, aux chercheurs et personnels, mais aussi aux anciens, en restant accessibles en termes de prix, avec de la qualité, le tout en faisant travailler des entreprises françaises", détaille Béatrice Traverse, qui vise l'ouverture de cette boutique en ligne d'ici à la fin de 2018 ou courant 2019.

À Toulouse INP, collaborer pour obtenir de meilleurs prix

L'Institut national polytechnique de Toulouse regroupe six écoles, dont trois internes et trois associées. L'idée de Toulouse INP de structurer l'offre de goodies a donc tout naturellement été étudiée avec Bordeaux INP. L'objectif : profiter de meilleurs tarifs et opportunités, en proposant une boutique en ligne commune. "Nous avons commencé à en discuter en novembre 2016. L'objectif était de faire le point sur nos besoins en termes de produits. Aujourd'hui, nous disposons d'un état des lieux de ce qui est commandé par les associations étudiantes et l'administration de chaque école. Nous avons ensuite défini une gamme de produits, une signature, et un prestataire local pour le site", décrit Florence Lauriac, directrice de la communication de Toulouse INP. L'idée est d'avoir des goodies à l'effigie de l'ensemble des INP, mais aussi de chaque institut puis de chaque école.

Notre ambition n'est pas de faire de l'argent. S'il y a gain, il sera redistribué aux associations étudiantes.
(F. Lauriac)

Le budget pour ce site commun, qui devrait être lancé d'ici à la rentrée 2018, est fixé à 6.000 euros. "Si le but est que les INP financent le site et aident à structurer la gamme de produits, notre ambition n'est pas de faire de l'argent. S'il y a gain, il sera redistribué aux associations étudiantes", assure Florence Lauriac. Ainsi, l'INP prévoit quelques économies. "Si l'on commande 5.000 tee-shirts, on peut imaginer une réduction de 3 à 4 euros par unité, avec une meilleure qualité", indique la directrice de la communication. Grenoble INP et Lorraine INP ne sont pas encore de la partie, mais "seront les bienvenus dans le projet dès qu'ils seront prêts".

Laura Makary | Publié le