Université : la fracture se creuse entre administratifs titulaires et contractuels

Camille Stromboni Publié le
Université : la fracture se creuse entre administratifs titulaires et contractuels
Les agents contractuels semblent être les principaux bénéficiaires des transformations de l'université ces dernières années. // © 
BAROMÈTRE 2016. Si les personnels administratifs sont relativement plus confiants dans l’avenir à l’université que les enseignants-chercheurs, leur moral tout comme leur jugement sur le quinquennat Hollande ne sont pas homogènes, révèle le baromètre EducPros 2016.

40 % des personnels administratifs, bibliothécaires, ingénieurs et techniciens confient leur enthousiasme pour l’avenir de leur établissement, d’après la troisième édition du baromètre EducPros sur le moral des professionnels de l’enseignement supérieur et de la recherche, parue le 14 juin 2016. Un chiffre bien supérieur aux 26 % constatés chez les enseignants, enseignants-chercheurs et chercheurs.

Mais, au sein de cette communauté des BIATSS, que représentent presque la moitié des 1.600 répondants de l'enquête, les regards diffèrent selon le statut et le type de contrat, souligne Romain Pierronnet, chercheur en gestion des ressources humaines, associé au baromètre depuis sa création en 2014.

"L’émergence de plusieurs catégories d'administratifs se poursuit, décrit le chercheur. Une fracture se dessine entre les contractuels en CDD, en CDI et les titulaires. Elle touche le moral mais aussi les attentes en matière de politique dans le secteur."

Un moral moins bon… chez les titulaires

Et pour ce qui est du moral, la balance entre fonctionnaires et contractuels va à l'encontre des a priori sur la précarité. "Ce sont les titulaires qui sont les moins enthousiastes pour leur avenir, relate Romain Pierronnet. Ce sont aussi ceux dont le travail est le moins source de satisfaction, ceux qui estiment le moins que leur travail est reconnu à sa juste valeur ou encore ceux qui se déclarent les plus démotivés dans leur travail."

Treize points séparent ainsi les titulaires se déclarant démotivés dans leur travail (53 %) des personnels en CDD (40 %). "Cela peut paraître paradoxal compte tenu du fait que ce sont des emplois peu stables qui peuvent susciter du stress à l’approche du terme du contrat", reconnaît le chercheur.

Ce sont les titulaires qui sont les moins enthousiastes pour leur avenir.
(R. Pierronnet)

Un Clivage sur l'appréciation de l'autonomie des universités

Le clivage se ressent également dans la vision sur les politiques menées dans l’enseignement supérieur et la recherche. Le mouvement de regroupements universitaires en cours ces dernières années est ainsi vu plus positivement par les contractuels en CDD : 40 % estiment que cela permet de lancer de nouveaux projets, contre seulement 20 % des titulaires.

Le renforcement de l’autonomie des établissements sous le prochain quinquennat est une mesure plus fortement demandée par les contractuels (18 % des CDD y sont favorables, 22 % des CDI), que par les titulaires (9 %).

"Les agents contractuels semblent être les principaux bénéficiaires de ces dernières années de transformations : la loi LRU, qui a facilité leur recrutement – notamment sur des fonctions de pilotage ou de gestion de projet – se conjugue aux politiques de site ou encore au PIA (Programme des investissements d’avenir), ce qui a contribué à provoquer des recrutements", analyse le doctorant en sciences de gestion.

Une évolution qui n'est pas propre à la France, souligne Romain Pierronnet : les travaux de Celia Whitchurch ont aussi identifié cette émergence d'une nouvelle catégorie de personnels administratifs dans d'autres universités à l'international.

Les écarts dans le moral des différentes catégories de BIATSS
Je suis enthousiaste pour l’avenir de l'établissement : oui
•    Ensemble : 39,5 %
•    Titulaires : 31,2 %
•    CDD : 50,7 %
•    CDI : 46,4 %

Mon travail est source de satisfaction : oui
•    Ensemble : 75,4 %
•    Titulaires : 70,3 %
•    CDD : 81,9 %
•    CDI : 81,4 %

Mon travail est reconnu à sa juste valeur par mon établissement : oui
•    Ensemble : 34,6 %
•    Titulaires : 29,7 %
•    CDD : 42 %
•    CDI : 38,6 %

Je me sens démotivé dans mon travail : oui
•    Ensemble : 47,8 %
•    Titulaires : 52,9 %
•    CDD : 39,9 %
•    CDI : 45 %
Méthodologie
1.600 personnels de l'enseignement supérieur et de la recherche ont répondu, entre le 15 avril et le 17 mai 2016, à un questionnaire en ligne. Ce questionnaire comprenait une vingtaine de questions sur leur moral, leurs conditions de travail et leur vision de la politique menée sous le mandat du président François Hollande, dans le secteur.


Il a été réalisé avec la collaboration de Romain Pierronnet, chercheur en gestion des ressources humaines, et François Sarfati, chercheur au Centre d’études de l’emploi.

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