François Asselineau : "Il faut donner plus de moyens aux enseignants-chercheurs"

Natacha Lefauconnier Publié le
François Asselineau : "Il faut donner plus de moyens aux enseignants-chercheurs"
Le candidat de l’Union populaire républicaine est "favorable à la sélection à l’entrée de l’université, qui se ferait au mérite et serait plus juste que le tirage au sort". // ©  Franck CRUSIAUX/REA
Des enseignants plus nombreux et mieux payés, des dotations supplémentaires pour la recherche, la mise en place d’un Erasmus planétaire… François Asselineau, candidat de l’UPR, détaille son programme dans une interview accordée à EducPros. Nouveau volet de notre série d'entretiens avec les candidats à l'élection présidentielle, tous sollicités par notre rédaction.

Votre parti, l’UPR [Union populaire républicaine], dénonce "une université inféodée à des logiques capitalistiques" et souhaite renforcer l’indépendance des enseignants-chercheurs. Est-ce que cela implique de donner plus d'autonomie aux universités ?

Pas forcément. Je ne suis pas favorable au régionalisme. L’État doit avoir une politique de l’enseignement supérieur, tout en faisant en sorte que chaque université conserve une certaine autonomie. Il faut surtout donner aux enseignants-chercheurs plus de liberté et plus de moyens.

Il y a actuellement trois tendances nocives pour la recherche en France. La première est la pression qu’ont les chercheurs à publier des articles dans des revues à comité de lecture. Or, cela leur prend énormément de temps. Il ne faudrait pas que cela soit un critère univoque, mais que leurs articles puissent être jugés par leurs pairs.

Deuxième tendance nocive : l’anglomanie. On force les enseignants-chercheurs à publier en anglais : c’est contre-productif. On n'est bon que dans sa langue maternelle ! Sans compter que l’humanité risque d’atrophier ses découvertes si tout le monde publie dans une même langue. Il y a autant de langues que de manières de penser, cela participe à la diversité humaine et il doit en être de même pour la recherche.

Enfin, le manque de moyens financiers est une entrave à la recherche : il est urgent d’y remédier.

Vous voulez créer des postes d’enseignants et revaloriser leur grille salariale. Pouvez-vous donner des chiffres ?

Je n’ai pas chiffré l’augmentation du nombre de postes d’enseignants. Ce qui est certain, c’est que je ne compte pas supprimer par ailleurs des postes de fonctionnaires.

Pour ce qui est d’augmenter les revenus des enseignants, cela passera par la mise en place d’un système de primes. Avec de légères modulations en fonction de différents critères, tels que les résultats obtenus, l’appétence au travail…

Un accent particulier sera mis sur les zones d’éducation prioritaire. Il faut y mettre des professeurs aguerris. Pour les motiver, j’envisage des primes qui augmentent de façon conséquente leurs revenus, de l’ordre de 75 %.

Vous vous présentez comme "le candidat du Frexit" : que deviendrait Erasmus si la France sortait de l’Union européenne ?

Ce n’est pas parce qu’on ne fait pas partie de l’Union européenne qu’on ne peut pas être dans Erasmus : prenez l’exemple de la Suisse ! [Pays partenaire du programme Erasmus+, la Suisse ne peut pas être coordinateur du projet ni accueillir de mobilités apprenantes.]

Mon but n’est pas de fermer la France. Je veux au contraire un Erasmus de la francophonie, et même un Erasmus planétaire : il faut que les jeunes puissent étudier partout.

Mon idée serait de multiplier les échanges en France pour les collégiens. Ceux de métropole partiront dans un collège de l’outre-mer, et vice versa. Au lycée, il s’agira d’échanges avec les pays francophones : Dakar, Montréal, Saigon… Enfin, les étudiants iront dans le monde entier. Le Quai d’Orsay et le ministère de l’Éducation nationale seraient des soutiens pour développer ces partenariats.

Que proposez-vous pour améliorer l’orientation des lycéens vers les études supérieures ?

Beaucoup de bonnes choses ont été faites ces dernières années en matière d’orientation. Notre pays latin a tendance à privilégier les métiers de robe : je veux favoriser l’attirance des jeunes vers les métiers manuels. Sans pour autant supprimer les grandes écoles d’ingénieurs, de commerce ou de sciences politiques : elles font partie de notre ADN.

Il faut aussi encourager l’esprit d’initiative et l'entrepreneuriat. L’objectif de l’éducation n’est-il pas que chaque individu ait une vie heureuse, et donc qu’il fasse ce qu’il aime ? Beaucoup de jeunes aujourd’hui sont intéressés par une vie rurale et se lancent dans l’agriculture biologique, par exemple. Nous devons les accompagner pour qu’ils concrétisent leurs idées.

Êtes-vous favorable à une forme de sélection  à l'entrée de l'université ? Ou préférez-vous conserver le tirage au sort dans les filières en tension ?

Le tirage au sort est un système totalement injuste. Je suis favorable à la sélection à l’entrée de l’université, qui se ferait au mérite et serait plus juste que le tirage au sort.

En revanche, je suis contre le système anglo-saxon pour ce qui est du coût des études. Il peut y avoir un ticket modérateur, mais le coût des études universitaires doit rester raisonnable, avec toujours un système de bourses pour les étudiants.

Je suis favorable à la sélection à l’entrée de l’université, qui se ferait au mérite et serait plus juste que le tirage au sort.

Comment comptez-vous financer les mesures de votre programme "éducation" ?

Les recettes viendront de plusieurs sources. Le fait de sortir de l’UE (Union européenne) fera économiser à la France 9 milliards d’euros. J'arrête le cofinancement, qui représente 5 milliards d'euros. En sortant de l'UE, on dénonce la libre circulation des capitaux : la lutte contre la fraude fiscale sera renforcée. Bercy la chiffre à 60 milliards d’euros, j'en récupère 20 milliards. Cela fait déjà 34 milliards.

De plus, je compte diminuer drastiquement le "millefeuille administratif" en supprimant un certain nombre de postes de sénateurs et de députés européens. Je transforme les régions en établissements publics administratifs, comme c'était le cas avant la réforme de 1982... Les économies faites grâce à ces changements dans l'Administration seront de 5 à 6 milliards d'euros. 

Au total, ces recettes d'environ 40 milliards d'euros permettront de financer l’augmentation du nombre de postes d’enseignants et de leurs salaires, la dotation aux universités et aux chercheurs, et la mise en place d’un programme de mobilité étudiante élargi, entre autres.

Qui envisagez-vous comme ministre de l’Éducation nationale si vous êtes élu ?

J’ai deux ou trois noms en tête, mais ces personnes ne sont pas connues, et elles seraient les premières surprises de l’apprendre. Nous avons beaucoup d’enseignants parmi les 24.000 adhérents de l’UPR, des professeurs des écoles jusqu’aux professeurs d’université.

Natacha Lefauconnier | Publié le