François Germinet (VP université de Cergy-Pontoise) : "Nous allons répondre au Grand emprunt avec notre PRES"

Propos recueillis par Camille Stromboni Publié le
Aujourd’hui dans toutes les têtes, le Grand emprunt occupe particulièrement François Germinet. Vice-président de l’université de Cergy-Pontoise en charge du développement stratégique et des ressources humaines, ce professeur de mathématiques a également la main sur la préparation du Grand emprunt auprès du PRES Cergy University depuis janvier 2010. Le chargé de mission explique la stratégie de son établissement.

L’université de Cergy-Pontoise compte-elle répondre au Grand emprunt avec son PRES [Pôle de recherche et d’enseignement supérieur] ?

Oui, nous allons répondre au Grand emprunt avec notre PRES Cergy University*. Nous voulons en effet développer une véritable logique de territoire.

Mais le PRES travaille également en réseau avec les autres universités du Grand Paris sur certains projets. En Ile-de-France, les relations entre établissements sont en effet très enchevêtrées. Nous sommes par exemple en discussion avec des facs parisiennes pour un futur institut des sciences mathématiques et économiques, avec un accent sur les maths financières, dans la catégorie laboratoire d’excellence. Nous avons également un projet avec l’université du Havre sur un IRT [Institut de recherche technologique] en logistique.

Votre PRES dispose d’un statut associatif. Cela ne vous pose-t-il pas problème pour postuler au Grand Emprunt ?

En effet, le ministère a décidé que les PRES qu’il soutiendra financièrement seront obligatoirement soit des FCS [Fondation de coopération scientifique], soit des EPCS [Etablissement public de coopération scientifique]. C’est un choix politique du gouvernement qui ne reconnaît pas les PRES associatifs et il nous force donc la main. En même temps, il est vrai que la gouvernance au sein d’une fondation devrait être plus efficace.

Avec Cergy University, nous avons ainsi acté la création d’une FCS. Tous les établissements du PRES qui le souhaitent peuvent en devenir membres fondateurs. Ensuite, soit notre association se transformera en FCS, soit nous garderons les deux structures, si certains établissements préfèrent conserver seulement le statut associatif. La fondation sera le réceptacle des projets du Grand emprunt tandis que la structure associative resterait sur ses missions initiales comme la mise en place d’un conseil étudiant, l’accueil des étudiants étrangers, etc.

Qui se charge, au sein des établissements, de préparer les projets ?

Cela se déroule en deux phases. Il faut d’abord imaginer les projets et les valider avec les partenaires. C’est ce que nous sommes en train de faire avec Françoise Moulin-Civil [présidente du PRES et de l’université de Cergy-Pontoise], Pierre Tapie [président du conseil de surveillance du PRES et directeur de l’ESSEC], des chargés de mission comme moi, des directeurs d’école et des directeurs de laboratoire. Une sorte de comité en cours de constitution, accompagné de groupes de travail. Viendra ensuite un volet plus technique avec la rédaction des dossiers, pour laquelle nous auront l'appui d'une équipe administrative. A terme, cela représentera une dizaine de personnes mobilisées à plein temps.

Comment les financements du grand emprunt parviendront-ils aux futures structures d'excellence ?

Prenons l’exemple d’un laboratoire d’excellence. Tout d’abord, il faut bien comprendre que ce ne sera pas une seule entité mais plutôt un regroupement de plusieurs laboratoires au sein d’une sorte de fédération, ce qui permettra d’atteindre la taille critique qui fait sens, notamment à l’international.

Outre ses financements actuels, le laboratoire recevra, au titre de son appartenance au labo d’excellence, des fonds supplémentaires pour développer certaines missions, par exemple diffuser la recherche à l’international et dans la société civile. Des missions que nous n’avons pas les moyens de financer pour l’instant et que nous aurons décidé d’accomplir ensemble via cette nouvelle structure.

Concrètement, à quels appels à projets comptez-vous répondre ? Prétendez-vous au pôle d’excellence ?

Nous allons candidater aux laboratoires et équipements d’excellence. Au cœur de notre projet se trouve surtout un IRT sur le patrimoine, les savoirs et leurs technologies, avec deux axes : les technologies des savoirs nomades et celles pour le patrimoine. Nous voulons faire de Cergy un catalyseur de l’innovation, avec une maison de l’entrepreneuriat de la valorisation et de l’innovation.

Quant au « pôle d’excellence » : que nous ayons ou non des chances réelles d’y prétendre, nous sommes dans cette démarche de structurer nos briques au sein d’un véritable campus d’excellence.

* Le PRES Cergy University regroupe douze établissements d’enseignement supérieur de Cergy-Pontoise : l’université de Cergy-Pontoise, le groupe ESSEC, 5 écoles de l’institut polytechnique Saint-Louis (EBI-École de Biologie Industrielle, EPMI-École électricité de Production et Méthodes Industrielles, EPSS-École Pratique de Service Social, ILEPS-Institut Libre d’Éducation Physique Supérieur, ISTOM-Institut Supérieur d’agro-développement), les écoles d’ingénieurs ENSEA et EISTI, l’école nationale supérieure d’arts et le groupe ITIN-école supérieure d’informatique, réseaux et systèmes d’information/ESCIA-école supérieure de comptabilité, gestion et finance.

Les règles du Grand emprunt

Annoncé par le président en décembre 2009, le Grand emprunt représente 19 milliards d’euros pour l’enseignement supérieur et la recherche . Une manne dont les grands principes ont été présentés par Valérie Pécresse au début du mois d’avril 2010. La ministre a tout de même laissé plusieurs points sans réponse, notamment le mode de gouvernance de ces futures structures d’excellence (« On ne peut a priori donner aucune réponse univoque à ces questions », estime la ministre), ou la taille critique nécessaire (« nul ne peut fixer a priori  la taille ou le profil de ces campus », a-t-elle indiqué).

Seule certitude : les universités seront au cœur des projets d’excellence. Les établissements et les PRES porteront ainsi les candidatures aux différents appels d’offres. Côté calendrier, les appels d'offres des équipements d’excellence et IHU (Instituts hospitalo-universitaire) devraient être publiés avant juin 2010, tout comme ceux des IRT et laboratoires d’excellence. Quant aux fameux pôles d’excellence, les textes ne devraient pas sortir avant la rentrée 2010.

Tous les documents utiles sur le Grand emprunt

- Le dossier de presse de la présidence de la république : « Priorités financées par l’emprunt national » (14 décembre 2009) 
- le projet de loi de finances rectificative pour 2010 (20 janvier 2010) (Notamment les pages 26 à 29) 
- Le discours de Valérie Pécresse au colloque de la CPU (Conférence des présidents d’université) le 1er avril 2010
- Les prises de position de la CPU, notamment dans sa lettre du 12 avril 2010 et celle du 18 mars 2010 . Egalement dans la newletters du 19 avril 2010 : "Le bureau de la CPU mandaté auprès du commissariat général à l'investissement".
- le texte de notre blogueur Henri Audier : Grand emprunt : sous couvert "d'excellence", une catastrophe imminente
- Le billet d'Alain Juppé sur son blog : Plaidoyer pour l'excellence

Droits (photo) : université de Cergy-Pontoise

Propos recueillis par Camille Stromboni | Publié le