Hazel Woodward (directrice du groupe de travail sur les e-books au JISC) : "Notre étude permettra de connaître l'utilisation des e-books par les étudiants"

Propos recueillis par Elisabeth Blanchet, notre correspondante à Londres Publié le
Hazel Woodward (directrice du groupe de travail sur les e-books au JISC) : "Notre étude permettra de connaître l'utilisation des e-books par les étudiants"
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Hazel Woodward est à la tête d'un projet de développement de e-books unique au monde. Directrice du groupe de travail sur les e-books du JISC (Joint Information Systems Committee), une instance publique, elle a réussi à négocier auprès d'éditeurs de livres universitaires l'utilisation d'ouvrages sous la forme d'e-books pour une durée de deux ans. Les étudiants des universités partenaires peuvent y accéder via les sites web de leurs bibliothèques universitaires, 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7. Gratuitement.

Pouvez-vous nous donner le contexte et l'objectif du projet en quelques mots ?

Notre projet a démarré en janvier 2007. L'idée est de donner aux étudiants un accès gratuit (possibilité de faire des "copier-coller", d'imprimer les parties que l'on veut...) à des ouvrages universitaires de référence : les "incontournables" que les enseignants recommandent. Le projet bénéficie d'un budget de 600 000£ (780 000 €). Ce qui peut paraître énorme mais il faut savoir que l'objectif consiste à obtenir une license d'exploitation gratuite nationale de "bestsellers".

Combien d'universités sont concernées ?

Les bibliothèques universitaires de 126 universités britanniques sont partenaires du projet. Des millions d'étudiants sont donc bénéficiaires.  

De quels sujets traîtent les ouvrages concernés et combien sont-ils ?

Nous avons réussi à négocier auprès des éditeurs partenaires l'utilisation gratuite de 39 livres. Cela peut sembler peu mais j'insiste sur le fait que ce sont des ouvrages de référence. Ils représentent les meilleures ventes des maisons d'édition. Les sujets couverts sont divers : média et communication, médecine, commerce et management, techniques et sciences de l'ingénieur.  

Quelles sont les maisons d'édition partenaires ? Comment avez-vous réussi à les impliquer dans le projet ?

Nous avons passé un contrat avec huit maisons d'édition d'ouvrages universitaires telles que Taylor and Francis, Palgrave ou encore Cambridge University Press. Cela n'a pas été facile de les convaincre... Nous avons insisté sur le fait qu'il s'agissait d'un projet de recherche sur l'utilisation des e-books par les étudiants et que nous avions besoin des éditeurs pour y prendre part. Leur principal souci était la perspective de perdre des ventes. Nous leur avons donc offert des compensations financières pour pallier aux pertes éventuelles. Nous avons aussi limité la durée des contrats à deux années.  

Quel peut donc être l'intérêt des maisons d'éditions, hormis la compensation financière ?

Les éditeurs partenaires vont profiter des résultats d'une étude de fonds que nous avons entamée en janvier 2008 sur l'utilisation des e-books et que nous réalisons tout au long de cette année auprès des étudiants. Il s'agit d'une étude très poussée que nous appelons "deep web log analysis" analysant les comportements des utilisateurs et les tendances observées. Elle permettra par exemple de savoir si, et comment, la différence de sexe joue dans l'utilisation des e-books, comment un étudiant de premier cycle les utilise par rapport à un chercheur, comment les étudiants passent leur temps à parcourir les e-books, etc. Les éditeurs partenaires pourront bénéficier des résultats de cette analyse et les utliser pour développer leurs futures stratégies de vente. Une version de cette étude pour le public sera aussi diffusée sans mention des noms des éditeurs et des universités.    

Quels sont les impacts actuels du projet, sur les étudiants, les enseignants, les BU ?

Le projet a énormément de succès. Les étudiants sont déjà habitués à vivre dans une société d'accès gratuit à l'information donc nous sommes en quelque sorte un peu en retard sur eux. Les enseignants nous encouragent et sont ravis que les ouvrages qu'ils conseillent soient si facilement accessibles. Quant aux bibliothèques universitaires, même si chaque étudiant peut accéder aux livres via son portable, elles ne sont pas moins fréquentées pour autant. Elles gardent leur rôle de conseil et d'aide à la recherche de documentation. Elles ont aussi évolué et accueillent de plus en plus de groupes et d'ateliers de travail.  

Le projet va prendre fin en janvier 2009. Comment envisagez-vous l'avenir ?

Nous comptons beaucoup sur les résultats de l'étude pour arriver à convaincre les éditeurs partenaires de poursuivre leur engagement. Nous sommes également en pourpalers avec d'autres maisons d'éditions pour développer le projet et obtenir l'accès gratuit à de nouveaux ouvrages.  

Propos recueillis par Elisabeth Blanchet, notre correspondante à Londres | Publié le