Sylvain Schirmann : "Mon départ de Sciences po Strasbourg n'est pas lié à une crise"

Propos recueillis par Marie-Anne Nourry Publié le
Sylvain Schirmann : "Mon départ de Sciences po Strasbourg n'est pas lié à une crise"
Sylvain Schirmann, Sciences po Strasbourg // ©  Sciences po Strasbourg
Sylvain Schirmann, directeur de Sciences po Strasbourg depuis 2006, a annoncé qu'il quitterait ses fonctions le 31 août 2015, soit six mois avant la fin officielle de son second mandat. De la décennie passée à la tête de l'institut alsacien, il tire un bilan positif. Avec un regret : ne pas voir achevé le nouveau bâtiment, dont la livraison prévue pour 2015 a été repoussée à 2017.

Vous avez décidé de quitter vos fonctions six mois avant la fin de votre mandat. Pourquoi ?

Mon départ n'est pas lié à une crise à l'IEP. En quittant mes fonctions avant la rentrée, comme dans les autres IEP, et non en février 2016, je rétablis le calendrier qui avait été bousculé par la démission de l'un de mes prédécesseurs en pleine année académique.

L'élection du nouveau directeur va se tenir le 4 juin prochain, ce qui me laissera le temps de lui transmettre les dossiers en bonne et due forme. Dans le cadre du plan quinquennal, l'institut va entrer en septembre dans l'accréditation de la nouvelle offre de formation, et le nouveau directeur sera ainsi libre de gérer les arbitrages. En ce qui me concerne, j'ai effectué une demande de congé de recherche.

Quelles sont les réalisations accomplies durant vos deux mandats dont vous êtes le plus fier ?

Il y a d'abord l'obtention en 2006 d'un nouveau bâtiment, dans le cadre du contrat de plan État-Région, qui donnera à l'IEP des moyens immobiliers conséquents. La construction d'un cursus en cinq ans constitue également un chantier marquant. Nous avons réformé la scolarité avec un premier cycle très généraliste et une spécialisation en quatrième et cinquième années.

En parallèle, j'ai impulsé une internationalisation de Sciences po Strasbourg, en développant les doubles diplômes et les enseignements en langue étrangère, qui a vocation à s'amplifier. J'ai toujours souhaité mettre en place un parcours entièrement en anglais, c'est une piste pour l'avenir.

Enfin, je peux citer la création du fameux réseau du concours commun avec cinq autres IEP. En permettant aux candidats de présenter leur dossier pour plusieurs instituts à la fois, nous avons répondu à une démarche d'égalité des chances. Et le concours est aujourd'hui bien établi dans le paysage.

Quelle est la plus grande difficulté que vous avez rencontrée ?

Tous les projets évoqués précédemment ont nécessité au départ une grande phase de discussion pour lever les obstacles. Faire bouger une maquette de formation, par exemple, ce n'est pas simple. Mais c'est une étape que je trouve passionnante. Et comme j'avais une légitimité du fait d'être été largement élu à chaque mandat, c'était peut-être un peu plus facile.

Au regard de mon projet de candidature initial, je pense en tout cas être proche de ce que je souhaitais mettre en place. Mon seul regret, en quittant mes fonctions, est de ne pas voir le nouveau bâtiment achevé.

Sciences po Strasbourg est une composante de l'université, qu'est-ce que cela lui apporte ?

Une offre de formation plus vaste pour nos étudiants, et la possibilité de tous les faire sortir de cinquième année avec deux diplômes, le nôtre et le master de l'université. Ce lien nous enlève également certaines épines du pied en matière de gestion. À titre d'exemple, l'ensemble des enseignants-chercheurs est nommé à l'université et ensuite affecté à l'IEP, de même que le personnel administratif, à l'exclusion de ceux que je recrute directement.

En outre, j'ai réussi à conserver des moyens propres à travers un dialogue de gestion avec l'université, tout en maintenant l'autonomie pédagogique. Et dans le contexte de rapprochement, nous avons trouvé des marges de manœuvre satisfaisantes. En revanche, je dois admettre que nous n'avons pas la même réactivité que les autres instituts, du fait de notre circuit de validation qui est un peu plus long.

Pensez-vous que les autres IEP devraient également renforcer leurs liens avec l'université ?

Les masters que délivrent les IEP ne peuvent l'être que dans le cadre d'un conventionnement avec les universités et, avec la petite dérive d'Aix, celles-ci vont peut-être souhaiter redéfinir leurs liens. En tous les cas, des discussions sur ces liens entre les IEP et les universités s'annoncent, dans le cadre des Comue [communautés d'universités et établissements].

Quant à Sciences po Saint-Germain-en-Laye, le dernier-né, il est bâti sur notre modèle. Et s'il y en a d'autres à venir, ce sera également le cas.

Et quels sont les enjeux pour demain dans le monde des IEP ? La mise en place d'un bachelor comme à Sciences po Paris est-elle d'actualité ?

L'organisation de la scolarité est en effet un enjeu des années immédiatement à venir. Ce qui va se dessiner, c'est une entrée en première année et quatrième année, comme à Paris. D'ailleurs, la question de l'entrée en deuxième année se pose déjà dans le concours commun.

Enfin, au niveau du réseau des IEP, Paris compris, on peut imaginer que la coopération va se renforcer. Nous avons commencé par une convention sur la défense de la marque, qui se poursuivra probablement par des échanges de bonnes pratiques. Et de nouveaux projets de coopération devraient s'esquisser entre les sept instituts du concours commun.

Propos recueillis par Marie-Anne Nourry | Publié le