"2013, l’année MOOC", la chronique d'Emmanuel Davidenkoff

Emmanuel Davidenkoff Publié le
L’histoire retiendra peut-être 2013 comme l’année où l’éducation a commencé sa bascule vers de nouveaux modèles pédagogiques et économiques, portés par le numérique. Cette chronique a été publiée dans l'Écho républicain.

S’il fallait retenir un événement susceptible de laisser une trace durable dans l’histoire de l’éducation au cours de l’année écoulée, il serait à chercher du côté des États-Unis, avec l’explosion des MOOC, ces cours massifs gratuits en ligne dont nous avons déjà parlé.
Une nouvelle étape vient d’être franchie : plusieurs universités vont autoriser leurs étudiants à valider une partie de leur diplôme via des enseignements suivis de cette façon. C’est le début d’une révolution qui devrait profondément bouleverser l’offre pédagogique et le modèle économique de l’enseignement supérieur.

L’offre pédagogique d’abord : en libérant le temps et l’espace aujourd’hui dévolus aux cours magistraux, les MOOC ouvrent de nouveaux horizons à la relation enseignant-étudiant, a fortiori si on parvient à les adosser à des systèmes de correction gérés par des logiciels.
Comme d’autres industries, l’éducation pourrait peu à peu se libérer des tâches répétitives et mécaniques qu’une machine remplit au moins aussi bien qu’un être humain. L’industrie a connu cette révolution. Elle ne fut pas sans drames, notamment sociaux, mais elle conduisit sur le moyen et le long terme à des progrès formidables, à une attention croissante portée à la qualité et à l’amélioration des produits, au service du consommateur.

Ce mouvement devrait également toucher l’enseignement scolaire, même si les systèmes éducatifs sont beaucoup moins plastiques que l’enseignement supérieur. On cessera un jour d’infliger aux professeurs des écoles la partie purement répétitive de l’apprentissage des tables de multiplication, alors qu’une simple appli pour tablette fait le travail aussi bien, pour moins cher, sans jamais s’énerver, et en étant capable, en prime, d’identifier les lacunes individuellement – et ce n’est qu’un exemple parmi des dizaines.
Les enseignants pourront ainsi trouver le temps de se concentrer sur des apprentissages scolaires, sociaux, artistiques, sportifs, qui exigent le savoir-faire et l’empathie d’un être humain.

Les modèles économiques seront également bouleversés. En permettant à ses étudiants de suivre des cours de maths en ligne, la San Jose State University a fait baisser l’addition de 650 à 150 dollars le cours semestriel. Et il n’y aucune raison pour que le numérique ne produise pas sur l’économie de l’éducation le même effet que sur les industries qu’il a déjà impactées ; à chaque fois cela s’est traduit par des baisses de prix pour le consommateur.

Les systèmes éducatifs sont probablement aujourd’hui dans la même situation que l’industrie face à l’émergence de l’ordinateur personnel au milieu des années 70 ou les médias face à l’explosion du Web à la fin des années 90 : la certitude des bouleversements qui s’annoncent ne renseigne pas sur leur nature.
Se feront-ils au profit du consommateur ou du citoyen ? Le service public saura-t-il tirer son épingle du jeu en libérant les énergies qu’il abrite ? De nouveaux « pure players » feront-ils leur apparition avec des offres low cost crédibles ? Rendez-vous à la rentrée prochaine pour le savoir !

Emmanuel Davidenkoff | Publié le