Reportage

Une année en prépa : "Si vous obtenez entre 7 et 9/20 au début, c’est déjà bien !"

Delphine Vernier, enseignante de SVT, dévoile l’emploi du temps aux élèves, très vite déçus : 8 h - 16 h minimum, tous les jours.
Delphine Vernier, enseignante de SVT, dévoile l’emploi du temps aux élèves, très vite déçus : 8 h - 16 h minimum, tous les jours. © Delphine Dauvergne
Par Delphine Dauvergne, publié le 07 septembre 2017
10 min

IMMERSION EN PRÉPA. Épisode 1. Cette année, l’Etudiant suit les élèves de la classe prépa BCPST, dite "prépa agro-véto", du lycée Pothier d’Orléans. Un cursus exigeant, qui nécessite un cadrage et des conseils avisés lors de la rentrée. Premiers contacts.

Les élèves se pressent dans l’entrée du lycée Pothier, à Orléans, situé près de la gare. Ce mardi 5 septembre 2017, les premières années de classe préparatoire font leur rentrée, sous une pluie fine et un ciel gris. Dans la cour trônent des panneaux en liège sur lesquels des instructions leur permettent de s'orienter vers leur salle d’accueil. Les 48 élèves de prépa BCPST (biologie, chimie, physique et sciences de la Terre), dite "agro-véto" (car préparant notamment à l'entrée en école vétérinaire), prennent place, sous l’œil bienveillant de trois de leurs enseignants, chargés de les accueillir.

Les élèves qui font leur rentrée en première année de classe prépa sont stressés, dans la cour du lycée Pothier d'Orléans.
Les élèves qui font leur rentrée en première année de classe prépa sont stressés, dans la cour du lycée Pothier d'Orléans. © Delphine Dauvergne
Au programme de la matinée : distribution de cartes (étudiante, cantine et CDI), vérification et échange de données personnelles, mais aussi présentation des nouveaux arrivants. À tour de rôle, durant l’appel, les étudiants se lèvent, indiquent d’où ils viennent et leurs raisons de venir dans cette classe prépa. Certains viennent de la région, mais d’autres de l’Aveyron, ou encore de Guyane et de Tahiti !

Les trois quarts des élèves veulent devenir vétérinaires

"Je veux être vétérinaire, car je suis passionnée par les animaux", déclare Mélody, 18 ans. Comme beaucoup d’autres dans la classe, elle a choisi la prépa BCPST car c'est la voie privilégiée pour accéder aux écoles de la filière. L'étudiante a choisi celle du lycée Pothier d’Orléans pour son "ambiance", après s’être renseignée auprès d’anciens élèves, sur des forums sur Internet, ou encore lors de la journée portes ouvertes de l’établissement. Plus de la moitié des étudiants de cette classe avait aussi fait le déplacement.

Mélody a fait sa terminale S à Montargis et souhaite devenir vétérinaire, comme la plupart de ses camarades de classe.
Mélody a fait sa terminale S à Montargis et souhaite devenir vétérinaire, comme la plupart de ses camarades de classe. © Delphine Dauvergne
Les places sont chères dans les écoles vétérinaires. Delphine Vernier, leur enseignante de SVT (sciences de la vie et de la Terre), met en garde les étudiants dès la rentrée : "Il faut se montrer réaliste, vous ne pourrez pas tous devenir vétérinaires. Mais vos choix vont évoluer, notamment en rencontrant les anciens de la prépa."

D’autres étudiants ont choisi la prépa pour devenir "ingénieur dans l’environnement", "géologue", ou encore par goût "pour la biologie". La professeure les rassure : "Ce n’est pas grave si votre choix n’est pas encore fait, vous avez encore deux ans pour réfléchir et connaître tous les débouchés."

"Assiduité, rigueur et répétition"

Delphine Vernier martèle ses conseils. "Mon mot d’ordre : assiduité, rigueur et répétition. Comme les cours ont lieu dans un lycée, le fonctionnement est le même pour les absences : la CPE (conseillère principale d'éducation) prévient généralement vos parents." "Nous commençons les cours à l’heure, dès la sonnerie, quel que soit le nombre d’élèves arrivés. Chaque minute de travail compte", insiste Mickaël Pigné, professeur relais de la classe. "Quand un prof est absent, on se remplace au pied levé, aucun trou n’est laissé dans l’emploi du temps", affirme sa collègue.
Les élèves visitent leur lycée, ici la salle de TP où des feuilles de fougères attendent les étudiants en 2e année.
Les élèves visitent leur lycée, ici la salle de TP où des feuilles de fougères attendent les étudiants en 2e année. © Delphine Dauvergne
Pour réussir en prépa, il faut être organisé dans ses révisions. "Impossible d’apprendre son cours la veille d’une évaluation, il est trop dense. Il est donc nécessaire de se l’attribuer au fur et à mesure, en s’entraînant à faire des schémas, synthétiser les éléments principaux sur des fiches…", conseille Delphine Vernier.
L’une des caractéristiques de la prépa agro-véto est aussi "l’importance donnée à toutes les matières. Les maths, la physique-chimie et les SVT sont à coefficient égal aux concours pour les écoles d'agro, et les matières comme le français et l’anglais sont essentielles si on veut pouvoir se démarquer des autres candidats. Aucune discipline ne doit être laissée de côté si l’on veut réussir", met en garde Mickaël Pigné.

Attention aux notes qui chutent !

Après une courte visite du lycée, les élèves rejoignent une grande salle où se tient le discours de la direction de l’établissement, pour tous les étudiants en classe prépa. "Vous êtes habitués aux notes de 15-20, si vous obtenez entre 7 et 9 au début, c’est déjà bien !", prévient Philippe Dusson, le proviseur adjoint chargé des CPGE (classes préparatoires aux grandes écoles). Des rires nerveux fusent. "On s’y attendait déjà", commente Corentin, 18 ans, qui avait 16/20 de moyenne l’an passé. Parmi les matières présentées par les enseignants, il redoute "l’informatique à cause des programmes à construire, c’est nouveau".
Corentin et Logan ont tous les deux eu une mention très bien à leur bac S. Ils ne sont que 15 garçons dans la classe.
Corentin et Logan ont tous les deux eu une mention très bien à leur bac S. Ils ne sont que 15 garçons dans la classe. © Delphine Dauvergne
La notation est particulière en classe prépa car "nous évaluons les élèves par rapport aux autres, comme aux concours, pour qu'ils situent leur niveau", précise Mickaël Pigné. Un système qui ne rassure pas forcément. "J’ai peur que cela crée des tensions entre nous et casse l’esprit de solidarité qu’on aimerait créer", s’inquiète Valentine, qui s’est proposée pour être déléguée de classe provisoire, avec Manon.

Des professeurs "maternants"

Si les enseignants insistent sur le côté exigeant du cursus, ils essaient en même temps de rassurer leurs nouveaux élèves. "N’attendez pas que la situation soit trop délicate, notamment si vous avez des soucis au niveau de la méthodologie ou des difficultés à vous organiser. Tous les professeurs sont disponibles si besoin, vous êtes notre seule classe. La prépa c’est difficile, mais pas insurmontable", atténue Mickaël Pigné, également professeur de maths. Il inscrit au tableau les e-mails des enseignants, joignables ainsi à tout moment.
Chacun leur tour, les élèves de la prépa véto du lycée Pothier d'Orléans se présentent devant leur classe.
Chacun leur tour, les élèves de la prépa véto du lycée Pothier d'Orléans se présentent devant leur classe. © Delphine Dauvergne
Cette prépa orléanaise est connue pour son côté "familial". "Si vous avez des problèmes, administratifs par exemple, nous sommes là pour vous aider, d’autant plus si vos parents sont loin. Nous avons par exemple géré une fuite d’eau d’un élève", illustre la CPE. Nicolas a justement choisi Orléans pour "éviter l’esprit de compétition souvent présent dans les prépas parisiennes. Ici, nous ne sommes qu’une seule classe de BCPST, cela nous permet de rester soudés". Juliette apprécie aussi : "Les enseignants nous ont très bien accueillis, on nous met moins la pression que ce que je pensais".

Ne pas s'isoler

"Les élèves de deuxième année nous ont dit que c’était le moral le plus dur à gérer. Il faut savoir s'entraider", rapporte Justine, 17 ans. Originaire de Montargis (45), elle a fait le choix de suivre sa prépa en internat. "Nous sommes deux filles par chambre, alors que les garçons sont quatre !" Beaucoup d’étudiants de prépa font ce choix, pour ne pas perdre de temps dans les transports mais aussi pour s’assurer un cadre social favorable au travail. "Nous sommes directement dans le lycée, c’est plus simple pour tout", affirme Logan, 17 ans, qui a opté aussi pour ce logement. Le lycée, qui met à disposition des salles pour travailler, reste d’ailleurs ouvert jusqu’à minuit.

Nicolas est passionné par les animaux depuis tout petit et veut devenir vétérinaire, "la prépa BCPST est la voie royale, les concours offrent plus de places que pour les étudiants qui viennent de l’université".
Nicolas est passionné par les animaux depuis tout petit et veut devenir vétérinaire, "la prépa BCPST est la voie royale, les concours offrent plus de places que pour les étudiants qui viennent de l’université". © Delphine Dauvergne
"Je suis plus inquiet pour l’internat que pour les cours, mais comme les élèves de prépa sont sérieux, je pense que cela devrait aller", confie Nicolas, qui vient de Chartres (28). "Je peux rentrer chez mes parents assez facilement en cas de coup dur." Valentine, originaire de la même ville, a choisi un studio en centre-ville : "J’ai parfois besoin de pouvoir me retrouver seule pour réfléchir calmement."

Savoir décompresser

"Nous vous conseillons de réserver au moins une heure d’activité extrascolaire par semaine sur votre emploi du temps, pour vous changer les idées et relâcher la pression. Par exemple, certains vont au cinéma après le DS (devoir sur table) du jeudi soir", indique Mickaël Pigné. À partir de 17 h, tous les soirs de la semaine, le gymnase est ouvert pour laisser les élèves de prépa faire du sport (badminton, volley, escalade…).

Juliette, 18 ans, espère pouvoir "continuer à faire de l’équitation cette année", une activité qu’elle pratique depuis une quinzaine d’années. Originaire d’Ingré, à 30 minutes de bus d’Orléans, elle souhaite devenir ingénieure dans l’environnement et idéalement intégrer AgroParisTech. La jeune femme est déjà engagée dans des associations de défense de l’environnement.

La vie étudiante de l’établissement est aussi très riche et les nouveaux élèves vont bientôt le découvrir avec leur journée d’intégration, concoctée par les étudiants de deuxième année. Deux d’entre eux arrivent dans la classe en ce jour de rentrée pour commencer à lancer les "hostilités". Dans un premier temps, il faudra remplir un questionnaire sur sa personnalité pour être choisi par son parrain ou sa marraine. Puis, lui préparer un pique-nique à partager ensemble, et enfin se trouver un déguisement respectant le thème de cette année : "fruits et légumes". Après cette petite pause dans l’explication du programme de l’année, c'est l'heure d'enchaîner sur le premier cours de maths de l’année. En prépa, on ne perd pas une minute.
Pour aller plus loin - Livres l'Etudiant Editions

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