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Au cœur de l'ISIPCA : dans l’école des "nez" de demain

Au cœur de l'ISIPCA : dans l’école des "nez" de demain // © Simon Lambert/Kaïros pour l'Etudiant
Le parc au centre de l'ISIPCA, permet aux étudiants de déjeuner ensemble. © Simon Lambert/Kaïros pour l'Etudiant
Par Delphine Dauvergne, publié le 20 octobre 2015
1 min

Créée en 1970 par Jean-Jacques Guerlain, la très renommée école du parfum, à Versailles, forme les futurs "nez". Plus de 500 étudiants y suivent une formation scientifique ou commerciale spécialisée dans la parfumerie, l’aromatique ou la cosmétique. Reportage au milieu des effluves.

Une ancienne maison bourgeoise, à l'entrée du petit campus, abrite l'administration. La hauteur de plafond, l'escalier en bois grinçant et les moulures défraîchies nous rappellent que l'ISIPCA (Institut supérieur international du parfum, de la cosmétique et de l'aromatique alimentaire), fondée par le parfumeur Jean-Jacques Guerlain, a déjà plus de 40 ans. Situés dans un quartier pavillonnaire de Versailles, les bâtiments de l'école se fondent dans le décor.

Le cadre est assez bucolique : en ce mois de septembre ensoleillé, des étudiants déjeunent sur la grande pelouse centrale. "Chacun emporte son bentô, car il y a seulement une boulangerie et un kebab dans le quartier. C'est très convivial", témoigne Juliette, 20 ans, en master 1 professionnel formulation et évaluation sensorielle, spécialité cosmétiques.

D'autres élèves profitent de la pause-déjeuner pour s'entraîner à l'olfaction dans la "bibliothèque des matières premières"... "Celui-là sent mauvais !" grimace une étudiante en passant l'échantillon à sa camarade. Sur les étagères blanches au centre de la table, des dizaines de bocaux trônent : fenouil, patchouli, fèves tonka... Tout autour, des réfrigérateurs abritent encore d'autres senteurs. "On nous demandera à la fin de l'année de savoir toutes les reconnaître", précise Lucie, 18 ans, qui suit la formation de préparatrice en parfum en alternance. L'entraînement continue à la maison, avec des échantillons rapportés.

L'attrait d'un parcours en alternance

Si la renommée internationale de l'ISIPCA et sa spécialisation affirmée sont des critères de choix récurrents chez les étudiants qui ont opté pour ces formations, l'alternance arrive aussi en bonne position. "La formation en alternance m'a séduite. Nous n'avons cours que quatre mois dans l'année et ceux-ci se déroulent surtout sous forme de travaux pratiques avec des intervenants du secteur professionnel, comme Clarins, Annick Goutal", décrit Chloé, 22 ans, en licence professionnelle analyses et applications en parfums et arômes alimentaires. Elle effectue son alternance à l'Osmothèque, l'unique conservatoire international traçant l'histoire de la parfumerie, hébergé à l'ISIPCA. L'association organise d'ailleurs une séance olfactive hebdomadaire à destination des étudiants.

Après la pause-déjeuner, la pelouse et les couloirs sont désertés. Dans l'un des quinze laboratoires, les élèves s'activent dès leur entrée en classe. Les vestes en jean sont laissées sur les portemanteaux du couloir contre les traditionnelles blouses blanches, avec parfois charlottes et lunettes de protection pour certaines manipulations. Les filles (plus de 80 % des effectifs) s'attachent les cheveux et font ensuite la queue pour se laver les mains.

Créer des produits cosmétiques

"Les étudiants doivent choisir les matières premières, les bons ingrédients, puis le mode opératoire à utiliser, la "recette". C'est beaucoup plus compliqué que cela n'y paraît, car il faut maîtriser de nombreuses données en physique-chimie", met en garde Corinne Soleau, intervenante en formulation de produits cosmétiques. Les cours se déroulent dans une ambiance bonne enfant, en binôme ou trinôme. Chacun note rigoureusement les résultats des tests effectués. "Je traite les élèves comme des professionnels. Je n'ai pas besoin de faire de discipline, car ils sont tous motivés", justifie l'intervenante.

Au sein de l'école, les formations "scientifiques" sont distinctes des "commerciales". Mais ce n'est pas pour autant que les profils doivent être moins motivés... "Les commerciaux doivent aussi aimer les produits qu'ils vendent, avoir une passion pour le bien-être qu'ils prodiguent", souligne Cécile Montier, la directrice de l'école.

La partie commerciale ne doit pas être négligée pour autant. "Il faut avoir l'envie de vendre, savoir communiquer avec une écoute active, dépasser l'aspect scientifique du produit pour savoir argumenter", ajoute Lionel Alev, intervenant dans le cursus animateur formateur des entreprises de la beauté, de niveau bac+2.

Des formations très sélectives

À l'ISIPCA, un candidat sur quatre est accepté. Pour le master professionnel formulation et évaluation sensorielle, formation emblématique de l'école, c'est un candidat sur dix. Baptiste, inscrit dans ce M1, spécialité arômes alimentaires, a dû s'y prendre à deux fois avant d'intégrer la formation prestigieuse. Le jeune homme de 24 ans était pourtant titulaire d'une licence de chimie, comme la plupart des autres candidats. "Le concours est difficile, il faut le préparer en suivant l'actualité du secteur soit sur des sites Internet spécialisés en commerce, de type lsa.fr, soit en repérant les nouveautés au supermarché", explique-t-il.

Pour l'entretien de motivation, "si le candidat a déjà signé son contrat en alternance, cela peut faire la différence, même si c'est rare. Nous l'interrogeons aussi sur le quotidien du métier qu'il a choisi, avec ses contraintes", précise Cécile Montier. Célestine, 19 ans, en première année de BTS management des unités commerciales, a réussi à séduire le jury en "montrant son book de photos de maquillage". "Nous ne proposons pas plus de places que de postes qui existent sur le marché", défend la directrice de l'ISIPCA, gérée par la chambre de commerce et d'industrie Paris-Île-de-France. Le taux d'insertion professionnelle est de 80 %, sept mois après l'obtention du diplôme. Cette sélection à l'entrée permet également d'avoir des petits effectifs, de 20-25 élèves, dans l'ensemble des formations, ce qui favorise le travail en groupe.

Une ambiance conviviale

Même si les élèves sont en entreprise pendant plus de la moitié de leur temps de formation, les liens entre eux sont solides. "Un bureau des étudiants organise des soirées qui permettent à toutes les promotions de se retrouver. Le réseau d'anciens joue un rôle important. Il y a quelques jours, j'ai rencontré une ex-diplômée, qui est maquilleuse : elle m'a offert une séance de maquillage", raconte Justine, 24 ans, en licence professionnelle analyses et applications parfums et arômes.

À 17 h 30, les cours sont finis, mais pas la journée. "Je travaille une heure et demie à deux heures le soir. Il y a beaucoup de devoirs en début d'année", avertit Célestine. "Il faut être bosseur et constant dans ses entraînements, comme pour les musiciens et les sportifs", prévient Cécile Montier, la directrice. Les étudiants sortant du master professionnel formulation et évaluation sensorielle auront ainsi appris à reconnaître 350 matières premières.

Pendant un cours sur l'olfaction et la dégustation, les étudiants pataugent avec enthousiasme. "Essence ? Sapin ? Vanille, c'est de la vanille !" "J'ai l'impression de manger de l'herbe..." Grimaces et rires au contact des cuillères en plastique. Leur enseignante, Isabelle Mirikelam, confirme : "C'est un métier de passionnés."

Se former à l'ISIPCA
L'ISIPCA propose des formations de bac+1 à bac+6 : BTS, Bachelor, licences professionnelles, masters professionnels, Mastères Spécialisés. Toutes sont dispensées en alternance, sauf deux d'entre elles : le Mastère Spécialisé en sécurité et réglementation internationale des parfums et produits cosmétiques et l'European Fragrance and Cosmetics Master (EFCM), destiné surtout aux étudiants étrangers.

Selon la formation choisie, une partie des cours peut avoir lieu à l'université de Versailles-Saint-Quentin-en-Yvelines ou à l'université de Cergy-Pontoise.

Pour le concours, le dossier de candidature est à déposer avant fin février ou en avril. Suit un oral de motivation, et pour certains masters, une épreuve écrite.

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