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Histoire, psychologie, sociologie : le match des licences de sciences humaines

Université de Bordeaux. La bibliothèque du site de la Victoire, qui réunit les étudiants en "sciences de l'Homme" (Janvier 2015).
La bibliothèque du site de La Victoire à l'université de Bordeaux accueille les étudiants en "sciences de l'Homme". © Camille Stromboni
Par Morgane Taquet et Camille Stromboni, publié le 17 mars 2015
1 min

Fac d’histoire, de psycho ou de socio après le bac ? Entre les trois licences de sciences humaines et sociales, votre cœur balance… Si toutes demandent un apprentissage théorique conséquent, elles apportent chacune un regard différent sur le monde. Voici quelques clés pour savoir laquelle correspond le mieux à vos aspirations.

Qu'il s'agisse de la licence d'histoire, de psychologie ou de sociologie, c'est à un profil de bacheliers généraux que ces filières sont destinées. Mais entre S, ES, et L, "aucun bac n'est un sésame plus qu'un autre", estime Pierre-Marie Chauvin, responsable de la licence de sociologie à l'université Paris-Sorbonne.

Avec quelques différences tout de même. Pour la socio, les lycéens de filière ES auront quelques bases de plus que les autres en arrivant. En licence de psycho, "les bacheliers scientifiques et les très bons littéraires réussissent souvent mieux que les autres", évalue de son côté Nadine Proia, directrice de l'UFR de psychologie à l'université de Caen.

Trois regards différents sur le monde

Si ces trois licences de sciences humaines vous donnent des outils de compréhension du monde, chacune l'interroge différemment.

"L'histoire apporte une vision rétrospective sur les dynamiques historiques des événements, un voyage dans le temps. Le regard de la psychologie portera plutôt sur les logiques d'action individuelles ou avec l'environnement familial. Enfin, en sociologie, on s'intéresse aux comportements individuels dans le monde contemporain, en les confrontant à la société, à la structure sociale, tente de résumer le maître de conférences Pierre-Marie Chauvin. Mais évidemment, nos disciplines ont des passerelles entre elles, elles se nourrissent les unes des autres, ajoute-t-il. Tout comme de la philosophie ou de l'économie."

Un programme très vaste en histoire

En licence d'histoire, vous irez de l'Antiquité à la période contemporaine ! Avec des matières complémentaires obligatoires (langue vivante, informatique) et optionnelles (géographie, histoire de l'art, science politique, lettres, philosophie...). Le programme est donc très vaste. Et une vingtaine d'heures de cours et de TD [travaux dirigés] par semaine ne suffiront pas, il vous faudra compléter les enseignements par de nombreuses lectures personnelles, comme dans toutes les sciences humaines.

"J'ai dû lire une quinzaine de livres sans compter les lectures pour les exposés", décrit Gabriel, en deuxième année d'histoire à Poitiers. "C'est votre curiosité intellectuelle qui fera la différence", souligne David Plouviez, maître de conférences en histoire moderne à l'université de Nantes.

Attention aux idées reçues en psycho

En psychologie, vous allez découvrir les différentes familles de cette discipline : la psychologie clinique (fondée sur l'observation), sociale (l'étude des groupes), du développement (l'étude de l'enfant et de l'adolescent).

Et attention aux idées reçues par rapport à cette filière qui attire un très grand nombre d'étudiants. "La psychologie n'est pas enseignée au lycée. Du coup, les bacheliers viennent en pensant qu'ils vont pouvoir se débrouiller... mais il ne suffit pas d'aimer réfléchir sur soi !, prévient Nadine Proia, directrice de l'UFR de psycho à l'université de Caen. Il y a un décalage entre psychologie médiatique et psychologie académique. Cette dernière implique une démarche très scientifique".

"Je n'avais pas du tout conscience que j'allais devoir faire des statistiques et de la biologie", illustre Eric, en deuxième année à Paris-Descartes.

En socio : famille, travail et école au programme

En sociologie, vous allez découvrir en licence les grands concepts de la discipline, mais aussi de nombreux zooms thématiques. Avec des incontournables : la famille, le travail, la culture, l'école... "Ce sont des sujets qui nous touchent, c'est ça qui me plaît en socio", souligne Marylène, en troisième année à l'université de Bordeaux.

Avec également des matières surprenantes. "On a eu des cours de maths ! Je ne m'y attendais pas. Mais ce sont de statistiques, donc ce n'est pas insurmontable", rassure-t-elle. "Il ne faut pas être rétif aux chiffres, confirme l'enseignant Pierre-Marie Chauvin. Mais aussi avoir une certaine aisance et un appétit pour la rédaction, et une soif pour l'actualité sociale et politique."

Dans les trois licences : des auteurs et des théories

Si vous connaissez déjà l'apprentissage des dates et des événements en histoire, la psychologie et la sociologie vont, elles, exiger la maîtrise d'un large corpus d'auteurs et de théories, que vous découvrirez tout au long de la licence.

"Au début, c'est assez théorique, reconnaît Marylène, en sociologie à Bordeaux. Il faut s'habituer à la façon de parler des enseignants, c'est un nouveau langage, avec beaucoup de concepts." Dès l'été, avant d'entrer en première année, n'hésitez pas à commencer vos lectures en piochant dans les bibliographies préparées par les enseignants. Il n'est jamais trop tôt !

"La psychologie recouvre un champ de sous-disciplines très vaste, par conséquent la formation est très théorique notamment en licence, il ne faut donc pas s'attendre à pratiquer beaucoup", précise Nadine Proia.

Mais à chaque licence sa méthode

L'épreuve reine des études d'histoire, c'est le commentaire de texte. Vous êtes prévenu dans cette filière, vous n'allez pas arrêter d'écrire. Également des dissertations. La bonne maîtrise de la langue française est donc capitale. L'apprentissage par cœur sera également présent, car il faut retenir dates et événements, mais il ne suffira absolument pas : on attendra de vous une démarche critique et raisonnée.

"À l'université, si on reparle bien sûr de la Seconde Guerre mondiale, on ne va pas revenir sur les grandes batailles, mais davantage sur ce qui explique la montée du nazisme par exemple, explique Gabriel, en licence à Poitiers. On fait davantage appel à nos neurones !"

En psycho et en socio, ces sont les méthodes qualitatives et quantitatives que vous allez découvrir et qui vont rythmer votre quotidien. Préparer et réaliser un entretien, un questionnaire, analyser des résultats... Vous allez apprendre tout un ensemble de techniques, à mettre en application dès le début de la licence, en sociologie surtout.

"Je demande par exemple aux étudiants de L1 de réaliser un entretien sur le sujet de leur choix, décrit Pierre-Marie Chauvin. Cela peut être sur la pratique d'un sport par les hommes et les femmes, l'inégalité d'accès aux grandes écoles, la mise en couple, etc. C'est très diversifié. Cela peut paraître faussement facile mais l'interview, cela s'apprend".

Et après ? Un master vivement recommandé !

Après trois ans de sociologie, d'histoire ou de psychologie, vous avez vocation à poursuivre vos études en master. Vous vous spécialiserez alors dans la discipline, ou bien rejoindrez un master axé sur un secteur professionnel, comme la culture, la communication, le journalisme, l'aménagement du territoire, le développement local, les ressources humaines, etc.

À noter une particularité en psychologie : le master professionnel de psycho permet d'obtenir le titre de psychologue. Mais attention : la sélection entre le master 1 et le master 2 est radicale, le bac+5 dans cette discipline étant la condition pour exercer le métier de psychologue.

Pas un, mais plusieurs débouchés

Si cela fait bien sûr partie des débouchés, vous ne deviendrez pas forcément historien, psychologue, sociologue ! Les étudiants qui passent par l'une de ces trois licences seront d'ailleurs peu nombreux à rejoindre, in fine, ces métiers bien spécifiques. Et c'est toute une kyrielle d'autres secteurs auxquels vous aurez accès. Tout dépendra de votre choix de master.

En sociologie, vous pourrez devenir chargé d'études dans un cabinet, un institut de sondage, une collectivité territoriale, un organisme public... En histoire, les métiers de la culture (patrimoine, tourisme) s'ouvrent à vous, ou encore ceux de l'édition.

Après un cursus de psychologie, vous pourrez travailler dans des structures hospitalières, sanitaires ou sociales, dans le champ de la formation professionnelle, dans le secteur associatif, ou encore emprunter les nouveaux métiers de la prise en charge des personnes âgées.

Et s'il faut bien être conscient qu'une partie des diplômés de sciences humaines rencontrent plus de difficultés que d'autres à trouver un emploi, notez que 88 % ont un job, 30 mois après le diplôme (voir l'enquête annuelle du ministère).

"Comme dans toutes les sciences humaines, l'insertion pro peut apparaître un peu plus incertaine qu'après des filières toutes tracées comme ingénieur ou médecin, reconnaît Pierre-Marie Chauvin. Mais il y a une bonne insertion à terme ! C'est simplement que les débouchés sont très diversifiés, et qu'il faut construire soi-même son parcours."

Une bonne préparation aux concours

Les filières d'histoire et de sociologie vous permettent d'accéder à des concours très variés : fonction publique, communication, journalisme... Ces licences sont en effet généralistes, vous permettant d'acquérir un bon bagage de connaissances et de culture générale, utiles également si vous souhaitez rejoindre Sciences po et les IEP (instituts d'études politiques) en master.

Ces deux cursus mènent également aux concours pour devenir enseignant. Traditionnellement, la licence d'histoire a longtemps été vue comme le passage obligé.
La psychologie, elle, constitue un bon tremplin pour les concours d'éducateur spécialisé, ou des formations paramédicales et sociales.


Pour les plus motivés : les doubles licences à l'honneur
En sciences humaines et sociales, l'université propose de nombreuses doubles licences. Histoire - science politique, histoire - droit, sociologie - philosophie... Attention : ces dernières sont sélectives à l'entrée mais surtout impliquent une charge de travail importante, avec à la clé, deux diplômes !

À noter également : l'université de Paris 10 – Nanterre propose une licence de sciences sociales, qui combine histoire, géographie, sociologie et économie. Vous ne devrez ainsi choisir votre spécialisation qu'en troisième année de licence. Ici aussi, "un investissement en travail plus important est demandé aux étudiants, car il faut étudier profondément au moins trois de ces quatre disciplines", souligne Vincent Demont, responsable du cursus à Nanterre.

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