Témoignage

Exclusif. Sciences po : à Paris, un quart des étudiants de première année se disent déçus

22 août 2016 : les quelque 660 étudiants de première année découvrent l'amphithéâtre Émile Boutmy.
Trois mois après la rentrée, plus d'un étudiant sur cinq a songé à quitter Sciences po Paris. © Natacha Lefauconnier
publié le 23 février 2017
1 min

Un questionnaire conduit par un étudiant en première année, sur le seul campus parisien de Sciences po, dévoile les attentes insatisfaites d’une partie de sa promotion, un trimestre après la rentrée. Une rénovation des trois premières années du cursus est d'ailleurs dans les tuyaux.

Moins de trois mois après leur entrée à Sciences po Paris à la rentrée 2017, près de 23 % des étudiants de première année ont “déjà songé sérieusement à arrêter”. C’est le constat que dresse une enquête interne menée par un étudiant de la promo auprès de ses pairs du campus parisien.

Mis en ligne entre le 10 et le 14 novembre 2016 sur le groupe Facebook de la promotion de première année, le questionnaire a récolté 328 réponses parmi les 650 étudiants, soit la moitié de l’effectif parisien (les autres des 1.872 admis au concours d'entrée 2016 sont répartis sur les campus de région).

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Des matières “survolées”, un environnement “élitiste”

Les points de mécontentement ? En premier lieu, le manque d'approfondissement des disciplines enseignées. “J’ai du mal avec la méthode synthétique de Sciences po” commente un répondant, tandis qu’un autre a “l’impression de survoler les matières”. Un manque d’esprit critique sur les cours est également reproché : “Trop de bourrage de crâne et pas assez d’analyse”, dénonce un étudiant.

Autre raison du mal-être de certains : la solitude, dans un environnement qu’ils jugent “élitiste” et “à l’entre-soi poussé” dans lequel ils ne se reconnaissent pas forcément. Comme cette jeune fille, par exemple, qui évoque “la sensation d’être entourée de gens qui veulent diriger le monde plus tard… et de ne pas être sûre de vouloir en faire partie”.

Enfin, la chute des notes de ces très bons élèves au lycée fait douter certains de leur choix d’intégrer l’établissement de la rue Saint-Guillaume. L’une se sent “extrêmement nulle après avoir eu des résultats passables”, malgré “des heures passées en bibliothèque”, un autre évoque “des notes très justes” malgré un bac obtenu avec la mention très bien.

Cependant, il ressort également de ce sondage que 77 % des étudiants de première année sont satisfaits de la vie associative de Sciences po et 55 % jugent les enseignements “passionnants”.

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Un sondage à relativiser

Des critiques négatives à relativiser, comme le souligne l’auteur de cette enquête de satisfaction, Clément Baillon, fondateur et ancien président de l’association Droits des lycéens, qui a intégré l’IEP parisien à la rentrée 2016. Il reconnaît que la méthode est biaisée et critiquable. D’une part, rien ne garantit que l’échantillon soit représentatif, et, d’autre part, les questions sont biaisées puisqu’elles s’adressent aux personnes déçues.

Des remarques entendues par la direction

Les résultats de cette enquête ont été soumis à la direction de Sciences po, qui estime que "cette démarche caractérise l'esprit Sciences po" et se réjouit que "ses étudiants de première année manipulent des outils statistiques". 

Pour Bénédicte Durand, doyenne du Collège universitaire depuis la rentrée 2015 : "Ces retours directs viennent nourrir notre réflexion sur les améliorations que l'on peut apporter à l'accueil des étudiants ou aux enseignements, tout comme le baromètre que l'on soumet aux élèves tous les deux ans".

Pour les élèves découragés par la baisse de leurs résultats par rapport à l'année de terminale, Bénédicte Durand rappelle "qu'un responsable pédagogique suit chaque cohorte et qu'il est à même d'écouter les difficultés des élèves". Ce sont en moyenne cinq ou six d'entre eux qui franchissent sa porte chaque semaine. Les élèves issus du dispositif CEP (Conventions d'éducation prioritaire) bénéficient d'un suivi renforcé, avec un système de tutorat dans toutes les disciplines, auquel peuvent assister tous les étudiants qui en éprouvent le besoin.

Un Collège universitaire rénové pour la rentrée 2017

Une enquête spontanée qui tombe au bon moment, puisqu'une nouvelle organisation du cursus de premier cycle sera dévoilée à la mi-mars. Avec notamment, "un parcours plus progressif" dans les différentes disciplines, qui s'éloignera du "catalogue d'enseignements" actuellement reproché par une partie des jeunes scienpistes. 

Si la première année restera celle de l'initiation, les étudiants verront dès le départ la cohérence de leur parcours sur les trois années, avec le choix entre trois majeures (pluridisciplinaires) dès la deuxième année. 

Enfin, pour l'adaptation des jeunes bacheliers au monde de Sciences po et la "démystification de l'établissement", notamment sur ce campus situé "dans l'arrondissement le plus chic et le plus cher de Paris", comme le rappelle la doyenne du Collège universitaire, le programme Booster sera élargi. Instaurée en juillet 2016, cette semaine intensive de cours et de méthodologie sur le campus de Reims avait permis à une cinquantaine des 160 élèves admis à Paris par la voie CEP de préparer leur rentrée, laquelle suit une semaine d'intégration pour les 650 élèves de première année.  

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