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Se sent-on plus citoyen européen après un séjour Erasmus ?

Par Delphine Dauvergne, publié le 20 mai 2014
4 min

Vous considérez-vous plus comme citoyen européen après un séjour Erasmus ? À l’approche des élections européennes, qui auront lieu en France le 25 mai, l'Etudiant a posé la question à des jeunes partis avec Erasmus. Les avis sont partagés.

Drapeau européen

Ils ont passé plusieurs mois hors de l'hexagone pour vivre "l'expérience Erasmus". Leur identité européenne s'en est-elle trouvée renforcée ? Pour certains, cela va de soi. "Depuis mes premiers voyages scolaires je me sens citoyenne européenne, j'aime les langues et les cultures différentes, explique Florie, 22 ans. Erasmus soude toutes les nationalités, c'est la plus belle aventure européenne."

Partie en Suisse avec Erasmus en 2011-2012 lors de sa 3e année d'école d'orthophonie, elle y a rencontré son petit ami, norvégien, avec qui elle s'installera à la rentrée prochaine. "La citoyenneté européenne est avant tout une envie de vivre ensemble, de partager de plus en plus afin d'améliorer les choses, envisager l'Europe comme un seul pays", poursuite l'étudiante bordelaise, enthousiaste.

"On se sent avant tout français à l'étranger... et perçu comme tel"

Un son de cloche pourtant pas si courant parmi les jeunes interrogés, dont l'expérience de certains, aussi riche soit-elle, n'a pas développé un sentiment de citoyenneté européenne. Ainsi, pour Rémy, 25 ans, qui a passé six mois en Irlande grâce à Erasmus en 2013 lors de sa 3e année de l'ISC Paris, un tel séjour sert davantage à "renforcer les nationalismes" : "Les jeunes se regroupent par nationalité, on se sent étranger au pays, mais pas citoyen européen, il n'y a pas de communauté européenne qui se forme".

Pour Mathilde, 22 ans, qui a profité du programme Erasmus en Espagne en 2011-2012 alors qu'elle était en L2 d'espagnol, "tout est une question d'‘échelle identitaire’ adossée à l'‘échelle géographique’." Elle s'explique : "Quelqu'un originaire de Bordeaux qui se retrouverait à Lille se présenterait comme Bordelais, pas comme Français, ni comme Européen". En Espagne, elle s'est "sentie avant tout française et, selon elle, les autres la percevaient comme telle. "Je pense qu'il est possible de se sentir européen dès lors que l'on sort de l'Europe, vers d'autres continents", suppose la jeune femme. Question d'échelle donc, et de points de vue.

Plus "citoyens du monde" que "citoyen européen"

Certains étudiants vont jusqu'à nier l'existence de cette "citoyenneté européenne". C'est le cas d'Anne, 27 ans, diplômée d'un M2 de lettres classiques à Paris 4. Elle est partie en Suisse avec Erasmus en 2009-2010 : "Il n'y a pas de sentiment ou même d'envie d'appartenir à quelque chose de commun, tant il peut y avoir de différences profondément ancrées, notamment entre les pays latins et les pays anglo-saxons", remarque-t-elle. De son expérience, elle tire le constat que "les étudiants Erasmus se divisent généralement entre ceux qui communiquent en anglais et ceux qui s'attachent à pratiquer la langue du pays d'accueil, les étudiants se regroupent par affinités culturelles et linguistiques, par mode de pensée et de comportement, aucun sentiment ‘d'être citoyen européen’ pourrait transcender tout cela."

Jérôme, passé par Erasmus en 2005, en Espagne, quand il était en M1 physique à l'université Joseph Fourier Grenoble, demeure aussi sceptique sur la capacité de tels séjours à favoriser une identité européenne : "Les grands discours de ‘citoyenneté européenne’ pour justifier la bourse Erasmus n'ont rien à voir avec la réalité, car les étudiants Erasmus restent souvent entre eux et vivent l'expérience comme des vacances payées par l'Europe".

Plusieurs de ces jeunes voyageurs préfèrent se dire "citoyen du monde", comme Maxime, 22 ans. Parti grâce à Erasmus en Suède en 2013-2014 lors de son M1 de chimie à Paris 6, il rappelle que le programme ne permet pas seulement une expérience européenne, mais surtout de "rencontrer des personnes qui viennent du monde entier, de la Corée au Mexique". Jérôme, baroudeur assidu, se sent aussi citoyen du monde : "Pourquoi se limiter à l'Europe quand le terrain de jeu est la planète ?"

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