Décryptage

Chief Happiness Officer : le bonheur au travail, c'est son métier !

Le CHO, garant du "bien-être" des salariés : un nouveau métier né outre-Atlantique.
Le CHO, garant du "bien-être" des salariés : un nouveau métier né outre-Atlantique. © plainpicture/Maskot
Par Catherine de Coppet, publié le 02 février 2017
1 min

Peut-on distiller le bonheur au travail ? Depuis peu se développent en France les postes de "Chief Happiness Officer", un concept importé des États-Unis. Une mission à géométrie variable en fonction des entreprises. Effet de mode ou nouveau métier ?

"Tous les jours, il y a des suggestions farfelues qui me parviennent. On m'a dit, par exemple : 'ce serait sympa d'avoir un chien au bureau' !", raconte Florent Voisin, CHO d'OVH, un fournisseur d'hébergement Internet et de serveurs. À première vue, difficile de prendre au sérieux les missions d'un "Chief Happiness Officer", littéralement le "responsable du bonheur" en entreprise. Mais...

Cet intitulé à la mode, né – comme beaucoup de concepts managériaux contemporains – dans la Silicon Valley, en Californie, recouvre une fonction qui se développe dans les entreprises françaises depuis peu. Elle est souvent associée, plus ou moins à juste titre, au concept d'"entreprise heureuse", où absence de hiérarchie et cours de yoga au bureau seraient la norme... Symptomatique des évolutions du travail, le phénomène dépasse aujourd'hui l'univers des start-up ou le seul secteur du numérique. Et la fonction n'est pas réservée aux moins de 30 ans, comme en témoignent le nombre et la diversité des profils de "CHO" sur les réseaux sociaux professionnels. L'apparition de nouveaux intitulés dans le même esprit, comme "Culture Captain" ou encore "Brandlove Manager", confirme la tendance.

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Mission RH ou communication interne ?

Dans les faits, l'expression "Chief Happiness Officer" recouvre des réalités relativement différentes. "Pour résumer, on peut dire qu'il y a deux types de CHO, explique Florent Voisin, 43 ans. Le premier se situe du côté de la communication interne et organise beaucoup d'événementiel. Le second se situe plus sous l'étiquette RH (ressources humaines) et analyse le fonctionnement de l'organisation pour améliorer les conditions de travail."

Les CHO, qui se revendiquent tous comme garants du "bien-être" des salariés, ont quand même quelques missions en commun. À commencer par le fait de maintenir le lien entre les gens qui travaillent. "Mon job consiste à faire en sorte que tout le monde communique, explique Christina Dago, 26 ans, CHO chez Wisembly, start-up de services collaboratifs aux entreprises. Je suis là pour fluidifier les relations et assurer au maximum l'information de tous."

"Nous avions peur de perdre l'esprit qui présidait à la création de l'entreprise avec la croissance des équipes, explique Florent Voisin, qui déclare se situer du côté "santé et qualité de vie au travail". D'ancienne start-up, nous sommes passés à 800 personnes en France et c'est un véritable enjeu !"

Anticiper et désamorcer les conflits

Autre mission que les CHO semblent avoir en commun : jouer le rôle de médiateur. "Il m'est arrivé d'intervenir entre une équipe et un manager qui ne se comprenaient pas, témoigne Christina Dago. C'est passé par des mails, des réunions, des points avec le manager. Et la situation s'est apaisée." À cet égard, anticiper les conflits ferait également partie du job. Un axe de travail qui dépasse le seul cadre interne dans certains cas.

"Je suis là pour désamorcer les éventuelles difficultés que peut rencontrer l'un de nos salariés avec nos clients", explique Catherine Brugière, 53 ans, CHO chez CSA Consulting, une petite société de consultants spécialisée dans la banque et l'assurance. Une tâche qui se traduit dans le temps passé auprès des salariés. "Je peux passer deux heures à discuter avec quelqu'un dans mon bureau si c'est nécessaire, que ce soit pour un problème professionnel ou personnel. Cela fait partie de mon travail", poursuit la CHO.

Petit déj et coach sportif

L'organisation d'événements conviviaux ou liés au travail, mais aussi la mise en place de services pour améliorer la vie quotidienne des salariés fait également partie intégrante des missions d'un CHO. Organisation de petits déjeuners mensuels (chez Wisembly), conférences thématiques (chez Wisembly, ou OVH), mise en place d'un Noël solidaire et d'une bibliothèque participative (chez OVH)... "Nous avons monté un service de conciergerie d'entreprise pour soulager nos salariés de tous les petits tracas quotidiens. Et depuis peu, nous employons un coach sportif à temps plein. Il a assuré 1.500 cours en 2016 !", témoigne Florent Voisin. Des actions pour lesquelles l'entreprise dégage généralement un budget dédié.

Sans oublier le business

Dans certaines entreprises, cet aspect du travail "événementiel" peut prendre une allure plus centrée sur le cœur de métier. "J'organise des petits déjeuners à destination de nos clients. Le côté business est important dans mon poste, reconnaît Catherine Brugière, qui occupe également un poste de commerciale l'autre moitié du temps. Je joue aussi un rôle de garante de l'éthique des contrats, afin de proposer un juste prix, pour le client comme pour le consultant." Un poste hybride donc, né des convictions de la direction.

D'une façon générale, le quotidien et les missions du CHO vont, in fine, dépendre beaucoup de la personne qui les incarne. "J'ai rencontré d'autres CHO et c'est souvent une histoire de personnalité", estime Catherine Brugière, qui souligne l'existence d'un groupe LinkedIn de CHO. "À l'heure actuelle, il n'est pas du tout dynamique", regrette-t-elle. À quand un CHO pour les CHO ?

CHO, un représentant du personnel nouvelle génération ?

Certaines des missions des CHO recoupent, pour tout ou partie, celles traditionnellement dévolues aux IRP (instances représentatives du personnel). Que ce soit le CE (comité d'entreprise), en charge notamment de la gestion des loisirs (vacances, culture, activités sportives, etc.), ou le CHSCT (Comité hygiène sécurité et conditions de travail), axé sur les conditions de travail, la santé et la sécurité au travail, instances composées d'élus syndicaux et/ou de représentants du personnel. Elles jouent, selon le Code du travail, un rôle d'accompagnement et de prévention dans l'entreprise. Force est de constater que dans les entreprises où il existe un CHO, ces instances ont peu de poids ou n'existent pas. Le Code du travail impose aux entreprises de se doter de ces instances à partir de 50 salariés.

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