Reportage

Le coworking, bien plus qu'un bureau partagé !

Le Poulailler, à Metz, accueille jusqu'à 20 coworkers simultanément.
Le Poulailler, à Metz, accueille jusqu'à 20 coworkers simultanément. © Catherine de Coppet
Par Catherine de Coppet, publié le 15 décembre 2016
1 min

Partager un espace de travail en fonction de ses besoins, profiter des équipements et surtout rencontrer des personnes de tous horizons : c'est ce que permettent les espaces de coworking, destinés aux travailleurs indépendants, et qui se développent pour répondre à l'éclatement de l'organisation du travail. Reportage au Poulailler, premier espace de coworking créé à Metz, en Moselle.

9 h 30. Sacha vient d'arriver au Poulailler. Ce jeune communicant travaille en indépendant, mais pas du tout dans l'élevage de volailles. Le Poulailler, c'est son bureau, un bureau qu'il partage avec près de 75 personnes, toutes travailleur indépendant. C'est le principe des espaces de coworking (littéralement "travailler ensemble", en anglais), qui depuis une quinzaine d'années voient le jour en France. Premier du genre à Metz (57), le Poulailler a ouvert ses portes en 2014, à deux pas des berges de la Moselle, avenue de Blida.

Ce matin Sacha est venu avec quelques croissants, Émilie avec une grosse brioche au chocolat. C'est aujourd'hui qu'a lieu le petit déjeuner mensuel du Poulailler, moment convivial qui permet notamment d'accueillir les nouveaux coworkers, et où chacun est prié d'amener un petit quelque chose. "Émilie vient d'arriver, c'est l'occasion pour elle de savoir ce que font les autres, et de se présenter", explique Sacha.

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Indépendants et télétravailleurs

Du développement informatique au Webdesign, en passant par la communication, l'immobilier ou encore la traduction... de nombreux secteurs sont représentés au sein des 75 coworkers du Poulailler. Émilie, 26 ans, tout juste diplômée d'un master gestion, vient de rejoindre la structure. "Je travaille à un projet de site d'annonces immobilières destinées aux investisseurs", explique la jeune femme. Sa voisine, Christine, est chargée de développement dans une association, salariée en télétravail, au Poulailler depuis deux ans.

À quelques tables de là, il y a Coralie. "Je suis là depuis un an, je viens à peu près tous les jours." Après huit ans dans une agence de communication parisienne, Coralie s'est installée à son compte : "Je fais des missions de communication, et j'ai lancé un média en ligne autour du jeu dans la société." Derrière elle, Martin vient d'arriver. Doctorant en psychologie, et salarié à mi-temps comme psychologue, il vient assez régulièrement pour son travail de recherche. "Avant je travaillais chez moi, j'étais assez isolé, ici j'ai plus d'interactions sociales", explique-t-il.

Tout ce petit monde s'installe à la place qu'il préfère, dans cet espace aux couleurs de l'association : "Nous avons réuni de l'argent grâce à un crowdfunding pour aménager l'espace de façon confortable et stylée", explique Bruno. Sur les murs, des palettes de bois décorées avec des effigies de poules, entre les tables, des plantes vertes, et à l'accueil, un grillage mural présente les photos de tous les coworkers, avec leur carte de visite.

Lieu hybride

Porté par l'association Coworking Metz, le Poulailler n'est pas seulement un espace de travail ouvert de 8 h 30 à 23 h en semaine, où chacun profite des locaux et des équipements (Wifi, écrans, imprimante, buvette) : "Ce soir nous organisons une conférence sur les nouveaux métiers du Web, ouverte à tous, y compris au public", explique Sacha. Un événement organisé en partenariat avec le lieu qui accueille le Poulailler : TCRM-BLIDA, ancien site de la régie des transports de Metz, transformé depuis 2013 en espace dédié à la culture numérique.

"La Ville a investi dans ce lieu le budget qui servait auparavant à organiser la Nuit blanche", explique Delphine Stoufflet, chargée de communication de TCRM-BLIDA. De fait, le lieu a permis l'installation d'artistes autour d'un pôle d'économie créative, et s'est ouvert à des entreprises du numérique, grâce au label "Métropole French Tech".

150 mètres carrés bien aménagés

Cette volonté de la mairie et de la métropole est venue à point nommé à l'époque pour Valérie Respaut, Stéphane Klein et Vincent Garrett, à l'origine du Poulailler. "Nous étions collègues dans une agence de Web, et nous avions cette idée depuis 2005 : créer un lieu où nous pourrions réunir des compétences multiples", explique Valérie. Un rêve devenu réalité grâce aux conditions proposées par la Ville et la Métropole au démarrage du projet : "Nous n'avons pas payé de loyer pendant deux ans, et nous avons pu progressivement aménager l'espace comme nous le souhaitions !"

À l'arrivée, un espace au rez-de-chaussée de 150 mètres carrés, très lumineux, donnant sur un jardinet, avec 20 postes de travail, une salle de réunion, un espace accueil et une salle pour passer ses appels téléphoniques. "La règle, c'est le silence et la concentration", explique Bruno, président de l'association et coworker en développement Web. Il est presque midi, et de fait, depuis deux heures, seul le cliquetis des claviers peuple le calme de la pièce, bien chauffée en ce jour d'hiver...

Des projets communs et des jeux !

Au-delà du partage de l'espace et des événements, le coworking permet aussi de fédérer les compétences pour des résultats intéressants. À l'instar du projet porté par cinq coworkers, qui ont répondu à un appel de la Ville de Metz pour créer un outil numérique de lutte contre les discriminations, à destination du grand public. "J'ai posté un message sur le forum du Poulailler quand j'ai vu passer l'appel à projets, cinq coworkers étaient intéressés : un développeur, un graphiste, une community manager, un formateur ancien éducateur spécialisé", raconte Damien, 37 ans, spécialiste du Web transmedia.

Un an après, la "Box Populi" était livrée à la Ville : un espace mobile accessible à tous, où l'on peut répondre à des quizz sur les discriminations, enregistrer un témoignage vidéo et consulter des contenus. "Nous avons impliqué le FabLab de TCRM-BLIDA, et l'une des entreprises de vidéo qui est ici", précise Damien, "le projet devrait connaître une nouvelle vie, deux organismes nous ont déjà contactés pour décliner le concept !"

Il est déjà midi, l'heure pour Damien de rejoindre la "cantine" partagée de TCRM-BLIDA, pour un moment de détente avant le déjeuner. "J'ai lancé un rendez-vous hebdomadaire pour jouer de façon informelle aux jeux de société", explique François qui l'accompagne. Ce coworker est créateur de jeux et de sessions de formation en entreprise basée sur le jeu. "Le jeu est omniprésent ici, c'est l'occasion de se retrouver." Ce jour-là, ils seront quatre à jouer, pour une petite heure, avant de faire réchauffer leur gamelle aux micro-ondes ou acheter un burger au Food Truck qui vient deux fois par semaine. Un petit bout de Californie, ou presque.
Des tarifs très accessibles

Martin, le doctorant en psycho, a acheté un carnet de 10 tickets pour 10 journées, soit 60 €. Les coworkers ont la possibilité d'acheter des tickets également à la journée, ou de payer au mois. À 80 € le mois, le Poulailler est l'un des espaces de coworking les moins chers de France ! Le décompte des présences se fait automatiquement par repérage des adresses IP qui se connectent au Wifi. "C'est nous qui avons fabriqué ce système", souligne Bruno, qui a également réalisé le site Web du lieu.
Aujourd'hui, si l'association paye un petit loyer à la structure qui possède TCRM-BLIDA, elle s'appuie sur les abonnements des coworkers pour couvrir les frais de gestion du lieu, et l'organisation d'événements. "Nous avons également pu embaucher Sacha à mi-temps pour gérer l'accueil et la communication du lieu, depuis avril. Il est en contrat aidé, du coup l'association ne paie que 15 % de son salaire", explique Bruno.

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