Reportage

Michael, Nathaniel, Robin et Ari, créateurs de Lekiosk : "Convaincre les éditeurs de presse a été une gageure"

Par Léa Lejeune, publié le 11 mars 2013
1 min

En 2007, 4 amis étudiants et diplômés d'école de commerce imaginent une application pour lire la presse sur tablette. 6 ans après, ils ont réussi à convaincre la majorité des éditeurs en France à utiliser leur appli : 1 iPad sur 4 en est pourvu. Retour  sur l’histoire de ces quatre entrepreneurs qui ont cru jusqu’au bout à leur projet.  

Le kiosk - L'Entreprise
Et si les créateurs du Kiosk.fr avaient trouvé le business modèle de la presse en ligne ? Michael et Nathaniel Philippe, Robin Sabban et Ari Assuied affirment ne pas croire à la disparition de la presse, à laquelle ils offrent une seconde vie sur tablette. Leurs "lecteurs 2.0" feuillettent magazines et journaux sans avoir à tourner les pages. Ce public, généralement aisé, est prêt à payer pour du contenu éditorial en ligne, à condition qu'il s'agisse de divertissement. Avec 700.000 téléchargements au compteur, Lekiosk équipe aujourd'hui en France 1 iPad sur 4.

Ce kiosque virtuel n'a rien à envier à ses cousins établis au coin de la rue. "Grâce à la technique du 'skeuomorphisme', nous avons recréé l'expérience réelle du kiosque avec des présentoirs 3D sur lesquels on peut prendre les magazines ; des commerces customisés selon les pays", explique Michael Philippe, chargé du développement produit et marketing.

Le démarrage du projet

En 2007, Michael, 21 ans, élève du master entrepreneuriat de l'ESCP Europe, effectue un stage au fonds d'investissement Stralem à New York. Le jeune homme cherche sans succès son journal préféré, "l'Equipe", dans la "Grosse Pomme" (surnom donné par les New-Yorkais à leur ville) et découvre qu'il n'existe pas de plate-forme pour lire les titres de la presse française en ligne.

À son retour, il en parle à son frère, Nathaniel, étudiant à HEC, et à un copain de promo à l'ESCP Europe, Robin Sabban. À l'époque, les 3 compères voient émerger le phénomène des readers (liseuses de livres numériques) et imaginent, avant l'heure, les possibilités de lecture sur tablette. Ils montent rapidement leur SARL avec un capital de départ de 7.500 €. Une étude de marché et des rendez-vous avec des éditeurs leur font réaliser que leur pari n'est pas gagné.

Fin 2007, ils font appel à un ami plus âgé et plus expérimenté, Ari Assuied. Ce diplômé d'un DESS (diplôme d'études supérieures spécialisées, niveau bac+5) d'ingénierie financière à Paris-Dauphine a fait ses armes à la Société Générale et chez Rothschild, avant de travailler à la direction des finances des cosmétiques By Terry. Il les conseille sur le financement et les aide à transformer la société en SAS, dont il devient le président.

Le financement du projet

Les 4 lèvent 600.000 € auprès de leurs familles et de leurs amis. "Réussir à convaincre nos proches était un premier test concluant pour notre projet, confie Michael Philippe. Nous avons ensuite recruté des spécialistes de l'édition pour mieux appréhender le marché et une équipe technique pour faire évoluer le site. Il fallait construire une plate-forme technologique qui serait prête au moment où les tablettes se démocratiseraient."

En 2008, Lekiosk ouvre sur le Web. Il séduit rapidement des niches ciblées : des expatriés, des turfistes... Mais c'est en 2010, avec l'arrivée de l'iPad dans l'Hexagone, que leur application séduit vraiment : 85 % des utilisateurs de Lekiosk sont en effet lecteurs sur la tablette d'Apple. Cette nouvelle expansion permet aux fondateurs de réaliser une 2e levée de fonds de 2,4 millions d'euros auprès des fonds d'investissement Sigma Gestion et Promelys. Ils mettent alors en place un système d'achat au numéro ou par forfait mensuel de 9,99 € pour 10 magazines.

"C'est ce modèle qui a séduit les éditeurs : les exemplaires vendus sont comptabilisés dans les chiffres OJD et contribuent à stabiliser les revenus publicitaires", détaille Ari Assuied. De quoi convaincre Mondadori, Hearst, Condenast ou Groupe Express-Roularta, éditeur de "l'Entreprise", de céder leurs PDF en échange de 40 % du prix de vente. Les diffuseurs, Apple ou Google (Android), et Lekiosk se partageant à parts égales les 60 % restants.

Le business de la start-up a décollé en 2012. L'équipe compte 35 personnes, dont une majorité d'ingénieurs. Lekiosk est disponible en Angleterre depuis juin 2012, et en Italie depuis octobre 2012. En novembre 2012, les 4 cofondateurs ont réalisé une levée de fonds de 5,6 millions d'euros, financée par CM-CIC et la Caisse des dépôts, dans le cadre du Fonds national pour la société numérique. Le chiffre d'affaires prévisionnel 2012 s'élève à 6 millions d'euros.

Les premières galères

Ari Assuied se souvient du chiffre d'affaires de la première année : 18.000 €. "Convaincre les éditeurs de presse a été une gageure. Il y avait une vraie différence de culture d'entreprise : d'un côté, une industrie en perte de vitesse, qui avait besoin de plusieurs mois pour négocier la cession des droits d'auteur avec les syndicats de journalistes et de photographes et pour s'adapter. De l'autre, notre start-up, qui se fixait des objectifs à court terme", se souvient le président.

Les associés se sont armés de patience. Notion qui revient dans leurs discours. "Pendant les 3 années où nous attendions l'arrivée des tablettes, nous étions loin de l'idée originale de notre projet", rappelle Michael. Un conseil ? "Je parle de persévérance aux entrepreneurs qui ne se donnent qu'une année pour y arriver. C'est souvent trop court !"

Après la presse, Lekiosk s'attaque à une autre vieille industrie : l'édition de livres. Depuis janvier 2013, l'entreprise propose une application pour télécharger 4 bandes dessinées au prix de 9,99 € par mois. Associés au GIE Izneo, les 4 associés ont mis en ligne un catalogue d'une centaine de titres. Et comptent s'imposer, sans précipitation, sur ce nouveau marché.

À la loupe

– Activité : kiosque à journaux numérique. 
– Lancement : 2007. 
– Capital social : 250.000 euros. 
– Effectifs : 35 salariés. 
– Chiffre d'affaires prévisionnel 2012 : 6 millions d'euros.

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