Portrait

Travailler avec des robots, c'est comment ?

Yohann, technicien-mécanicien chez Renault, intervient sur des robots industriels.
Yohann, technicien-mécanicien chez Renault, intervient sur des robots industriels. © Photo fournie par le témoin
Par Catherine de Coppet, publié le 03 mai 2017
1 min

Ils sont de plus en plus nombreux dans le quotidien, et leur impact sur l'évolution du travail fait désormais partie du débat public. Pourtant, les robots d'aujourd'hui sont peu connus ! Nicolas, Pierre et Yohann en côtoient au quotidien pour leurs métiers, que ce soit dans l'automobile, la médecine ou l'agriculture.

Yohann, dans l'automobile : "Les robots sont indispensables pour certaines opérations"

À 34 ans, Yohann supervise la production d'une ligne d'usinage sur le site Renault de Cléon (76). "Mon rôle est de veiller au bon fonctionnement de la ligne, d'assister les opérateurs quand il y a une difficulté." Créée récemment, cette ligne automatisée produit des carters cylindre, la plus grosse pièce des blocs-moteurs des véhicules, à raison de 200 toutes les huit heures. "Les pièces nous arrivent de la fonderie, il faut ensuite les usiner, et s'assurer qu'elles correspondent au cahier des charges. Cela se fait en plusieurs temps."

Autant d'étapes qui nécessitent l'action de plusieurs équipes tournantes d'environ dix personnes, d'une quinzaine de robots, et de plusieurs machines. "Les robots 'ABB six axes', sont capables de bouger la pièce avec précision dans de multiples positions, grâce à un bras articulé, ce que ne peuvent pas faire de simples machines, ni même les opérateurs", explique Yohann.

Avant d'intégrer Renault il y a un an et demi, le technicien n'avait jamais travaillé avec des robots. Après un bac STI électrotechnique et un BTS électrotechnique obtenus dans la région de Rouen, il a passé douze ans comme technicien de maintenance pour des machines de tri postal, très différentes des ABB. "Chez Renault, nous avons des formations en interne, théorique et pratique. Il y a un temps d'adaptation, mais comme l'interface utilisateur est très intuitive, ça se passe bien !" De fait, par rapport à d'autres secteurs d'activité, l'industrie automobile a une longue expérience de la robotique, puisque celle-ci a été introduite dans les usines dès la fin des années 1970 en France...

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Au quotidien, Yohann intervient peu sur les robots, seulement en cas de problème. Programmés via un poste de commande, avec pupitre tactile mobile, ils sont, selon lui, relativement faciles d'utilisation. Installés dans des espaces clos ou grillagés, sur certains îlots de la ligne de production, les robots travaillent à distance des êtres humains. "Ils sont indispensables pour certaines opérations, par leur capacité de précision, et pour la manutention : les carters cylindre font entre 50 et 60 kilos !" À l'heure où la pénibilité du travail commence à être reconnue, l'intérêt de ces mastodontes de technologie n'est plus à démontrer !

Nicolas, agriculteur : "On a augmenté notre production de 10 % à 20 % !"

Nicolas, 33 ans, est à la tête d'une exploitation familiale dans le Vaucluse (84), propriété de sa famille depuis quatre générations. Devenu agriculteur après un bac agricole à la maison familiale et rurale de Lambesc (Bouches-du-Rhône), il cultive principalement des radis, en plein champ et en serre, mais aussi des amandes. A priori, l'univers agricole est rarement associé à la robotique... Et pourtant ! Dès les années 1980, les éleveurs laitiers ont intégré dans leurs exploitations des "robots de traite" pour améliorer leur rendement !

Nicolas a, lui, fait l'acquisition il y a douze ans, d'un robot "de traitement" qu'il utilise dans ses serres, pour appliquer des engrais. "Avant, on aspergeait les serres à pied, avec une lance que l'on tirait à partir d'un réservoir. Pour une serre de 100 mètres de long, cela nécessitait trois personnes et prenait 20 minutes. Une année, nous n'avions pu traiter suffisamment, et plus d'un hectare de radis avait été perdu !"

Les 18.000 € que lui a coûtés le robot, fabriqué par la société FLDI, ont été très vite rentabilisés. "Le robot fonctionne sur un rail en hauteur, et est programmé à l'avance. Il répartit les engrais de façon homogène, et évite aux employés d'entrer dans la serre et de s'exposer aux produits ! On n'est plus gêné par l'humidité du sol comme avant... bref, il y a un gain de temps et de main-d'œuvre et c'est plus efficace. Avec les mêmes semis, on a augmenté notre production de 10 % à 20 % !"

Pour autant, l'introduction du robot n'a pas eu comme conséquence une diminution des emplois. "J'ai affecté le personnel à d'autres tâches, nous avons développé notre production !" La satisfaction a poussé Nicolas à demander à la société FLDI de lui fabriquer un robot sur mesure pour améliorer la récolte des amandes. "C'est une sorte de parapluie inversé avec une grande capacité, ça me dégage beaucoup de temps ! Comme le robot de serre, toutes les pièces sont faciles à remplacer, et peu chères !" De petites révolutions dont Nicolas et sa famille se réjouissent. "Mon grand-père n'imaginait pas tout ça, mais il en est heureux !"

Pierre, infirmier de bloc opératoire : "Notre rôle est de placer les instruments sur les bras du robot"

Après un bac S passé à Saint-Avold (Moselle), Pierre a suivi une formation pour devenir infirmier, à la Croix Rouge de Metz. Travaillant au bloc opératoire des Hôpitaux privés de Metz depuis quatre ans, il est devenu à 29 ans "référent robot", depuis l'arrivée du robot Da Vinci dans son établissement, il y a deux ans. "C'est un robot d'assistance au chirurgien, fabriqué par une entreprise américaine, explique-t-il, j'avais une petite appréhension, mais la technologie m'intéressait beaucoup !" Pierre décide du coup de se proposer comme référent, et bénéficie à ce titre d'une formation. "Mon rôle est d'assurer que le projet robotique se passe bien, de commander les éventuelles pièces de rechange, et de former mes collègues au travail avec le robot !"

Le système robotique Da Vinci assiste le chirurgien lors de l'opération.

Concrètement, le Da Vinci permet une meilleure précision des gestes chirurgicaux. Il se compose de trois parties : une "console", d'où le chirurgien pilote l'opération, un "chariot patient", qui consiste en un pilier avec quatre bras articulés, et une tour informatique. "Le chirurgien ne travaille plus au-dessus du patient, mais les infirmiers, oui, explique Pierre, notre rôle est de placer les instruments sur les bras du robot, au fur et à mesure de l'opération. Le chirurgien voit ce qu'il se passe à l'intérieur du corps, directement depuis l'écran de sa console."

Les bras articulés du robot permettent de faire des gestes avec une amplitude de rotation et une précision impossibles pour un poignet humain ! "Pour les opérations longues, c'est un vrai confort pour le médecin", ajoute Pierre. "La machine est fiable, et en cas de souci, le fabricant peut intervenir rapidement, car le robot est connecté en permanence." Aucune réduction de personnel n'a été provoquée par la mise en place du robot. "Pour une opération, on est toujours environ six professionnels au bloc", commente Pierre.

Aujourd'hui, les Hôpitaux privés de Metz utilisent le Da Vinci pour de la chirurgie urologique, thoracique ou digestive, la plupart du temps pour des opérations en coelioscopie (avec des pinces et des caméras insérées), au rythme de 15 à 20 opérations par mois. "Certains patients nous demandent maintenant si l'intervention se fera avec le robot, ça les rassure !" Au risque de les décevoir, il faut savoir que le robot n'est pas une intelligence artificielle, il ne prend strictement aucune décision...!

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