Décryptage

Insertion pro : génération "paradoxe", vous êtes plus précaires mais plus optimistes

Même sans emploi ou en emploi à durée limitée les jeunes débutants sur le marché du travail sont moins inquiets que leurs aînés pour leur avenir professionnel.
Même sans emploi ou en emploi à durée limitée les jeunes débutants sur le marché du travail sont moins inquiets que leurs aînés pour leur avenir professionnel. © plainpicture/Cavan Images
Par Étienne Gless, publié le 10 avril 2018
6 min

CDD, intérim, temps partiel... Pour la jeune génération, l'entrée sur le marché du travail se paie par davantage de précarité. Mais les jeunes se disent moins inquiets que leurs aînés quant à leur avenir professionnel et estiment à près de 90 % se réaliser au travail.

Il n'a jamais été facile de débuter dans la vie active, et la situation ne s'est pas améliorée pour les jeunes arrivés sur le marché du travail à partir de 2010. Pourtant, ceux-ci se montrent moins inquiets que leurs aînés quant à leur avenir professionnel.

L'INSEE, avec d'autres services statistiques de l’État, a mouliné quantité de données et comparé les formations et l'insertion dans le monde du travail de plusieurs générations. Publiée le 10 avril 2018, la dernière livraison de l'enquête "Formations et emploi - édition 2018" aboutit à ce constat étonnant : une insertion plus difficile mais des jeunes plus satisfaits de leur sort qu'auparavant.

La moitié des jeunes en sous-emploi ou en emploi à durée limitée

L'enquête s'est intéressée au devenir professionnel des jeunes sortis du système de formation en 2010. Où étaient-ils cinq ans après la fin de leurs études ? Étaient-ils inquiets pour leur avenir professionnel ? En 2016, le taux de chômage s'élève à 19,8 % pour les actifs ayant terminé leurs études initiales depuis un à quatre ans. Ils sont aussi nombreux (6,4 %) à être inactifs mais souhaitant travailler, ce que l'organisme de l'INSEE appelle le "halo autour du chômage".

Par ailleurs, en début de vie active, pour ceux qui ont un emploi, les caractéristiques de ce dernier sont moins favorables qu'avant : 10,4 % des jeunes ont un temps partiel subi et 35,5 % d'entre eux ont un emploi à durée limitée (CDD, intérim ou apprentissage). Les débutants acceptent aussi un salaire moins élevé : le salaire net médian s'élève à 1.390 € par mois .

Origines sociales et niveaux de diplômes toujours plus discriminants

Selon votre niveau de diplôme, les écarts de situation sur le marché du travail seront davantage marqués en début de vie active. "Les jeunes actifs titulaires au plus du brevet sont particulièrement touchés", relève l’INSEE. En 2016, de un à quatre ans après la fin de leurs études, 52,4 % de celles et ceux qui n'ont pour tout bagage que le DNB (diplôme national du brevet) sont au chômage. De leur côté, les diplômés de l'enseignement supérieur ne sont que 11 %. Les études supérieures protègent donc toujours davantage.

À noter : si la qualité de l'insertion professionnelle dépend toujours plus du niveau de diplôme, les origines sociales pèsent encore lourd. Toujours plus d'enfants d'ouvriers et d'employés sont au chômage cinq ans après la fin de leurs études : ils sont 26 % contre 12 % pour les enfants de cadres pour la génération 2010. Ils étaient respectivement 21 % et 13 % pour la génération 1992.

Mais désormais, votre insertion professionnelle dépendra davantage d'autres caractéristiques de votre parcours d'études : filières, voies sélectives, spécialités, qualité des stages, etc.

Plus précaires mais plus confiants en l'avenir

"En 20 ans, les parcours d'insertion se sont dégradés mais les jeunes se montrent moins inquiets pour leur avenir professionnel que dans les années 1990", constate Virginie Mora, chargée d'études au CEREQ. En effet, la part des jeunes qui ne sont ni en emploi, ni en formation cinq ans après la fin des études – les fameux "NEET" (Not in Education, Employment or Training) – n'a fait qu'augmenter pour atteindre près de 20 % d'une génération.

Pourtant, "si l'insertion des débutants est devenue objectivement plus difficile, les opinions subjectives des jeunes à propos de leur parcours d'insertion, de leur situation professionnelle ou de leur avenir se sont en revanche nettement améliorées", poursuit Virginie Mora. Au moment de l'enquête de l'INSEE, en 2015, seuls 23 % des jeunes de cette génération se disaient inquiets contre 37 % pour la génération précédente interrogée. Un optimisme constaté même chez les jeunes sans emploi ou en contrat précaire, relève l'institut.
Malgré tous les obstacles, la jeune génération estime à 88 % qu'elle se "réalise professionnellement plutôt ou tout à fait". Ils n'étaient que 66 % auparavant. Même le sentiment de déclassement a reflué : 25 % s'estiment utilisés "en dessous de leur niveau de compétences" contre 30 % chez leurs aînés. Même sentiment question rémunération : 24 % s'estiment mal payés contre 34 % auparavant.
Face à une dégradation objective de ses conditions d'insertion, la jeune génération accepte son sort. L'essor du chômage et des "formes particulières d'emploi" (CDD, intérim, temps partiel, indépendant...), comme les appelle l’INSEE, feraient-ils désormais tellement partie du paysage qu'ils en deviendraient banals ? Autre hypothèse avancée par l'INSEE : la jeune génération apprend à vivre dans le court terme, "en migrant sans cesse d'une tâche, d'un emploi ou d'un lieu de travail à l'autre tout en étant capable de laisser filer le passé". Une génération "agile" en somme.
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