Décryptage

Entretien d'embauche : zoom sur l'arsenal de questions des recruteurs

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Détendez-vous : placer le candidat dans une situation de stress, comme on le faisait dans les années 1980, n'est plus de mise aujourd'hui. © plainpicture/Caiaimages/Paul Bradbury
Par Dominique Perez, publié le 16 septembre 2016
1 min

Lors de l'entretien, votre interlocuteur alterne des questions ouvertes, vous laissant vous exprimer, des questions “fermées” sur des points précis et des questions d'approfondissement, dont certaines sont destinées à vous pousser dans vos retranchements. Les précisions de la spécialiste du recrutement Dominique Perez, extraites de son “Guide du CV, de la lettre de motivation et de l'entretien d'embauche”.

Les questions ouvertes, pour vous faire parler

Après avoir présenté le poste et l'entreprise, surtout si vous avez été “chassé”, ou bien d'entrée de jeu, le recruteur peut souhaiter vous faire parler en vous posant une question ouverte. Certains continuent de mobiliser ce type d'accroche : “Parlez-moi de vous” ou “Racontez-moi votre parcours”. C'est à vous de jouer, vous pouvez retracer les grands axes de votre vie professionnelle, comme vous vous êtes entraîné à le faire.

Le recruteur évalue votre facilité d'élocution, votre capacité d'adaptation, le soin que vous avez apporté à la préparation de l'entretien, mais aussi votre spontanéité. Si vous sentez que son attention diminue, voire s'il montre des signes d'impatience, n'hésitez pas à lui demander de préciser ses attentes : “Souhaitez-vous que je développe plutôt tel ou tel aspect de mon parcours ?”

Les questions fermées, pour éclaircir des points précis

Les questions fermées appellent en général des réponses courtes et structurées. Elles peuvent être utilisées pour avoir des précisions classiques sur votre situation, dans votre emploi par exemple (“Quand serez-vous disponible ?”, ce qui appelle juste une date), ou parfois pour vous déstabiliser, pour que vous finissiez par dire la vérité sur un élément que veut vérifier le recruteur. Elles peuvent alors se répéter, parfois reformulées.

Le recruteur utilise la question fermée soit en début d'entretien, pour valider des éléments d'état civil par exemple, soit au cours de l'entretien, en les enchaînant rapidement pour essayer de voir si vous allez au bout de votre propos sans avoir le temps de réfléchir. Le rythme des questions peut alors être rapide. Même si la règle générale est de répondre aussi rapidement, n'hésitez pas à développer un peu si vous sentez que le recruteur veut être certain d'un fait. Par exemple, s'il vous demande : “Et vous avez choisi de changer d'orientation ?”, répondez en expliquant pourquoi vous avez pris cette décision, plutôt que de vous limiter à un “oui” ou un “non”.

La méthode STAR, mode d'emploi

La méthode STAR est utilisée par certains recruteurs pour poser des questions sur l'expérience professionnelle du candidat et afin d'être certain de ne rien oublier. Vous pouvez l'utiliser comme mémo pour préparer votre entretien.

S : situation et contexte
Dans quel contexte s'intégrait mon projet ou mon expérience ?
Comment était constituée l'équipe ? Quelle était l'organisation de la société, du service ?
Quelles étaient les missions assumées par le groupe, les objectifs à atteindre ?

T : tâches et responsabilités
Quelles étaient mes propres missions dans ce projet ?
De quels aspects étais-je personnellement responsable ?
Quelles contributions attendait-on de moi ?

A : actions
Quelles actions ai-je mises en place pour atteindre les objectifs ?
Sur quels points ai-je travaillé seul et sur quels autres en équipe ?
À quelles compétences ai-je fait appel ?
Quelles décisions ai-je prises ? Quelle était la part de risque ?

R : résultats
Quels ont été les résultats de mon action ?
Ai-je atteint mes objectifs ?

R : réflexion et recul
Quels sont les points faibles sur lesquels je dois travailler ?
Que m'a apporté cette expérience ?
Comment aurais-je pu mieux faire ?

Les questions d'approfondissement, pour creuser les éléments qui lui semblent flous

L'entretien est l'occasion de mieux vous connaître, il est légitime que le recruteur souhaite creuser les éléments de votre parcours. Un trou sur votre CV, une tentative maladroite de noyer le poisson ? Il va souhaiter en savoir plus, notamment pour tester votre honnêteté.

Mais lors de l'entretien même, c'est parfois vous qui, en mettant la puce à l'oreille de votre interlocuteur, allez appeler une question d'approfondissement. Par exemple, vous expliquez l'une de vos transitions professionnelles : “On m'a alors proposé un poste de manager à Toulouse, mais j'ai préféré poursuivre le projet que j'avais commencé à Paris…” ou bien “Je suis en attente aujourd'hui dans mon travail et j'ai eu envie de voir ailleurs…”. Dans le premier cas, le recruteur peut légitimement se demander si vous êtes vraiment prêt à être mobile : derrière votre conscience professionnelle affichée se “cache” peut-être la volonté de rester près de votre famille, ce qui peut être un élément important si le poste proposé suppose justement une mobilité. Dans le second cas, le recruteur peut penser que vous voulez juste tester votre employabilité sans avoir vraiment l'intention de changer d'entreprise, ou alors à des conditions exceptionnelles.

Le recruteur ne va pas toujours vous interrompre pour vous poser une question, il peut la noter et approfondir plus tard. Mais il peut aussi commencer par ce type d'interrogation, car il estime que les réponses sont fondamentales pour que vous puissiez être sélectionné.

Tâchez d'être le plus naturel possible ; si vous êtes gêné, le recruteur va le sentir immédiatement. Écoutez bien la question précise qu'il vous pose et ne l'interprétez pas à votre guise.

Vous pouvez aussi anticiper en analysant avant l'entretien les éléments qu'il risque de creuser, pour éviter d'être pris au dépourvu. En disant par exemple : “Vous avez peut-être été surpris de voir que mon expérience chez [nom de l'entreprise] a été de très courte durée, je peux vous en expliquer la raison…”

Les questions d'opinion, pour évaluer votre capacité à décider

Elles peuvent être classées dans les questions ouvertes, car elles ont pour but de laisser libre cours à votre expression, mais elles sont là avant tout pour tester votre capacité à émettre un avis sur un fait, sur votre futur employeur, les produits de l'entreprise… et pour vérifier que vous êtes capable de prendre une décision.

Exemple : vous expliquez, ou vous laissez supposer, que votre manager a pris une décision avec laquelle vous étiez en désaccord. Le recruteur peut alors vous demander : “Et qu'auriez-vous fait à sa place ?” Autre exemple : vous expliquez l'évolution d'une politique d'entreprise qui a décidé d'augmenter la part variable de la rémunération des commerciaux. Le recruteur peut alors vous demander : “Pensez-vous que cela soit une bonne chose pour motiver l'équipe ?”

Répondez franchement, mais sans vivacité : pesez le pour et le contre, donnez par exemple des résultats de cette politique et concluez : “À mon avis, cela a été positif [ou non], parce que…”

Autre type de questions par l'intermédiaire desquelles il peut vous demander votre avis : les questions dites “d'alternative”, qui commencent en général par “Préférez-vous” (un management par projet, travailler en production ou en recherche…).

Ces questions servent également à “creuser” un élément de votre parcours, surtout si le recruteur sent que vous avez été en difficulté à un moment de votre expérience professionnelle. Si vous souhaitez occuper un poste d'encadrement, il souhaite savoir par ce type de questions si vous êtes capable de prendre une décision, d'avoir un avis, d'analyser une situation, de prendre du recul et d'apprendre de vos échecs. Dans ces cas-là, il est très important de répondre en votre nom et d'exprimer un point de vue personnel : évitez les formulations convenues comme “On peut penser que…”.

La mise en situation, une des “cartes” du recruteur

“Vendez-moi ce stylo…” Le recruteur vous tend un objet présent sur son bureau et vous demande d'improviser un argumentaire pour qu'il ait envie de l'acheter. Très déstabilisante, cette technique de mise en situation n'est pas très courante, mais vous pouvez y être confronté si vous postulez à un emploi de commercial, notamment. On peut aussi vous demander de simuler un entretien téléphonique avec un prospect par exemple, pour analyser l'argumentaire employé, voir si vous êtes totalement à l'aise… Prévoyez cette éventualité en préparant votre entretien d'embauche, en vous imaginant dans une situation professionnelle en relation avec votre métier, pour ne pas être désarçonné le jour J.

Cette technique peut aussi être utilisée pour tester vos capacités de réaction face à une situation gênante : si, par exemple, vous devez “recadrer” un membre de votre équipe ou faire part à votre direction d'un dysfonctionnement dans le service…

Certaines entreprises considèrent plutôt cet exercice comme un test, réalisé par exemple à l'occasion d'un entretien de groupe. L'un des candidats peut alors endosser le rôle du client.

Prenez le temps de réfléchir avant de vous lancer dans la simulation, quitte à laisser un peu de silence s'instaurer. Et une fois que celle-ci est terminée, vous pouvez également analyser ou reconnaître vous-même un moment peu convaincant de votre intervention.

Les questions pièges, pour vous tester

C'est la peur principale des candidats, qui parfois finissent par voir dans chaque questionnement une chausse-trappe dans laquelle ils ont peur de tomber. Pas de paranoïa excessive : le but ultime des recruteurs n'est pas de vous faire entrer dans une impasse, de vous “coincer” à tout prix dans un jeu sadique !

En préparant vous-même les éléments de votre parcours, professionnel et personnel, qui risquent de soulever des questions, vous aurez déjà limité en grande partie la déstabilisation. Vous avez un trou dans votre CV ? Prévoyez une argumentation qui tient la route, quitte à admettre que vous avez eu une période de chômage, ce qui est tout à fait compréhensible, surtout actuellement.

Vous êtes peu mobile, et le recruteur va vous demander à brûle-pourpoint si vous seriez prêt à accepter un poste à l'autre bout de la France, juste pour vous tester parce que le poste qu'il propose est en réalité près de votre domicile ? Ne fermez pas la porte brutalement avec un “non” catégorique. Vous pouvez répondre par une autre question, comme “L'entreprise a-t-elle de nouveaux projets d'implantation ?”, avant de préciser au besoin que pour des raisons familiales, par exemple, vous préférez pour l'heure ne pas être mobile. Vous pouvez aussi laisser entendre qu'une telle décision devrait de toute façon être prise avec votre conjoint(e).

Comment régir en cas de questions indiscrètes ?

Il peut arriver aussi que le recruteur vous pose des questions personnelles, voire très indiscrètes, qui peuvent même être considérées comme discriminantes. Quand une question ne concerne ni le poste à pourvoir, ni vos compétences, quand vous sentez qu'elle est assez malsaine, à l'extrême par exemple sur vos préférences sexuelles, un divorce, etc., vous avez aussi le droit de ne pas répondre ou de demander à votre interlocuteur en quoi ce type de question est en lien avec le poste convoité.

Vous pouvez aussi légitimement vous interroger sur votre envie d'intégrer une entreprise qui s'intéresse tant à ces aspects de votre personnalité, c'est en général très mauvais signe.

POUR ALLER PLUS LOIN
À découvrir aux Éditions de l'Etudiant :
Le Guide du CV, de la lettre de motivation et de l'entretien d'embauche”,
par Dominique Perez, spécialiste du recrutement.

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