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Six minutes pour séduire

Par Virginie Bertereau, publié le 25 novembre 2008
1 min

Il faut vivre avec son temps… 100 000 entrepreneurs (1) l’a bien compris. vendredi 21 novembre 2008, l’association a organisé son premier speed-dating enseignants-entrepreneurs lors de la Conférence annuelle des entrepreneurs, dans le cadre de la Semaine mondiale de l'entrepreneuriat (2). Le principe ? Prenez trente entrepreneurs – du représentant de grand groupe comme Cisco au jeune indépendant de 25 ans – et trente professeurs, proviseurs ou responsables de mission locale franciliens. Placez-les par couple, en face à face. Donnez-leur six minutes pour faire connaissance, échanger sur leurs expériences et évoquer ce que chacun attend de l’autre au quotidien. Lorsque le chrono s’arrête, intervertissez les duos.

Classe cherche relation sérieuse avec entrepreneur


Au total, chaque invité peut avoir jusqu’à huit rendez-vous. "On prend des contacts. C’est intéressant de rencontrer des entrepreneurs quand on forme des jeunes que l’on va envoyer en stage ou qui vont entrer sur le marché du travail. On peut se rendre compte s’il existe un décalage entre ce qu’ils apprennent et ce qu’ils vont faire", confie Karine Ollisier, professeur de mathématiques et de sciences au lycée Voillaume à Aulnay-sous-Bois (93). Celle-ci est venue en compagnie du proviseur adjoint du lycée et d’Adam, un lycéen en première année de bac pro maintenance d’équipement industriel. Sa classe est parrainée par un entrepreneur, Rachid Bechtola, fondateur de 123 Intérim. "Il vient nous voir une fois par mois. Avec lui on a monté un projet : la création d’une entreprise fictive", explique Adam. Ce jour-là, Karine Ollisier compte profiter du speed-dating pour trouver un parrain pour une autre classe. Au bout des six minutes réglementaires, si le courant est passé, la rencontre peut en effet déboucher sur une relation plus poussée avec témoignage de l’entrepreneur dans l’établissement scolaire, visite de l’entreprise, accueil de stagiaires, etc.

Rapprocher les deux mondes


Du côté des dirigeants, les attentes sont également très fortes. "Comme beaucoup de dirigeants, je trouve que les jeunes ont une culture de l’entreprise insuffisante. Ce genre d’exercice permet de rapprocher deux mondes trop éloignés et de valoriser l’image de chef d’entreprise. Quand les jeunes visitent mon entreprise, ils ouvrent de grands yeux. Cela leur change des cours !", raconte Laurent Horwitz, président directeur général du site Companeo.com, à la recherche d’une classe à parrainer. "C’est en bonne voie…, avoue-t-il au bout d’une heure de speed-dating. Mais il faut se recontacter". Six minutes pour conclure, c’est frustrant…

"Vous aimeriez venir témoigner dans mon établissement ?"


A quelques tables de là, Philippe Corrot, directeur de l’entreprise Split Games, spécialisée dans le commerce du jeu vidéo, rencontre la proviseur d’un lycée technologique et professionnel de Seine-et-Marne. L’entretien est d’abord mené par la chef d’établissement. Celle-ci pose des questions à l’entrepreneur sur son entreprise, son nombre de salariés, ses métiers... "C’est vous qui l’avez créée ? Quelles études avez-vous faites ?", interroge-t-elle. Philippe Corrot détaille son parcours scolaire, arrêté au bac. "Vous êtes la preuve que l’on peut créer une entreprise sans diplôme… Vous aimeriez venir témoigner dans mon établissement ? Mes élèves ont besoin de se rendre compte qu’ils peuvent réussir. On cherche comment provoquer chez eux une étincelle", attaque-t-elle d’emblée. Mais Philippe Corrot ne se laisse pas séduire si facilement… Il cherche à faire connaissance. "Quelles filières proposez-vous ?", questionne-t-il. La proviseur répond et relance la discussion. "Quels conseils pouvez-vous donner aux jeunes ? Quels freins importants avez-vous rencontrés ?". Philippe Corrot explique les problèmes de financement, les difficultés pour emprunter à la banque. "Il faut être passionné, aimer son secteur, ce que l’on fait", clame-t-il. Le gong retentit. Les six minutes sont écoulées. "Vous prenez des stagiaires ?", ose alors la proviseur. "Oui, au niveau BTS", répond l’entrepreneur. "Cela tombe bien, nous proposons un BTS en alternance, rétorque-t-elle. Je vous laisse une plaquette du lycée". Philippe Corrot note son nom. Ils se quittent.

On se recontacte ?


Un peu plus tard, en aparté, le chef d’entreprise avouera : "il y a de réels problèmes de contact entre le monde de l’entreprise et de l’éducation. Pendant les rendez-vous, on me demande où trouver des stages, si je prends moi-même des stagiaires ou des jeunes en alternance… Je pense que je me rendrai dans plusieurs classes pour témoigner. En revanche, je ne pourrai me consacrer qu’à une seule s’il y a un vrai travail de suivi à effectuer. Le parrainage demande une vraie implication".
De son côté, la proviseur du lycée, à la recherche de témoignages, a collecté plusieurs cartes de visite. "Même si les choses ne se concrétisent pas avec les entrepreneurs rencontrés, ceux-ci auront peut-être des contacts à me fournir. Nous nous reverrons après le speed-dating…". Voilà une affaire qui marche.


(1) 100 000 entrepreneurs est une association d’intérêt général qui a pour but de rapprocher le monde de l’éducation et le monde de l’entreprise et de transmettre aux jeunes la culture d’entreprendre.
(2) La Semaine mondiale de l'entrepreneuriat s’est déroulée du 17 au 23 novembre 2008.

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