Enquête

Sur les réseaux sociaux, la sous-alimentation des étudiants s'exprime sans fard

La précarité conduit de nombreux étudiants à exprimer leur malaise ou à demander de l'aide sur les réseaux sociaux.
La précarité conduit de nombreux étudiants à exprimer leur malaise ou à demander de l'aide sur les réseaux sociaux. © Facebook/Twitter/Captures d'écran
Par Paul Conge, publié le 26 octobre 2016
1 min

De Facebook à SnapChat, les étudiants déballent tout. Les réseaux sociaux sont devenus le miroir grossissant de leurs galères. Episode 1, le lamento des étudiants qui n'ont pas les moyens de s'alimenter correctement.

"Je ne fais que manger des pâtes depuis des semaines (...). Je n'ai rien d'autre dans mes placards de pauvresse." Ce commentaire, publié le 13 octobre sur Twitter par une jeune Lilloise, n'est qu'une goutte d'eau dans la pluie quotidienne de messages d'étudiants qui ne trouvent pas de solution pour s'alimenter. Sur les réseaux sociaux, ils poussent des cris d'alarme récurrents. Parfois avec beaucoup de désinvolture.

À la Sorbonne :

À Lille :

À Cherbourg :

Lire aussi : Étudiant fauché, comment bien manger ?

Ce 21 septembre 2016, sur un groupe Facebook d'étudiants de Montpellier, un héraultien en licence de physique-chimie en offre une illustration criante : "Ça se passe comment lorsque la notification définitive et la bourse ne sont toujours pas arrivées et qu'on a faim ?..."

Pommes et bananes comme bons coupes-faim

Sur ces petits forums en ligne, les étudiants sont à la recherche d'entraide, de compagnons de misère, mais aussi de réponses réactives. Comme Léo, un étudiant boursier, toujours sur le groupe de Montpellier : "Suis-je le seul à ne pas pouvoir manger le midi ? Sinon, comment faites-vous, chers frères boursiers de la galère ?"

S'y échangent des "bons plans", des messages de soutien et des solutions pour compenser provisoirement la misère : "Perso[nellement] je me faisais un unique repas vers 17 heures, et je prenais toujours de quoi bien déjeuner. Pain de mie, jambon ou blanc de poulet ça coûte pas cher et ça comble la faim. Sinon, tu as les pommes et les bananes comme bons coupe-faim", lâche une internaute. Clément, étudiant en systèmes électroniques, glisse avec une pointe d'ironie : "Pâtes et riz, viande en option le premier jour de bourse."

D'autres se rabattent sur le système D. Des légumes congelés à 80 centimes chez Leader Price, des pâtes instantanées à 60 centimes le paquet... Et pour contrer la fadeur des pâtes et du riz ? "Les épices ça sauve quand t'en as marre de manger la même chose", lance une autre.

Le problème n'est pas cloisonné à quelques cas isolés. En 2011, une étude CSA soulignait ainsi qu'un étudiant sur cinq ne prend que deux repas par jour, ou moins. D'après une enquête de l'USEM de 2015, ce sont cette fois entre 10 et 15 % des étudiants qui se privent volontairement, car ils sont fauchés.


Des statistiques à rapprocher de l'augmentation du coût de la vie étudiante. Selon le syndicat UNEF, elle a crû de 1,23 % à la rentrée 2016, dans la continuité des années précédentes. Avec pour premiers coupables la hausse des charges locatives et des frais obligatoires. Chez les étudiants, l'alimentation représente en moyenne 22 % du budget. Le logement, 55 %.

Faute d'aides suffisantes de leurs parents, 73 % des étudiants travaillent pour financer leurs études, et 68 % le font même tout au long de l'année. À l'inverse, sept jeunes sur dix reçoivent toutefois des apports financiers de leurs parents. 

Pour boucler les fins de mois, les petits jobs étudiants sont devenus monnaie courante. Sur un groupe bordelais, un étudiant en informatique va jusqu'à capitaliser sur ses compétences. Il propose de réaliser des sites web contre rémunération afin de pouvoir "manger autre chose que des pâtes" :

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Quelles solutions ?

Pour y remédier, il existe des aides d'urgence et sans délai aux étudiants en détresse financière : tickets pour restau U, recharges du Pass Moneo, et même des remises d'espèces. Pour cela, il faut solliciter au Crous l'assistant du service social en charge de son secteur d'étude. Outre l'aide alimentaire, elle leur permet aussi d'empocher des versements ponctuels qui peuvent grimper jusqu'à 1.665 € sans toutefois dépasser un plafond de 3.300 € par an.

Citons aussi les bourses de l'Éducation nationale et les aides des collectivités au niveau des conseils régionaux, départementaux ou des mairies, des aides que les étudiants n'ont pas toujours à l'esprit. Restent aussi les restaurants universitaires, où les prix du repas gravitent autour de 3,25 €. Toujours moins qu'en supermarché.

Lire aussi : Episode 2 : "Gouffre à temps libre", "enfer"... Quand les étudiants taclent leur administration sur les réseaux sociaux

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