Décryptage

Faire rédiger vos devoirs par bonnenote.fr : bon plan ou pas ?

sieste étudiants
Bonnenote.fr vous propose d'avoir de bonnes notes sans travailler... mais en payant. © plainpicture/Design Pics
Par Erwin Canard, publié le 16 février 2017
1 min

Que quelqu'un fasse vos devoirs à votre place : vous en avez rêvé, le site bonnenote.fr l'a fait. Toutefois, sachez qu'il vous faudra payer, que cela ne vous aidera pas à apprendre et que cela peut être de la triche !

Imaginez : votre prof de philosophie vous donne une dissertation à faire chez vous : "Savons-nous toujours ce que nous désirons ?". Vous n'êtes pas inspiré et n'avez pas envie de vous y mettre. Le site bonnenote.fr, ouvert en décembre 2016, vous propose de la faire à votre place. "Du collège au master, nous avons plus de 100 matières disponibles et plus de 200 rédacteurs, qui sont des enseignants en lycée, en université, à la retraite, ou encore des tuteurs qui donnent des cours particuliers", précise Victor Der Megreditchian, 24 ans, fondateur de la start-up installé à Londres. Il est possible de demander des devoirs de 20 types différents : rédactions, étude de cas, etc.

De 10 € à plus de 100 € la copie

Le service n'est pas gratuit. Trois facteurs déterminent le tarif de votre commande : votre classe (le prix est de plus en plus élevé du collège au master), le délai sous lequel vous voulez recevoir votre copie (de un à 30 jours, plus le délai est court, plus c'est cher) et le nombre de pages demandées (plus il y en a, plus c'est cher).

Deux exemples : vous êtes en 4e et vous souhaitez une copie de deux pages dans une semaine. Le tarif est de 17,6 €. Si vous êtes en première année de licence et vous souhaitez cinq pages dès le lendemain, la note monte à 100 €… "Le principe est intéressant, mais c'est un peu cher pour ce que c'est", estime Maeva, en 3e à Beausset (83). "C'est cher et, surtout, il faut être sûr d'obtenir une bonne note au bout du compte", renchérit Romain, également en 3e.

Or, rien n'est certain... "Le Parisien" a fait le test en demandant une dissertation de philosophie. En la faisant corriger par un enseignant, la copie a obtenu la note de... 8/20. "Mais la majorité de nos clients sont satisfaits, rétorque Victor Der Megreditchian. Lorsque vous commandez un travail, vous devez noter le correcteur ensuite. Actuellement, la moyenne est de 4,2/5. Et nous faisons le maximum pour améliorer nos services tous les jours."

Pas le droit d'utiliser la copie

En outre, vous n'êtes pas censé utiliser telle quelle la copie que le site vous a envoyée. "Les étudiants peuvent s'en inspirer, regarder les sources utilisées par le rédacteur, et même dialoguer avec lui puisque nous les mettons en relation. Mais ils n'ont pas le droit de l'utiliser." "Si le jeune commande une copie dans les 24 heures, c'est bien pour l'utiliser comme elle est, souligne Valérie Piau, avocate et auteur du "Guide Piau, les droits des élèves et des parents d’élèves". Mais s'il utilise le site de la sorte, il s'expose à des sanctions disciplinaires de son établissement, allant du zéro à l'exclusion. À partir du moment où vous payez un tiers pour faire vos devoirs, c'est de la triche." "Le site peut être pratique si je n'ai pas le temps de faire un devoir. Mais si celui-ci est noté, je n'y aurais pas recours car cela reviendrait à tricher", avoue également Nicola, en terminale S à Boissy-Saint-Léger (94).

Échouer pour progresser

De toutes les façons, "cela se voit quand le travail n'est pas de l'élève", assure Claire Guéville, enseignante d'histoire-géographie en lycée et représentante du SNES, le principal syndicat enseignant du second degré.

Surtout, c'est la question des apprentissages qui pose problème. "Il faut faire le travail par soi-même, car c'est en échouant qu'on progresse !", s'insurge Valérie Marty, présidente de la PEEP, une fédération de parents d'élèves. "Demander un devoir tout fait ne sert à rien, acquiesce Claire Guéville. Avec les devoirs à la maison, l'élève apprend à construire une démarche de réflexion car ils ne consistent pas en une restitution des connaissances, mais insistent sur la manière de faire."

La tentation du site

Malgré tout ce bon sens, certains élèves seraient prêts à utiliser le site. "Cela peut nous aider à voir ce que le prof attendait de nous et à avoir une bonne note", estime Maeva. "Je trouve l'idée de cet outil génial même si, au moment du bac, on ne pourra pas l'utiliser et qu'il faut quand même s'entraîner !", indique Romain.

En 2009, un site Internet similaire, faismesdevoirs.com, avait tenté une percée en France. Face au tollé général, son fondateur, un jeune diplômé d'école de commerce, avait dû le fermer aussitôt. Xavier Darcos, le ministre de l’Éducation nationale de l'époque, s'était élevé contre "les pratiques mercantiles qui, sous prétexte de venir en aide aux élèves, tendent en réalité à accroître les contrastes sociaux et prétendent réserver la réussite scolaire à ceux-là seuls qui ont les moyens de la financer". À ce jour, le ministère actuel n'a pas réagi à l'ouverture de Bonnenote.fr.

Le site va-t-il perdurer ? En 2009, le fondateur de faismesdevoirs.com s'était finalement excusé et avait déclaré : "Les nouvelles technologies doivent servir à nous améliorer et non à nous assister".

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