Portrait

Lycéenne et rédactrice en chef : "Je suis en charge du journal de A à Z"

Lycéenne et rédactrice en chef
Anna (au centre) est en terminale S au lycée Édouard-Branly, à Nogent-sur-Marne, et s'occupe de la rédaction en chef du journal de son établissement. © Simon Lambert /Kaïros pour l'Etudiant
Par Propos recueillis par Maria Poblete, publié le 10 mai 2016
1 min

Animer les conférences de rédaction, écrire des articles, en commander, distribuer le journal du lycée… Anna est à la fois corédactrice en chef et directrice de la publication "l’Inébranlable", dont elle supervise chaque numéro. Témoignage d'une passionnée.

"Quand je suis arrivée au lycée en seconde, 'l’Inébranlable' existait déjà depuis plusieurs années. J’ai découvert le journal dès la rentrée des classes. L’équipe de l’époque était passée dans toutes les salles. Elle en avait fait la promotion en distribuant des exemplaires et en donnant leurs coordonnées. J’ai trouvé la publication super-intéressante, avec des styles d’articles différents, des rubriques sérieuses sur l’actualité et d’autres plus légères, des dessins pour se détendre.


J’ai tout de suite été tentée. Et j’ai franchi le pas. J’ai commencé par participer aux conférences de rédaction. Puis ma 'carrière' de journaliste – entre guillemets – a débuté. Au départ, j’étais un peu intimidée, j’avais peur de ne pas écrire assez bien. Alors j’ai d’abord rédigé des articles courts, de quelques lignes seulement, puis j’ai fait des critiques de films et de livres, et, enfin, je me suis mise aux papiers plus longs."

"Ce qui me plaît, c’est écrire et participer à la vie de mon lycée"

"Les premières fois, je n’étais pas très à l’aise. Je trouvais impressionnant de publier dans un journal. Il faut oser quand même ! Ce n’est pas rien, je pensais que tout le monde allait lire, peut-être même juger mes écrits et avoir un avis sur mes articles… Cela m’intimidait un peu. Puis finalement, je me suis lancée et je me suis prise au jeu.

Plus j’écrivais, plus j’étais à l’aise. Je dis ça mais je ne veux pas qu’on interprète mal mes propos. Je ne me sens absolument pas au-dessus des autres. Ce qui me plaît, c’est écrire et surtout participer à la vie de mon lycée. Un journal lycéen, c’est un engagement, beaucoup de temps, de l’investissement, c’est prendre une place dans la vie citoyenne et donner son point de vue, sa vision du monde et de la société."

"Nous sommes deux rédactrices en chef, c’est plus confortable"

"À la fin de la seconde, je faisais partie des rédacteurs les plus investis. J’allais à toutes les conférences de rédaction (une par numéro), je distribuais le journal, je m’impliquais en donnant des idées d’articles. Puis est venu le moment, à la fin de l’année, pour la précédente directrice d’arrêter, car elle passait… son bac ! J’ai postulé assez naturellement, puisque j’avais beaucoup suivi la publication. Je suis donc devenue à la fois directrice de publication et corédactrice en chef. Nous sommes deux rédactrices en chef, c’est plus confortable parce que le journal peut être, par moment, assez chronophage.

Lycéenne et rédactrice en chefAnna (à gauche) et Louise, les deux rédactrices en chef (assises sur la table), animent la conférence de rédaction. Les rédacteurs proposent des idées d’articles. // © Simon Lambert / Kaïros pour L'Étudiant

Diriger un journal lycéen, c’est une responsabilité. Le directeur de publication doit pouvoir répondre – devant la justice même ! – de ce qui y figure. Évidemment, il y a une liberté d’expression totale et c’est appréciable. On écrit ce qu’on veut, on dit ce qui nous semble important et pertinent pour notre lectorat : la communauté éducative de notre lycée. Mais bien entendu, la diffamation, l’atteinte à la vie privée et le prosélytisme sont interdits. J’ai appris quelques notions en droit de la presse. Je sais ce qui est possible et ce qui ne l’est pas. Je veille, c’est mon rôle."

"J’apprends énormément, car je suis en charge du journal de A à Z"

"Concrètement, on se réunit en conférence de rédaction une fois par mois pour lancer le nouveau numéro. Nous sommes une vingtaine d’élèves. Avec Louise, ma corédactrice en chef, nous animons la réunion. Chaque rédacteur présente ses idées. Nous avons devant nous le chemin de fer [déroulé de tout le journal] en blanc, c’est une sorte de maquette vide. Sur chacune des 24 pages, nous inscrivons le titre provisoire et le prénom du rédacteur.

Anna (à gauche) et Louise regardent sur l’écran la dernière mise en pages du journal avant parution.Anna (à droite) et Louise regardent sur l’écran la dernière mise en pages du journal avant parution. // © Simon Lambert / Kaïros pour L'Étudiant

Je n’impose aucun sujet ! Certes, il y a des thèmes incontournables. On ne pouvait pas ne pas parler des attentats ! On a concocté un numéro spécial. Même quand il s’agit d’une actualité brûlante, on cherche des angles originaux. Dans ce numéro, quelqu’un a retracé l’histoire du Bataclan. Pour les dessins, c’est pareil : chaque dessinatrice – il n’y a pas de garçon ! – fait ce qui lui plaît. J’apprends énormément, car je suis en charge de la création d’un projet de A à Z : animer une réunion, relire des textes et "bidouiller" une mise en page."

"Il faut s’occuper du journal un peu tout le temps"

"J’apprends aussi à organiser mon temps de travail. Outre la conférence de rédaction mensuelle, il faut recaler et recadrer les sujets avec chacun, puis relire les textes, les corriger, les maquetter et les imprimer. L’impression se fait à l’administration du lycée. On photocopie, on agrafe et on distribue à tout le monde. Le journal ne me prend pas un temps fixe chaque semaine. Mais il y a des périodes chargées ; la maquette s’étale sur 10 jours par exemple, dont 2 mercredis après-midi. Surtout, il faut penser à tout : répondre aux mails, rappeler un professeur – parfois, on a besoin d’eux pour évoquer une réunion –, écrire l’édito, poster une info sur le groupe Internet de rédaction.

L’administration du lycée se transforme en mini-imprimerie. Anna (à droite) et Louise photocopient le journal, le plient et l’agrafent avant de le distribuer. // © Simon Lambert /Kaïros pour l'Etudiant

Je dirais qu’il faut s’occuper du journal un peu tout le temps, mentalement aussi. Je m’organise : je sais que si j’ai tel devoir à rendre, je travaillerai sur le journal avant ou après. J’ai les plannings dans ma tête, sur une semaine, un mois. Je me fais des listes de tâches et j’ai une bonne mémoire ! C’est une super-expérience ! J’ai rencontré de nombreuses personnes : Louise, la corédactrice en chef, les rédacteurs, des personnes extérieures. J’adore gérer un projet."

"J’ai pris de bonnes habitudes de travail, entre le journal et les cours"

"Je fais aussi partie d’une association qui se bat pour la liberté d’expression et le droit des jeunes citoyens. On a des revendications. Nous sommes des lycéens mais nous voulons nous faire entendre. Je suis fière de ce que je fais. Je ne sais pas encore si j’en tirerai quelque chose scolairement parlant. Ce n’est pas parce que j’écris et que je suis rédactrice en chef d’un journal que je ferai de meilleures rédactions ! Je commence à savoir relire un texte et je sais ce que signifie la censure. Cela fait partie d’une culture personnelle et générale.

Côté scolaire, je dirais que ça m’aide dans le sens où j’ai pris de bonnes habitudes de travail et trouvé un rythme entre le journal et les cours. Bien sûr, je sais que cette expérience va m’apporter beaucoup. Par exemple, dans les lettres de motivation et sur les CV, c’est un atout. On sait que les écoles sont intéressées par des profils atypiques. Dans un dossier d’inscription, avoir dirigé un journal et s’être engagé dans une association peuvent servir. Mais je ne le fais pas pour ça ! D’ailleurs, j’ai d’autres centres d’intérêt. Je fais de la danse 7 heures par semaine et je vais au conservatoire 3 fois par semaine. Entre le bac, le journal et la danse, on ne peut pas dire que j’ai le temps de m’ennuyer !"

Créer son journal au lycée, mode d’emploi

Tout lycéen a le droit de créer son journal, même sans autorisation de la direction de l’établissement. Un texte dérogatoire datant de 2010 le stipule. Le directeur de publication, même mineur, est responsable du contenu.
Un kit de création d’un journal est disponible auprès de l’association Jets d’encre, qui organise, les 4 et 5 juin 2016 à Paris, le Festival expresso, une rencontre nationale de la presse jeune. Pour y participer, inscrivez-vous sur le site avant le 15 mai. 
Le Clemi (centre de liaison de l’enseignement et des médias d’information) est une structure incontournable. Il organise, chaque année, la Semaine de la presse à l’école et anime des concours d’écriture d’articles, de journaux.

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