Portrait

Lena, 24 ans : comment je suis devenue agricultrice

Lena 24 ans éleveuse de chevaux de traits en Haute Vienne reprend l'exploitation familiale et concours pour la première fois au salon de l'agriculture et y présente Emir du jeunet, un percheron.
Lena travaille sur l'exploitation de ses parents, qu'elle reprendra dans quelques années. © Etienne Gless
Par Étienne Gless, publié le 26 février 2018
6 min

L'Etudiant a rencontré Lena, éleveuse de chevaux de trait en Haute-Vienne, dans les allées du Salon international de l'agriculture qui se déroule jusqu'au 4 mars 2018 à Paris, porte de Versailles. Elle participe pour la première fois au concours équin.

"À l'âge de 16 ans j'ai commencé mon élevage de percherons. Mes parents, agriculteurs, avaient des vaches. Je me suis installée avec eux". Dans le Limousin, dans le nord de la Haute-Vienne (87), à Dinsac, Lena élève des chevaux de trait sur l'exploitation familiale : "8 poulinières et un étalon. 5 à 6 poulains naissent chaque année. Par ailleurs, nous avons 120 vaches et 7 taureaux".

Cette passion pour le cheval de trait lui vient de loin : "Dans ma famille il y a toujours eu des chevaux de selle. Notre voisin avait deux percherons. Je travaillais avec l'un d'eux pour faire le jardin. J'aime bien leur caractère : très calme, à sang froid, puissant et qui travaille super bien !"

Se former dans un lycée spécialisé

Lena a étudié au lycée privé d'enseignement agricole Saint-Cyran-du-Jambot, dans l'Indre (36), un établissement spécialisé dans les métiers du cheval. "J'y ai passé quatre ans pour préparer un bac pro CGEA (conduite et gestion d'une exploitation agricole) . J'ai aussi découvert la valorisation d'un jeune cheval, autrement dit l'apprentissage du dressage."

La première jument acquise par Lena était suitée, c'est-à-dire qu'elle avait déjà un petit poulain de 3 mois qu'elle élevait. "J'ai d'abord appris à faire un poulinage, c'est l'action de mettre bas une jument. C'est seulement quand j'ai su donner naissance à un poulain en toute sécurité que j'ai acheté un étalon", se rappelle la jeune agricultrice.

Diversifier les expériences

Après son bac pro, Lena passe un diplôme de moniteur équestre pour élargir ses compétences : "J'ai appris à atteler un cheval à une voiture en toute sécurité, à dresser un cheval en attelage… Aujourd'hui, je donne des cours à des personnes expérimentées comme à de simples novices".
Lena a mis en pratique ses nouveaux savoir-faire à l'occasion d'une expérience professionnelle effectuée dans le domaine du tourisme équestre. Dans l'Aveyron, elle a travaillé auprès de loueurs de roulottes à la semaine : "Je devais apprendre aux clients à atteler le matin et à dételer le soir à l'étape. C'est toujours bien d'élargir ses horizons. Et j'avais besoin de découvrir et d'apprendre la gestion de la clientèle : en bac pro, je n'avais été formée que sur la partie élevage. C'était l'occasion pour moi d'apprendre la partie commerciale d'une activité. Je me suis dit que cela me serait utile une fois à mon compte".

Participer aux concours et foires pour gagner en notoriété

Sur ses terres, Lena a dressé ses pouliches en vue de participer à des concours équins. "J'en ai fait plusieurs en régions et me voilà à concourir pour la première fois à Paris au Salon international de l'agriculture !" Lena y présente son percheron, Émir du Jeunet, bientôt 4 ans, 1 mètre 65 à l'encolure, qui concourt dans la catégorie Modèles et allures. "C'est un concours de beauté comme Miss France !", sourit Lena : "Le jury va juger le cheval de trait sur sa tête, son encolure, son dos, ses pattes, ses fesses. Puis il regarde comment l'animal marche au pas. Ensuite on le fait trotter pour évaluer sa souplesse et sa légèreté".

Samedi 24 février, Lena et Émir du Jeunet ont eu à passer une épreuve de traction : le jury est attentif à la façon dont le cheval se comporte quand il tire un traîneau sur lequel on ajoute un poids supplémentaire tous les 20 mètres. "Mon cheval n'était pas très à l'aise, un peu stressé. On n'a pas été au bout de l'épreuve, mais ce n'est pas grave", sourit Lena. L'essentiel est ailleurs : en participant aux foires, salons et concours, Lena cultive son réseau et se fait connaître comme éleveuse et dresseuse de percherons. Elle en aura besoin plus tard quand elle sera seule à la tête de l'exploitation familiale. Être présente au Salon international de l'agriculture lui permet de donner de la visibilité à son activité.

Son projet : développer l'activité débourrage de chevaux

Car Lena a identifié un besoin sur lequel elle compte investir une fois l'exploitation familiale reprise : "En France il existe de moins en moins de candidats à l'élevage de chevaux de trait et de moins en moins de dresseurs. Dans le même temps beaucoup de gens veulent s'installer dans le maraîchage mais ne connaissent pas les chevaux. Ils veulent donc un cheval prêt en main. Il y a un créneau pour moi et mes compétences". Lena projette ainsi de développer l'activité débourrage de chevaux qui consiste à dresser le cheval à accepter la selle, le filet et le cavalier et, bien sûr, à tirer un véhicule !

"D'ici 3 à 4 ans, quand mon père sera en pré-retraite, je reprendrai l'exploitation. Je diminuerai le nombre de vaches et j'augmenterai celui des chevaux. J'en ai déjà une trentaine. Je garderai 50 vaches pour assurer un revenu financier", détaille Léna. Mais les banques ne se laissent pas facilement convaincre, surtout pour des projets touchant exclusivement à la filière équine. "Heureusement c'est quand même plus facile de s'installer quand on a déjà des parents agriculteurs." Actuellement Léna vit avec le statut d'aide familial en agriculture : "J'aide à la ferme, j'ai la couverture sociale, je ne suis pas rémunérée mais ce statut facilite ensuite l'installation". Lena complète ses revenus en travaillant à l'extérieur sur d'autres exploitations qu'elle facture. Un job alimentaire qui la rapproche peu à peu de son rêve professionnel.

Un peu plus de 15.000 nouveaux chefs d’exploitation en 2015

Le nombre de nouveaux agriculteurs qui se sont s'installés s’est élevé, pour l’année 2015, à 15.100. Un chiffre qui représente une hausse de 16,8 % sur un an. Sur ces 15.100 agriculteurs, 9.250 jeunes chefs d’exploitation âgés de moins de 40 ans (61 % des nouveaux chefs d’exploitation). Les nouveaux exploitants se concentrent dans 5 grandes filières de production : les céréales ou cultures industrielles (17,4 %), la viticulture (14,4 %), la polyculture-élevage (12,9 %), l’élevage de vaches laitières (12,1 %), et l’élevage de bovins-viande (11 %). (Source : Mutualité sociale agricole).

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