Reportage

Reportage : 3 futurs journalistes en stage à l’AFP

Maxime - CFJ – JRI - En stage à l'AFP - 2015
Maxime, 24 ans, en fin de cursus de JRI (journaliste reporter d’images) au CFJ (Centre de formation des journalistes) de Paris. © Meyer / Tendance Floue pour l'Étudiant
Par Isabelle Maradan, publié le 25 septembre 2015
1 min

Camille, Maxime et Tanguy ont passé plusieurs semaines à l’Agence France Presse, en juin dernier, pour effectuer un stage inscrit dans leur formation de journalisme, bien décidés à tirer le meilleur parti de cette expérience professionnelle.

En traversant le premier étage du bâtiment de l'Agence France Presse, rue Vivienne, en plein cœur de Paris, il suffit de se laisser porter par les murmures pour voyager de l'Espagne au Royaume-Uni en passant par la France en moins d'une minute. Il est 9 h 29 à Paris. 3 h 29 à Washington. Comme l'indiquent les horloges accrochées en haut de l'un des murs de chaque open space.

Après la conférence de rédaction "France", Guillaume Rollin, adjoint au chef de service de l'AFP-TV, informe Maxime de son départ "à midi, sur une manif juste devant". De quoi permettre au stagiaire de 24 ans, en fin de cursus de JRI (journaliste reporter d'images) au CFJ (Centre de formation des journalistes) de Paris, de poursuivre le montage du "portrait du gérant du dernier vidéoclub de Paris, qui va fermer après 5 ans de difficultés", explique-t-il. Il y travaille depuis 9 h ce matin "sur Final Cut 7, pas très différent d'Avid" (des logiciels de montage vidéo), que Maxime utilise déjà à l'école.

"Maxime sait se placer et a l'air de faire les plans qu'il faut"

Son sujet commenté fera 2 minutes, "le plus long format en vidéo, ici", précise le jeune homme. Il aura l'occasion de tester des formats plus longs pour le "13 Heures" de TF1, où il a décroché un contrat à durée déterminée de 6 mois en remportant une bourse.

"Je suis venu ici pour améliorer mon point faible : le commentaire." Après 3 semaines, Maxime estime avoir "une voix plus posée" et "une écriture plus télé". Gabrielle Châtelain, adjointe à la coordination de l'AFP-TV France, a suivi son travail. "Il n'a pas encore l'habitude de construire un sujet TV", remarque-t-elle, mais "à la caméra, ça va très bien". "Maxime est un bon stagiaire, qui propose des idées", renchérit Guillaume Rollin, un œil sur l'horloge.

Maîtriser l'infographie pour faire du Web

Il est 10 h 30. Camille, 21 ans, revoit le script de sa vidéographie de 60 secondes sur la sous-nutrition dans le monde. "Fais des phrases plus courtes", lui conseille Anne-Claire Huet, éditrice au service infographie, où sont réalisées des infographies "fixes" et des vidéographies, "presque toutes en 3D".

Arrivée lundi, l'étudiante, en fin de première année de l'école de journalisme de Sciences po Paris, a "tout de suite demandé ce qu'elle pouvait faire et a proposé plusieurs sujets", relève l'éditrice. Camille a choisi ce service parce qu'elle veut "faire du Web" et juge indispensable de "maîtriser l'infographie". Après ces 15 jours à l'AFP, celle qui a envie de faire ce métier depuis son stage de quatrième dans le journal de sa ville, a décidé de passer le mois de juillet en stage à Franceinfotv.fr, où elle espère "être prise en apprentissage, puis embauchée".

Isoler les "plans de coupe" et les "sonores" pour la télé

Vers midi, juste devant le palais Brongniart, Maxime filme "la manif des techniciens de la Bourse". "Euronext a annoncé 101 emplois en moins. Ils sont environ 80 manifestants", jauge Francis Curla, 30 ans de maison, qui accompagne le stagiaire pour la première fois. Il le laisse d'abord "faire ses plans".

Plan large des manifestants avec fumigènes au premier plan, plan serré de la banderole, des drapeaux, Maxime tourne sans hésiter, avant de choisir son cadre et l'arrière-plan de ses interviews. "Il sait se placer et a l'air de faire les plans qu'il faut", observe Francis, serein. "Je me suis déjà retrouvé seul à faire une interview dans une manif et pas de cadreur à l'horizon. Il était parti devant au galop, en oubliant qu'on était deux", poursuit le journaliste confirmé, avant de rejoindre Maxime. "On arrête là, on va avoir trop d'images", lui lance-t-il.

De retour à l'agence, celui qui a voulu devenir JRI après en avoir rencontré un, lorsqu'il étudiait à Sciences po Lille, passe une petite demi-heure à monter ses images. Son rythme n'a rien à envier à celui des plus expérimentés. Il isole avec dextérité les "plans de coupe" et les "sonores" (interviews) mis à la disposition des clients de l'agence, des sites Web et des chaînes de télé, principalement. Maxime envoie ensuite le projet qui a été créé sur ce qu'il nomme "le labyrinthe", le logiciel de transfert interne qu'il avoue avoir mis "quelques jours à maîtriser". Visionnées par le chef de service, ses images sont transmises au service "anglo", qui traduira le texte décrivant leur contexte et leur contenu pour les clients anglophones.

Écrire en français et en anglais

Pendant ce temps, au rez-de-chaussée, Tanguy, rugbyman amateur et skieur "comme tous les Grenoblois", termine son sandwich en lisant "l'Équipe". Dans son dos, un écran de télé diffuse un match de tennis. L'étudiant de 26 ans, en master 2 à l'école de journalisme de Grenoble (38), est en stage au "desk sport" depuis 4 jours. Il attend un retour sur la forme à donner à l'article qu'il a proposé le matin même, suite à l'annonce du départ au Mexique du footballeur international français, André-Pierre Gignac, après 5 saisons à l'Olympique de Marseille. Tanguy veut lister les joueurs de foot ayant choisi des destinations "exotiques" au cours de leur carrière. "Fais-le sous forme de puces, préconise Philippe Grélard, chef du service foot. 4 lignes par joueur." La veille, le papier de Tanguy "sur un sujet pourtant rébarbatif", selon le chef, a été bien repris sur le Net.

Aujourd'hui, après la version française de son article, Tanguy s'attaquera à la version internationale, en ne gardant que les joueurs connus dans le monde entier. "Ici, il va toucher du doigt différents formats", assure Philippe Grélard. Déjà reparti à son poste, le rédacteur, qui sait qu'il veut être journaliste depuis sa participation à la gazette de son collège, évalue à 1 heure le temps de révision de sa copie. Il sera dans les temps.

Apprendre à placer sa voix

Au premier étage, Camille s'est enfermée dans la petite cabine insonorisée du service pour enregistrer le texte de la vidéographie. Le logiciel qu'elle utilise n'est "pas le même qu'à l'école, mais il s'en rapproche beaucoup", assure-t-elle. Elle se racle la gorge et commence à lire. Enregistrer sa voix, Camille le fait "tout le temps" à l'école. Elle sait "réveiller les gens" en radio et "poser sa voix" en télé, mais c'est la première fois qu'elle fait une voix pour une vidéographie. "Ce n'est pas bien du tout ! Trop linéaire", juge-t-elle à l'écoute. "Je vais réécouter la voix d'Anne-Claire Huet", décide Camille, opiniâtre.

“Camille a tout de suite proposé plusieurs sujets"

Une fois qu'elle aura terminé, un graphiste réalisera l'animation 3D, selon les indications fournies dans le scénario de l'étudiante. Il faut plusieurs jours avant de finaliser une vidéographie de 60 secondes. En revanche, Camille réalisera l'infographie fixe en 1 jour sur Illustrator, logiciel de création graphique vectorielle, qu'elle maîtrise.

Être dynamique et curieux

Les professionnels encadrant des stagiaires au sein de l'emblématique agence de presse sont unanimes : les étudiants d'écoles de journalisme sont "techniquement au point et ont de bons réflexes de vérification de l'info". Ce qui fait la différence ? "C'est davantage une question de personne que d'école", estime Guillaume Rollin, qui a été formé au CUEJ (Centre universitaire d'enseignement du journalisme), à Strasbourg (67).

Le chef du service foot, Philippe Grélard, renchérit : "Un bon stagiaire propose des sujets et est curieux, contrairement à ceux qui ne parlent pas et attendent derrière leur ordi avec les écouteurs sur les oreilles, ce qui me paraît toujours un peu bizarre dans ce métier où il faut aller vers les gens." Pour Francis Curla, "il suffit de 24 à 48 heures pour savoir si les jeunes sont bons ou pas". Concernant Camille, Tanguy et Maxime, une journée aura suffi pour se faire une idée.

L'AFP a reçu, en 2014, 244 stagiaires tous métiers confondus et sur l'ensemble de ses bureaux dans le monde. Les stages en journalisme durent 15 jours à Paris et jusqu'à 2 mois à l'étranger et en régions.

14 écoles de journalisme reconnues par la profession
Seules 14 écoles sur une trentaine sont reconnues par la CPNEJ (Commission paritaire nationale de l'emploi des journalistes) :

– 6 écoles publiques rattachées à l'université préparent à un master :
le CELSA (École des hautes études en sciences de l'information et de la communication) et l'IFP (Institut français de presse) à Paris, le CUEJ (Centre universitaire d'enseignement du journalisme) à Strasbourg, l'EJCAM (École de journalisme et de communication) à Aix-Marseille (13), l'EJDG (École de journalisme) de Grenoble et l'IJBA (Institut de journalisme Bordeaux Aquitaine) à Bordeaux (33).

– 5 écoles privées délivrent un diplôme d'école de niveau bac+5 : le CFJ (Centre de formation des journalistes) de Paris, l'ESJ (École supérieure de journalisme) de Lille, l'EJT (École de journalisme de Toulouse) à Toulouse (31), l'IPJ (Institut pratique du journalisme) Paris-Dauphine et Sciences po Paris.

– les IUT de Lannion (22), Tours (37) et Nice-Cannes (06) proposent un DUT (diplôme universitaire de technologie) Infocom option journalisme, de niveau bac+2. Il est aussi possible de décrocher une licence pro (bac+3) de journalisme également reconnue.

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