SOS, j’ai du mal à gérer mes émotions

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Publié le 30/01/2015 par TRD_import_MariaPoblete ,
Vous ragez devant votre copie face a la difficulte. Fondez en larmes quand on vous rend une mauvaise note. Surreagissez aux remarques de vos amis. Bref, vous etes tres emotif(ive) et cela vous joue des tours. Vous aimeriez bien ne plus vous mettre dans tous vos etats, mais comment y parvenir ? Self control, mode d'emploi.

Premier pas pour canaliser votre émotivité : mettre des mots sur les sentiments qui vous assaillent. // © PlainPicture.

« Je deviens rouge comme une tomate dès qu’un professeur me demande de parler – je ne lève jamais la main de moi-même –, je peux pleurer pendant une soirée parce que je crois avoir raté une dissertation ou piquer une très grosse colère parce que ma petite sœur m’a embarqué mon plus beau pull sans me le demander ! » Camille, 16 ans, en 1re S au lycée Pierre-Béghin, à Moirans (38), recense les émotions qui la traversent et les situations qui la mettent dans tous ses états.

“Je me fatigue avec mes pleurs et mes montagnes russes !”

 » Je suis capable de me transformer en une minute en la fille la plus hystérique de la ville, souffle-t-elle, je me fatigue avec mes pleurs et mes montagnes russes ! » Florence, sa mère, le confirme : « Enfant, elle était hypergaie, elle sautillait de joie tout le temps et entraînait ses copines dans des délires et de longues séances de déguisement, je les entendais rigoler tout l’après-midi ; depuis deux ans, elle est instable, elle monte et redescend en quelques minutes. »

Nicole Prieur, psychothérapeute, philosophe et auteure de « Grandir avec ses enfants » (éditions L’Atelier des parents), se veut rassurante : à cet âge, être d’humeur changeante est classique. « L’hypersensibilité, explique-t-elle, est inhérente à l’adolescence, une période où l’on vit de tels bouleversements physiques, biologiques et psychologiques que les émotions jaillissent, et elles sont souvent contradictoires ; on est perdu entre la joie de grandir et la peur de ce qu’on trouvera. »

Parlez de ce que vous ressentez

« J’étais très tendue au lycée, surtout en 2nde, je pleurais beaucoup et je me retrouvais souvent à l’infirmerie, raconte Hélène, 18 ans, en première année de lettres modernes à Paris 3. C’est grâce aux discussions avec mes parents et à un rendez-vous chez une psy tous les quinze jours que j’ai admis que… j’étais normale, que je devais attendre, que ça passerait. Et c’est vrai, c’est passé ! Ma période au lycée a été un moment où je me suis cherchée, maintenant ça va, je me sens un peu plus solide et moins désorientée. »

Ce qu’évoque Hélène, et que les spécialistes connaissent bien, c’est la construction de l’identité, avec, en toile de fond, une tempête hormonale qui chamboule tout. « La sensibilité est exacerbée, avec un sentiment que je compare à une fête foraine : le sol se dérobe sous les pieds, on tangue et c’est très difficile de garder l’équilibre, explique le Dr Olivier Spinnler, spécialiste des émotions et auteur de Vivre avec les autres (éditions Odile Jacob). La fragilité narcissique – qui suis-je, moi ? – est à son summum, mais, que l’on se rassure, cette tempête a une fin ! » Après la pluie, le beau temps ? Oui, à condition de donner un nom à ses émotions.

Analysez vos sentiments

Un chantier qu’a entrepris Virginie, 18 ans, étudiante en première année à l’IEP (institut d’études politiques) d’Aix-en-Provence (13). »J’ai commencé avec ma prof de gymnastique rythmique et sportive en classe de 3e ! Elle nous donnait des trucs pour être bien dans notre corps, raconte Virginie. C’est tout simple, il suffit de fermer les yeux et de sentir ses émotions dans son corps quand ça ne va pas – ou quand ça va trop bien, car c’est pareil avec la joie. On voit ce que la tristesse ou la colère produisent en nous, ce que ça nous fait : le cœur qui bat, l’envie de sautiller, les mains moites, les tremblements, puis on apprend à l’exprimer, soit physiquement – moi, j’aime danser –, ou alors en écrivant. » Certes, la méthode demande un peu d’entraînement, mais elle est efficace.

Acceptez d’éprouver de la colère, de la jalousie…

Charlotte, 15 ans, en 2nde au lycée Voltaire à Orléans (45), écrit en cas de « débordement ». « Lorsque je sens que ça ne va pas, que la colère ou la tristesse m’envahissent, même pour des broutilles, je prends ma plume, déclare la jeune fille, qui rêve de devenir poète. D’abord, je jette en vrac sur le papier tout ce qui me passe par la tête, sans aucune retenue, comme dans un puits sans fond, puis je repêche certaines phrases qui me paraissent essentielles comme ‘cette @#!!!$$@## m’a snobée devant mon copain, je ne veux plus la voir’, puis j’ajoute ce que je ressens vraiment, j’ai envie de la frapper, de crier, de pleurer, oui, mais dans quel but, est-ce que ça me ferait du bien ou l’inverse ? Je chemine ainsi en couchant mes sentiments sur une feuille. Enfin, je termine généralement en me demandant si je trouve cette situation injuste et si je suis blessée. Eh bien, oui, c’est vrai, j’ai mal. »

« Contrairement à une croyance répandue, les émotions ne sont pas nos ennemies, précise Jeanne Siaud-Facchin, psychologue clinicienne. C’est en les acceptant que nous pouvons nous comprendre et nous mettre en mouvement, la fonction des émotions est de répondre et d’aider à s’adapter à l’environne­ment.  » À force, non seulement on ne se laisse plus déborder par elles, mais on finit par les anticiper et les gérer.

Ne laissez pas vos excès piloter !

Thomas, 16 ans, en 2nde au lycée Jean-Bart de Dunkerque (59), éprouve une impression de liberté depuis qu’il contrôle ses envolées. « Pendant ma première 2nde, j’étais un cas : en cours, j’arrachais les pages de mes livres quand j’étais trop énervé, raconte-t-il. J’avais l’impression que les autres me jugeaient à cause de mes colères, je trouvais les profs injustes. Cette année, ça va mieux parce que je réfléchis avant d’agir et que j’ai décidé de piloter ma vie, c’est moi qui décide, pas mes excès de rage et mes peurs ! »

Voyez aussi dans cette « faiblesse » une force !

À 21 ans, Kevin regarde en arrière et pousse un grand ouf. « J’étais hypersensible entre 14 et 16 ans, témoigne l’étudiant en L3 d’espagnol à l’université de Marne-la-Vallée (77). Quand tu es un garçon, c’est encore plus compliqué de pleurer, c’est mal vu. Depuis la fin du lycée, la tempête s’est calmée, je me suis recentré sur mes priorités, mes études, ma copine, mon vélo, puis j’ai accepté cette sensibilité qui est de famille, on pleure tous devant un dessin animé ou devant une finale de foot ! Maintenant, je pense que cette émotivité n’est pas un handicap. Je suis un garçon qui exprime ses sentiments, les filles y sont très sensibles, je dis ce que je ressens, c’est une force.

À faire quand vous sentez le contrôle vous échapper …

Pour la psychologue clinicienne Jeanne Siaud-Facchin, auteure de « Tout est là, juste là » (éditions Odile Jacob), il suffit de quelques minutes pour méditer sur l’état de ses émotions. À faire dès que nécessaire (même dix fois par jour et surtout en cas de stress ou d’anxiété !).

« C’est comme si on refermait les volets de sa maison en prenant un instant pour savoir comment on se sent. Je m’assois, je m’arrête, je sens les points de contact de mon corps avec le siège, mes pieds sur le sol, ma tête dans l’alignement de ma colonne vertébrale, et doucement je ferme les yeux, je tourne mon attention à l’intérieur de moi. Je trouve d’abord l’agitation de mes pensées et le tumulte des émotions. Maintenant, j’entre en contact avec ce qui est là, j’observe et je ne lutte pas contre les pensées. Je me laisse embarquer par elles et je les regarde comme si j’étais sur les berges d’un fleuve. J’amène mon attention sur ma respiration. Sans critiquer ce que je fais, je me concentre sur le souffle dans mon corps. »